Alors qu’il mourait…« Pa fine dire ou pena l’ambulance ? », dit un préposé de la DMU à son épouse

  • C’est ce qu’un membre de la DMU aurait brutalement dit à l’épouse de Bhoomitsing Rajcoomar, un sexagénaire décédé de la Covid-19 alors qu’il était en auto-isolement

Bhoomitsing Rajcoomar, en auto-isolation, est mort chez lui dans des circonstances tragiques. Les membres de sa famille pointent du doigt les services de santé, notamment la ‘Domiciliary Monitoring Unit’ (DMU) et l’hôpital du Nord qui, selon eux, ont sciemment ignoré leurs appels à l’aide.

Bhoomitsing Rajcoomar avait 60 ans au moment de sa mort. Ce chauffeur de la Mauritius Ports Authority est un habitant à L’Esperance-Trébuchet avec sa femme et son fils de 27 ans. Ce dernier travaille pour son propre compte.

Le sexagénaire avait été testé positif à la covid-19 le 18 octobre à l’hôpital du Nord. Il avait été autorisé à s’auto-isoler chez lui. Ce dimanche 24 octobre, il avait commercé à ressentir un léger étouffement. Le soir, il avait commencé à se plaindre de brûlures d’estomac.  Le lendemain, lundi 25 octobre, vers 6 h du matin, son étouffement avait commencé à s’aggraver. Sa femme et son fils se pressaient à son chevet, impuissants de faire quoi que ce soit pour lui. « Mo pe touffer, amene moi lopital », haletait le vieil homme.

Sa femme devaient appeler la ‘hotline’ de la ‘Domiciliary Monitoring Unit’ (DMU), le service de santé qui est censée exercer une surveillance chez les personnes atteintes de covid-19 en auto-isolation. Une préposée devait lui dire qu’une ambulance ne sera disponible que vers 10 h 30. Les longues minutes s’égrenaient, mais Bhoomitsing Rajcoomar devait suffoquer de plus en plus. Sa femme, en proie à une vive panique, devait essayer de rappeler la DMU, où la préposée devait lui parler brutalement, en ces termes : « Pa fine dire ou pena l’ambulance ? Ou pa kompran ? Ki fer ou pe fatig nou ? ».

Vu l’état de Bhoomitsing Rajcoomar, qui manquait d’air et qui se débattait, il était impossible de le mettre dans une voiture. À un moment donné, sa famille le plaça sur la devanture de la maison, pour qu’il soit rapidement embarqué dans une ambulance.

Sa femme appela son frère à la rescousse. Ce dernier, dans la cinquantaine, employé à son compte, multiplia les appels vers l’hôpital du Nord, plus d’une dizaine, affirme-t-il, mais personne ne prenait les appels, ce que ce dernier trouve « inadmissible » pour un hôpital. D’autres appels au SAMU ne donnèrent rien.

Les voisins, rameutés, devaient eux aussi lancé des appels de détresse à droite et à gauche. Une voisine appela une clinique privée, qui tenta de prendre contact avec le poste de police de la localité, initiative qui devait se révéler infructueuse.

Pendant ce temps, le  beau-frère de Bhoomitsing Rajcoomar a pu rejoindre au téléphone un médecin de la DMU. Ce dernier, outré par l’attitude des préposés de son propre service, devait venir dans sa propre voiture. Ouf de soulagement pour la famille Rajcoomar…  Soulagement qui sera toutefois de courte durée. Le praticien, constatant l’état du malade, se tourna vers son propre service pour une ambulance, mais peine perdue. Il sa tentative de ranimer Bhoomitsing Rajcoomar échoua.

 Vers 9 h 25, l’ambulance de la DMU arriva finalement … mais il était trop tard. Le sexagénaire avait déjà rendu l’âme. Il a été incinéré le même jour.

Son frère se demande quant à lui s’il n’y a pas eu non-assistance à personne en danger. « Le gouvernement demande aux personnes atteintes de covid-19 de s’isoler chez elles. Mais il doit assumer ses responsabilités en venant en aide aux personnes dont l’état de santé s’est détérioré brusquement. Il doit savoir que les gens n’ont pas de respirateurs chez eux », dit-il. La famille compte bien considérer toutes les options pour que justice soit rendu au défunt..

La veuve de Bhoomitsing Rajcoomar est inconsolable. Elle maintient que son mari aurait pu être sauvé si l’ambulance était arrivée promptement et s’il avait été transporté rapidement à l’hôpital, où il aurait pu être mis sous respiration assistée.

En larmes, elle nous dit : « Je tiens à témoigner du calvaire que j’ai subi ce jour-là, pour que les services de santé revoient leur copie et pour que cela n’arrive pas à une autre famille. Je prie pour qu’une autre personne n’ait pas à passer par ce que j’ai vécu. »