Confronté à des ‘headwinds’ : Kevin Teeroovengadum : « Going forward, la croissance ne dépassera pas les 4% »

Alors que les yeux sont rivés sur les ravages causés à notre pays par la Covid-19, notre économie continue, elle aussi, à en souffrir, sans que les autorités n’en fassent grand cas. La MCB a, dans la dernière édition du MCB Focus, revu ses prévisions pour la croissance à la baisse pour cette année. Celle-ci passe ainsi de 4, 8% en juin dernier à 4, 4% en novembre. Cela, alors que le ministre des Finances avaient prédit une croissance surréaliste de 9% en septembre. Cette prévision de la MCB qui ne surprend nullement Kevin Teeroovengadum. Dans un entretien qu’il nous avait accordé le 22 août dernier, l’économiste avait d’ailleurs déjà prédit que la croissance ne dépassera pas la barre de 4 % cette année. Les estimations de cette institution bancaire lui donnent donc raison.

Kevin Teerovengadum ne voit pas d’un bon œil le suroptimisme du ministère des Finances en ce qu’il s’agit de ses prévisions pour la croissance. Ce qui empêche au gouvernement de se concentrer sur les réels enjeux. « Ils n’analysent pas vraiment l’environnement global pour comprendre la realité avant de faire une prévision plus objective », regrette l’économiste, d’autant qu’il était prévisible dès juin-juillet que la croissance n’allait pas franchir 5%. D’où ses propres estimations de 4% faites en août. « Nous savons déjà depuis l’année dernière que plus rien ne serait pareil avec la Covid-19. C’est impossible de vacciner la population globale en une année. La preuve, c’est que ce ne sont que les pays développés qui sont parvenus à vacciner leur population jusqu’ici », explique-t-il. Ce qui n’est pas vraiment favorable aux affaires. D’autant que l’absence d’un pass sanitaire universel n’aide pas non plus aux voyages, comme cela avait été pré-Covid-19.

Headwinds’ et lent ‘recovery’

Autre facteur qui impacte notre croissance, la disruption causée en termes de logistiques et la flambée des prix au niveau international provoqués par la guerre froide entre la Chine et l’Amérique. Le pays, ne l’oublions pas, dépend énormément des importations. « Nous devons faire face à divers ‘headwinds’ », dit notre interlocuteur, en rappelant que le pays a connu, l’année dernière, une des pires contractions de son histoire, soit de l’ordre de 15%. « Le recovery prendra bien plus de temps que ne le pensent les autorités. On se verra éventuellement coincer avec une croissance de 3 à 4 % alors qu’elle aurait dû en être bien en-dessus pour rattraper ce qu’on a perdu en 2021 », souligne-t-il.

La qualité de croissance est également primordiale, poursuit l’économiste. Mais l’accent, insiste-t-il, n’y est pas mis alors qu’elle aurait dû être au centre des préoccupations des autorités. « On aurait dû se focaliser sur des investissements dans la santé, les technologies, l’online teaching et la digitalisation des commerces et des PMEs, entre autres. Mais cela reste une utopie à Maurice. Une croissance de qualité ne sera donc pas pour demain », se désole Kevin Teeroovengadum. La conséquence, prédit-il : Maurice se retrouvera piégée avec une croissance moyenne alors que d’autres pays à travers le monde réalisent déjà une croissance de 6 – 7% post-Covid.