Pour sa première journée à la Conférence des Nations Unies sur l’Océan (UNO3), lundi 9 juin, le Premier ministre, Navin Ramgoolam, a multiplié les rencontres bilatérales, consolidant à la fois l’ambition bleue de Maurice et ses partenariats internationaux.
C’est au Palais des Rois Sardes, à l’occasion du sommet « L’Afrique pour l’Océan », co-présidé par le président français Emmanuel Macron et la princesse marocaine Lalla Hasnaa, que Navin Ramgoolam a exposé la stratégie de Maurice en matière d’économie océanique. « L’océan représente pour les petits États insulaires, en particulier pour l’île Maurice, un potentiel considérable en tant que moteur de développement et de sécurité alimentaire », a-t-il déclaré. Il a salué l’appui de la France lors de la catastrophe du Wakashio et a réitéré l’importance d’une coopération renforcée pour préserver la biodiversité marine.
Le chef du gouvernement a mis en avant son ambition de transformer l’immense zone économique exclusive de Maurice en source de croissance durable, en facilitant la recherche scientifique et l’exploitation raisonnée des ressources marines. Il a également remercié l’Agence Française de Développement (AFD) pour son soutien constant.
Des échanges diplomatiques d’envergure

En marge de la conférence, le Premier ministre s’est entretenu avec plusieurs dirigeants internationaux, renforçant les liens diplomatiques et explorant de nouvelles pistes de coopération.
Lors de sa rencontre avec le Premier ministre portugais, Luis Montenegro, les deux hommes ont échangé leurs félicitations respectives pour leur récente accession au pouvoir et ont évoqué des défis communs. Maurice a sollicité l’expertise portugaise en matière d’économie bleue, de tourisme et de sécurité maritime. Le Portugal s’est engagé à appuyer les projets bilatéraux prévus dans le cadre de l’accord Maurice-UE et a sollicité, en retour, le soutien mauricien pour sa candidature au Conseil de sécurité des Nations Unies pour 2027-2028.
Avec Steve Reed, ministre britannique de l’Environnement, de l’Alimentation et des Affaires rurales, la discussion a porté sur l’accord relatif aux Chagos, salué par Londres. Maurice a exprimé son intention d’y créer une zone marine protégée. Le Royaume-Uni s’est dit prêt à soutenir les projets de lutte contre l’érosion côtière et la pêche illégale, ainsi que les réformes de la force policière mauricienne. Le Strategic Partnership Framework a été présenté comme un levier important pour faire avancer ces priorités communes.
Enfin, Navin Ramgoolam a rencontré le chef de la délégation du Kirghizistan, désireux d’instaurer une coopération bilatérale avec Maurice, notamment dans les domaines des ressources naturelles. Le Kirghizistan a également sollicité le soutien mauricien pour obtenir un siège non permanent au Conseil de sécurité de l’ONU.
Maurice à l’avant-garde de la gouvernance océanique
En parallèle, le Junior Minister Fabrice David a participé à un forum international consacré à l’Accord BBNJ (Biodiversité au-delà de la juridiction nationale). Il a mis en lumière l’engagement pionnier de Maurice, parmi les cinq premiers pays à avoir ratifié cet accord. « Maurice croit fermement en une gouvernance des océans fondée sur le droit international », a-t-il déclaré, tout en appelant à une ratification universelle avant la 80e session de l’ONU.

Fabrice David a aussi annoncé la création d’un Institut Océanographique, soulignant l’importance de cet outil pour soutenir la mise en œuvre de l’accord et assurer une protection durable des océans, notamment autour des Chagos.
Cette journée à Nice s’est révélée stratégique pour Maurice, entre plaidoyer pour la cause océanique, reconnaissance diplomatique sur les Chagos, et renforcement de ses alliances dans un contexte géopolitique en mutation. La diplomatie bleue mauricienne est désormais au cœur de sa politique étrangère.
Programme culturel pour les conjoints

Parallèlement aux rencontres officielles, Veena Ramgoolam, l’épouse du Premier ministre, a participé au programme culturel organisé par Brigitte Macron pour les épouses des dirigeants présents, notamment aux côtés de la princesse Charlène de Monaco. Au programme : découverte du centre historique de Saint-Paul-de-Vence et déjeuner de gala.
Séance plénière
Navin Ramgoolam : « L’océan nous relie – il est temps d’agir ensemble »

Dans un discours solennel prononcé lors de la séance plénière de la deuxième journée de la conférence UNO3 à Nice, le Premier ministre, Navin Ramgoolam, a lancé un appel pressant à la communauté internationale pour une coopération renforcée en faveur de la préservation des ressources marines.
Il a mis en garde contre les risques que courent les petits États insulaires si les stratégies de développement et de sécurité alimentaire ne prennent pas en compte la conservation marine. « Lorsque les ressources océaniques constituent la seule ou principale richesse d’un pays, leur exploitation non durable compromet irrémédiablement son avenir », a-t-il déclaré.
Conscient des défis imposés par les effets du changement climatique, la pollution marine, en particulier plastique, et le réchauffement des océans, le chef du gouvernement a souligné que les engagements nationaux, aussi sincères soient-ils, ne suffisent pas à eux seuls. Il a pointé du doigt le manque de capacités des États en développement à assurer une surveillance maritime efficace, condition pourtant essentielle à toute politique de conservation.
Maurice, a-t-il poursuivi, s’est doté d’une stratégie ambitieuse pour faire de l’économie bleue un pilier central de son développement. Cette vision repose sur une approche intégrée des activités marines et côtières, avec une forte composante de conservation. Il a notamment cité l’accord signé récemment avec le Royaume-Uni, rétablissant la souveraineté mauricienne sur l’archipel de Stratus – où une aire marine protégée verra bientôt le jour.
Allant plus loin, Dr Ramgoolam a annoncé des réformes à venir pour inscrire les droits de la nature dans la Constitution mauricienne, soulignant la nécessité d’un cadre juridique et éthique global pour protéger les écosystèmes marins. Maurice entend également contribuer à la création de réseaux de connaissances sur les océans, notamment à travers une faculté dédiée aux études océaniques.
Enfin, le Premier ministre a réaffirmé le soutien de son pays aux instruments du droit international, notamment la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (UNCLOS), l’accord BBNJ, et le Pacte pour l’Avenir. Il a salué l’initiative du Conseil de l’Europe d’adopter un traité criminalisant les atteintes environnementales majeures, qu’il a qualifiées de « génocide écologique ».
Concluant son discours sur une note humaniste, il a cité le poète anglais John Donne : « Aucun homme n’est une île en lui-même », pour rappeler que le destin des peuples est indissociablement lié. « L’océan nous connecte tous – à la fois par les défis qu’il pose et les espoirs qu’il porte. Unissons-nous en une seule communauté océanique, engagée dans une action multilatérale audacieuse, pour préserver notre unique maison : la Terre. »