Amira Kajee, morte dans un accident de la route : Le père : « Ene ti poignée la terre so fiancé pane jeter … » 

« Papa, mo pe aller, mo pour retourne boner », étaient les derniers mots d’Amira Kajee, 20 ans, à son père, Ibrahim. Ce dernier était loin de se douter que ce serait le dernier souvenir qu’il garderait de sa fille. Amira  devait périr dans un accident de la route alors que le 4 X 4 que conduisait son fiancé a fait plusieurs embardées sur la route. Certains aspects de cet accident demeurent troublants.

Ibrahim Kajee et sa petite famille sont des habitants de la capitale. Il trouve difficilement les mots précis pour décrire sa fille. « Jamais li ti pe gagne colère », nous dit-il. Un proche de la famille la décrit comme une fille toujours souriante. Amira suivait des cours en ‘Accounting’ et adorait ses études. La jeune fille aurait dû fêter ses 20 ans le 10 juin mais le destin en a décidé autrement : elle a péri le 16 juin, après un accident de la route survenu à Grand-Baie le 7 juin.

La maman d’Amira, quant à elle, est inconsolable et ne parle presque à personne. Le père tente de son mieux de prendre son courage à deux mains et de faire face à ce malheur.

Amira et Irshad s’étaient fiancés depuis environ sept mois, et le mariage était prévu pour l’année prochaine, soit le 3 juillet. Amira était l’unique fille de ses parents.  Elle a aussi un petit frère de 15 ans, qui pleure toujours la mort de sa sœur.

Le jour de l’accident, Amira ne voulait pas sortir, car elle avait ses devoirs et ses révisions à faire, mais sur l’insistance de son fiancé, la fille est finalement tombée d’accord pour aller faire un tour en voiture. À ce moment-là, elle était loin de se douter qu’elle ne rentrerait jamais chez elle. Avec les proches de son fiancé, ils se sont rendus dans un cortège de trois voitures à La Croisette à Grand-Baie.

Après le dîner, Amira et son fiancé Irshad avaient pris place dans une 4 X 4  en direction de Port-Louis. Le véhicule devait déraper avant de faire plusieurs tonneaux. Irshad est sorti indemne de l’accident, quasiment sans aucune blessure grave. Amira n’a hélas pas eu de chance.

C’est vers 20 heures qu’Ibrahim est informé par la mère d’Irshad de l’accident. En se rendant à l’hôpital du Nord, les membres de la famille d’Amira commencent à prier.

« C’est à travers ene vitre dans la salle qui mone trouve mo tifi. Banla pe dresse so la bouche, so la machoire in casser », se lamente le père, une fois arrivé à l’hôpital. Amira avait eu des multiples blessures sur son corps. Elle devait succomber neuf jours plus tard à l’hôpital du Nord, soit le mardi 16 juin. L’autopsie a conclu que le décès est dû à une « cranio-cerebral injury ».

Selon les proches d’Ibrahim, un médecin qui voyageait avec sa femme, a vu toute la scène de l’accident. Le médecin était juste derrière le véhicule du couple et aurait constaté de visu la vitesse à laquelle roulait Irshad. D’ailleurs, c’est lui qui a donné les premiers soins au couple avant que les services d’urgence et la police ne soient mandés sur le lieu.

Selon la famille d’Amira, ils ont entendu différentes versions concernant la vitesse à laquelle le jeune homme conduisait. Certains parlent d’une vitesse de 108 km/h, d’autres de 90 km/h, entre autres versions.

Pour Ibrahim, sa fille est partie trop tôt. Il ne cache pas sa colère car pour lui, la faute revient en grande partie au fiancé, qui conduisait trop vite : « Kan ou ine prend dimoune so zenfant en charge, ou bizin assume ou responsabilité ». En outre, il dit qu’il ne comprend pas certaines choses « étranges » qui se sont produites après l’accident.

Il explique que certains des bijoux que sa fille portait ce jour-là ont disparu. Il affirme avoir pu récupérer seulement sa montre. La bague de fiançailles d’Amira, qui était en diamant, n’était plus au doigt de cette dernière. Ibrahim Kajee considère tout ceci comme étant suspect. « Mo quitte tout dans la main Allah, le Créateur », dit-il d’une voix brisée par l’émotion.

Le père déplore que le fiancé ne soit pas venu vers lui pour lui fournir des explications après l’accident. « Ene ti poignée la terre li pane jeter pour Amira pour so ‘mayyat’ (NdlR : rites funéraires) », dit-il, cela alors qu’Amira et Irshad s’aimaient mutuellement depuis 4 ou 5 ans. Selon le père, le jeune homme de 22 ans est simplement venu afficher sa présence pour les funérailles de sa fille.

Toutefois, la famille d’Amira compte donner une suite à cette affaire. Ibrahim réclame que la vérité entourant cet accident éclate au grand jour, même s’il sait que cela ne lui rendra pas sa fille. Les autres membres de la famille pour leur part, demandent à ce qu’il n’y ait pas de ‘cover-up’ et lancent un appel auprès du nouveau commissaire de la police, Khemraj Servansingh, de veiller à ce que l’enquête soit bien diligentée et que la vérité puisse triompher.

Entretemps, Amira a emporté son lourd secret dans l’au-delà.

Sarah Khodadin