Billet : Quel renouveau sans la femme ?

Renouveau. C’est ce qu’exigent de plus en plus les citoyens. Après presque 53 ans de l’indépendance, la politique telle qu’on la connaît est au bout d’essoufflement. Il y a une demande pressante pour de nouveaux visages, du sang neuf, d’un nouveau dynamisme. Face à cette revendication, la classe politique se voit dans l’obligation de présenter un plan alternatif qui séduira jeunes et moins jeunes à l’approche des prochaines alternatives. Même Nando Bodha après sa démission du MSM après un quart de siècle passé au sein de ce parti, évoque maintenant l’élaboration d’un projet de société qui répondra aux aspirations des Mauriciens. Une prise de conscience, même tardive, qu’on ne peut qu’acclamer.

Ce qui nous froisse toutefois, c’est qu’on parle de rajeunissement et de renouveau sans qu’aucune priorité ne soit accordée à la place que tiendra la femme dans ce nouveau projet de société. Idéalement, cette question ne devrait même pas être soulevée. Parce qu’idéalement justement, la femme, qui représente plus de 50% de la population mauricienne, aurait dû de facto se trouver dans n’importe quelle équation politique. Mais la cruelle réalité, c’est qu’on est bien loin derrière en termes de représentativité féminine, surtout en politique. La vérité aussi blessante qu’elle puisse être, c’est que les hommes rechignent toujours, en 2021, à faire de la place aux femmes. Et c’est encore plus aberrant quand les plateformes citoyennes, qui donnent de plus en plus de la voix concernant ce renouveau dont elles souhaitent l’émergence, y font également l’impasse.

Ailleurs, on parle plus en termes de parité homme-femme, caractérisée depuis peu par l’élection de Kamala Harris à la vice-présidence des États-Unis. Plus près de nous, aux Seychelles, cinq des onze ministres fraîchement nommés en novembre 2020 sont des femmes. Chez nous malheureusement, la parité est loin d’être acquise, déjà qu’on n’arrive que très difficilement à présenter 30% de femmes aux élections ! Certains argueront sans doute que les femmes hésitent à se mouiller pour diverses raisons. On ne le nie pas. Mais y a-t-il suffisamment d’effort qui est fait pour valoriser la femme ? La réponse est NON. La femme reste, dans la plupart des cas, une arme qu’on utilise à volonté pour grossir les foules et pour extraire des votes. Point barre. Rien n’a changé à ce niveau jusqu’ici.

Oublions le gouvernement qu’on veut tous, ou presque, « b*** dehors », mais ceux qui représentent l’alternance se doivent sérieusement s’atteler à revoir leur copie pour y inclure la femme. La plateforme mixte Opposition-Citoyenne, qui ne comptait, mardi, qu’une seule femme parmi les 10 leaders politiques et représentants de la société civile a intérêt à en prendre bonne note. Et d’y remédier la prochaine fois. Sinon on comprendra que le renouveau promis n’est qu’une pure hypocrisie. La femme ne peut pas, et ne doit pas, être l’éternelle sacrifiée. Son avancement en politique ne peut plus se mesurer en micro-avancées. Il ne peut y avoir de vrai renouveau sans une représentativité féminine honorable. Pour y arriver, il faut impérativement que les femmes citoyennes, de toutes classes professionnelles ou sociales confondues, commencent aussi à faire entendre leur voix. It’s now or never…

Zahirah RADHA