Arvin Boolell : « Toute action irréfléchie pourrait entraîner un dédommagement allant jusqu’à Rs 25 milliards »

St.Brandon…

Arvin Boolell, le chef de file du Parti travailliste (PTr) au Parlement, s’exprime sur le dossier St.Brandon…

Q : Le fait que Raphael Fishing occupe une partie de l’archipel de St. Brandon pose-t-il un problème au gouvernement ?

C’est le gouvernement qui est en train de créer des problèmes. Cela ne devrait poser aucun problème que cette compagnie occupe une partie de ces îles, sauf en ce qui concerne l’aspect de paiement. Raphael Fishing paie en effet un bail d’une roupie seulement. Je suis d’accord pour que l’État demande une somme plus conséquente. Mais ce que le gouvernement devrait faire, c’est entamer le dialogue et avoir des consultations avec Raphael Fishing pour apporter un changement au niveau du paiement. Le gouvernement devrait ainsi envisager une médiation ou un arbitrage à ce stade. Je le redis : les choses peuvent et doivent se faire dans le dialogue. Si le gouvernement compte reprendre ses droits sur les îles occupées par Raphael Fishing, il devra dédommager cette société avec une somme énorme, qui pourrait aller jusqu’à Rs 25 milliards.

Q : Avez-vous l’impression qu’une quelconque pression est exercée sur le gouvernement mauricien pour reprendre possession de tout l’archipel de St.Brandon ?

Il faudrait se demander pourquoi le gouvernement est en train de faire cela. Y a-t-il en effet une pression sur le gouvernement qui le pousse à faire cela ? Le ministre doit venir s’expliquer sur cette affaire. Il n’y a pas de contentieux en ce qui concerne la souveraineté de ces îles à ce stade. Il n’y pas de problème d’ordre géopolitique ou géostratégique mais plutôt un problème d’intégrité territoriale.

C’est simplement un harcèlement pour pousser Raphael Fishing vers la porte de sortie. Néanmoins, nous sommes dans un état de droit et on ne peut agir de cette manière. L’État n’a pas le droit de confisquer les biens d’une personne sans lui donner la moindre compensation. Il faudrait un plan d’ensemble, où nous devons savoir comment protéger notre intégrité territoriale, tout en sauvegardant aussi l’intérêt de Raphael Fishing. On ne peut agir comme l’Attorney General Maneesh Gobin l’a fait, qui est venu uniquement faire des commentaires sans réfléchir.

Q : Vous avez parlé de ‘hidden agenda’ du gouvernement. Qu’en est-il exactement ?

Le ministre Maneesh Gobin n’a pas évoqué les raisons du gouvernement pour reprendre ces îles. Il n’a pas dit comment le gouvernement compte s’y prendre. Le gouvernement compte faire quoi avec ces îles une fois qu’il les aurait reprises ? Est-ce qu’il compte les vendre ? Si oui, à qui ? Quel est le montant de la compensation qu’il compte payer à Raphael Fishing ? Il y a tant de questions qui se posent mais le gouvernement ne fournit pas assez d’explications. Le ministre a donc la responsabilité de venir expliquer.

Ceci dit, j’estime en effet que le gouvernement a un ‘hidden agenda’ sur toute cette affaire. Le gouvernement n’agit pas dans le respect des principes de la bonne gouvernance et dans la transparence. Il se livre à une chasse aux sorcières, alors que le mécanisme approprié est là pour résoudre les problèmes de ce genre. Je me demande si le gouvernement ne veut pas reprendre ces îles pour les donner à quelqu’un d’autre, notamment les petits copains ou petites copines.

Qu’en est-il de l’élément juridique ?

La loi est claire et nette. Il n’y a aucun doute sur l’élément juridique, à la lumière du jugement du ‘Privy Council’ en 2008, qui avait indiqué que la compagnie a le droit d’occuper ces îles, sur la base d’un ‘permanent grant’. Le gouvernement ne peut lui demander de partir sans qu’il y ait de conséquences sur le plan légal.

Q : Éprouvez-vous des appréhensions en ce qui concerne les développements à venir dans cette affaire ?

Si le gouvernement ne fournit pas d’explications, il serait en train d’envoyer des signaux contradictoires à la communauté internationale et aux investisseurs. Il ne peut porter atteinte aux titres et aux droits de propriété existants. Qui viendra investir dans le pays si demain l’État pourrait confisquer ses biens pour des raisons non justifiées ?