Par Zahirah RADHA
Un jeudi pas comme les autres. Historique, diront certains. Deux membres de la famille, le père et le fils, l’ancien et l’actuel Premier ministre, ont tous les deux fait la Une de l’actualité. Pour des raisons différentes, évidemment. Le patriarche s’est distingué à l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations unies (ONU) sur le dossier Chagos alors que le fiston s’est, lui, retrouvé avec une épée de Damoclès suspendue sur la tête suite à la décision de la Cour suprême d’autoriser que le DPP fasse appel au Privy Council dans l’affaire Medpoint. Sir Anerood Jugnauth est acclamé de toutes parts, même par les opposants, tandis que Pravind Jugnauth est vilipendé par la majorité des Mauriciens. L’un est applaudi (clapped) pour avoir fait honneur au pays alors que l’autre a été « claqué » et jetant, du coup, en pâture le poste constitutionnel de Premier ministre. Le père a pu redorer son blason. Le fils, lui, est de nouveau éclaboussé par cette triste affaire de conflit d’intérêts.
Après avoir renié outrageusement ses responsabilités premier-ministérielles, celui qui s’était présenté à l’électorat, en décembre 2014, comme le Messiah qui allait redresser le pays, a finalement montré de quel bois il se chauffe. Certes, SAJ a agi de façon anti-démocratique en relayant le flambeau à son fils. Une pilule terriblement amère à avaler, le pays n’étant pas un bien qu’on lègue en héritage à sa progéniture. Une trahison que l’électorat n’était pas prêt d’oublier. D’autant qu’il ne s’est pas retiré complètement de la scène politique, se contentant d’occuper un poste ministériel, celui du Mentor, dont personne ne connait jusqu’ici les attributions exactes, sauf qu’il inclut le portefeuille du law and order, de Rodrigues et de Chagos. Apostrophé qu’il a été depuis qu’il a cédé sa place à Pravind Jugnauth, SAJ n’avait pas le droit à l’erreur sur le dossier Chagos. Il avait le devoir moral de ‘deliver’ à l’ONU. Il faut être malhonnête pour ne pas reconnaître qu’il a été exact au rendez-vous. Une petite victoire qui lui a permis de retrouver grâce aux yeux de la population. À condition, bien sûr, qu’il fasse honneur à son statut de Mentor et ne vienne pas tout gâcher plus tard avec son langage des plus fleuris.
Il a été pris dans son propre filet. Alors qu’il se croyait laver de tout soupçon, Pravind Jugnauth a été très vite rattrapé par la fâcheuse affaire Medpoint. Une fois que le DPP aura fait appel au Privy Council, il devra de nouveau se battre pour prouver son innocence. L’enjeu est de taille cette fois-ci puisqu’il est maintenant à la tête du pays. Jamais auparavant n’a-t-on eu un Premier ministre sur qui pèse une condamnation. Un mauvais précédent surtout après que la présidence a également été secouée par l’affaire Alvaro Sobrinho. Bonne gouvernance, dites-vous ?! Comment peut-on y prétendre alors que deux institutions clés du pays ont été vouées aux gémonies sous le présent régime ? Quelle image notre île Maurice va-t-elle projeter sur la scène internationale ? N’aurait-il pas été plus sage pour que Pravind Jugnauth ‘step down’ en attendant un éventuel verdict du Privy Council ? Mieux encore, au lieu de dépenser des millions de roupies dans une partielle au no 18, n’aurait-il pas été plus approprié que le gouvernement donne des élections générales anticipées ? Nous doutons fort que Pravind Jugnauth aura ‘the guts’ de prendre une telle décision dans l’intérêt supérieur du pays car il lui faudra être très solide pour faire face à la claque que la population lui infligera à coup sûr.