Affaire Platinum Card : La présidente jette finalement l’éponge!

Au-delà de la saga Platinum Card,  c’est l’affaire Alvaro Sobrinho elle-même qui a finalement eu raison de la présidente de la République. Alors qu’elle avait exprimé sa détermination d’aller jusqu’au bout pour que la lumière soit faite sur toute cette histoire, Ameenah Gurib-Fakim a finalement jeté l’éponge hier. Et ce, tandis qu’on s’y attendait le moins. D’ailleurs une heure avant l’annonce de sa démission, son homme de loi, Me Yousuf Mohamed nous disait qu’elle était d’humeur combative et qu’elle était disposée à déballer tout ce qu’elle savait. Revirement de situation plus tard. Suite à une rencontre entre la présidente et le Senior Counsel, ce dernier annonce qu’elle démissionnera à midi le 23 mars prochain. La raison avancée, elle ne voulait pas que le pays subisse une crise constitutionnelle et que les intérêts de sa famille passaient avant tout.

Dans les coulisses toutefois, l’on soutient que cette décision ferait suite au faux pas qu’elle aurait commis en instituant une commission d’enquête. Une décision qui a d’ailleurs choqué son avocat, Me Yousuf Mohamed. « Selon moi, elle aurait dû passer par le cabinet pour instituer une commission d’enquête. Il se peut qu’elle ait eu une bad reading de la Constitution mais c’est à la cour Suprême de trancher », nous confiait-il avant son tête-à-tête avec la locataire de la State House. L’on ne comprend pas toutefois pourquoi elle a tout d’un coup décidé de tout abandonner alors qu’elle voulait à tout prix défendre son honneur et son intégrité. Pourquoi a-t-elle tenu tout le pays en haleine si elle comptait renoncer en cours de route ? N’aurait-elle pas mieux fait de demander à la Cour suprême de statuer sur la constitutionalité de la commission d’enquête au lieu de se retirer de la course en prenant la petite porte ?

Qu’est-ce qui se passera maintenant qu’elle a décidé de démissionner ? La façon dont elle s’est défendue jusqu’ici nous pousse à croire qu’elle est en présence de beaucoup d’éléments pouvant incriminer d’autres personnes, dont des membres influents du gouvernement. Va-t-elle tout déballer ou bien se contentera-t-elle de garder le secret ? Il faut aussi qu’on sache s’il y a eu pressions sur elle pour qu’elle parte.  Les informations que le Premier ministre a dit détenir sur elle ont-elles servi d’appât pour qu’elle se plie finalement aux exigences du gouvernement ? Tout n’est pas perdu pour autant. Ameenah Gurib-Fakim peut toujours faire amende honorable en révélant tout ce qu’elle sait. Les moyens, légaux ou autres, ne manquent pas pour qu’elle le fasse. Surtout si elle n’a vraiment rien à se reprocher.

Démission d’Ameenah Gurib-Fakim : La lettre a bien atterri chez la Speaker

C’est une certitude. Ameenah Gurib-Fakim quittera bel et bien la State House ce vendredi 23 mars. Dans une lettre adressée à la Speaker de l’Assemblée Nationale, Maya Hanoomanjee, la présidente de la République explique qu’elle a décidé de démissionner dans l’intérêt supérieur du pays et celui de la population. Cependant, il nous revient qu’Ameenah Gurib-Fakim a expliqué qu’elle a besoin d’une semaine pour enlever ses effets personnels de la State House.  Il se pourrait alors que le parlement soit rappelé vendredi après-midi pour voter un nouveau président. Plusieurs noms sont cités dont celui du Dr Rashid Beebeejaun, Ahmad Jeewa ou encore Sam Lauthan. Interrogé à l’issue d’une fonction à Bois-Chéri, Pravind Jugnauth n’a pas voulu citer de nom.

Réactions:

Pravind Jugnauth, Premier ministre et leader du MSM : « J’ai dit que j’allais apporter des informations à la population sur les reproches que nous faisons à la présidente. À l’heure où je vous parle, je ne suis pas au courant si elle a démissionné. Pour cela, il faut que la Speaker m’informe de la présence d’une lettre formelle mais tel n’est pas le cas. Laissez-moi voir d’abord et on verra après. Il y a trop de spéculations et moi je ne travaille pas avec des rumeurs. Je n’ai jamais menacé la présidente mais j’avais des informations sur elle à communiquer à la population. Notre relation avec le ML est au beau fixe mais je ne peux prédire l’avenir. On verra. »  

Sir Anerood Jugnauth, ministre Mentor : « Mo péna nanié pou dire encore. »

Xavier Duval, leader de l’opposition et leader du PMSD : « Ameenah Gurib-Fakim emboîte le pas aux Jacob Zuma et Robert Mugabé, qui au lieu de faire face à une motion de destitution, ont préféré partir par la petite porte. Nous nous attendions à la voir devant le tribunal pour dénoncer les gros requins mais une chose est sûre, nous n’allons pas lâcher prise. Nous espérons qu’elle se rattrape un peu et qu’elle dévoile toute la vérité, que ce soit dans une conférence de presse, dans un affidavit ou devant une commission d’enquête. La population attend des réponses. »

Arvin Boolell, député du PTr : « C’est bien qu’elle a décidé de partir. C’est une sage décision qu’elle a prise dans l’intérêt du pays.  Mais ceci dit, sa démission ne met pas fin à toute l’affaire car le Premier ministre a affirmé avoir des informations incriminantes contre la présidente de la République.  Il faut maintenant et plus que jamais, au nom de la moralité politique, instituer une commission d’enquête sur toute l’affaire Sobrinho.  Je suis triste pour la présidente qui s’est laissée induire en erreur concernant les provisions de la Commission of Enquiry Act. Elle a été piégée ! »

Alan Ganoo, président et député du MP : « Je suis d’avis qu’elle a dû subir certaines pressions, surtout qu’elle avait en face d’elle un gouvernement entier et une opposition unie pour voter la motion de destitution. Je suis également d’avis qu’elle a outrepassé les limites de ses prérogatives en instituant cette commission d’enquête. En partant maintenant, elle a évité les humiliations d’une destitution mais elle a été brave ! Elle a bravé ses détracteurs. Ceci dit, il faut qu’elle vienne de l’avant maintenant pour dire toute la vérité sur toute l’affaire Sobrinho. »

Anil Gayan, ministre du Tourisme et député du ML : « Je suis en comité actuellement. »

Ajay Gunness, secrétaire-général du MMM : « Comme nous l’avons toujours réclamé, il faut que toute la vérité sur l’affaire Sobrinho soit dévoilée. La décision d’Ameenah Gurib-Fakim d’instituer une commission d’enquête est un viol de la Constitution.  Cette décision fatale allait être insoutenable pour la présidente qui a alors décidé de partir. Qu’il soit clair, ce ne sera pas du business as usual. Il faut qu’il y ait une vraie commission d’enquête sur toute l’affaire Sobrinho et qu’elle vienne dire toute la vérité à la population. On doit savoir qui a tout orchestré et pourquoi… »

Roshi Bhadain, leader du Reform Party : « C’est une sage décision prise dans l’intérêt de la République de Maurice. Il est important que le pays cesse de souffrir d’un système archaïque et pourri.»

Ivan Collendavelloo, le leader du ML n’a pas répondu à nos appels.