Covid-19 : Nouveau lockdown pour inverser la courbe de transmission : Les avis divergent

Vu la hausse du nombre de cas de covid-19 dans le pays, on parle de plus en plus d’un ‘lockdown’ pour pouvoir avoir un contrôle sur la situation.  Mais un ‘lockdown’ est-il envisageable d’un point de vue économique ? De multiples interrogations subsistent en ce qui concerne les implications d’un ‘lockdown’.

Il est à noter que Maurice a déjà connu deux confinements durant ces deux dernières années, qui ont grandement impacté notre économie. Est-ce que notre secteur du tourisme, et par ricochet, toute l’économie, pourra faire les frais d’un troisième ‘lockdown’ ?

Selon le président de l’Association des hôteliers et restaurateurs de l’ile Maurice (AHRIM), Jean-Michel Pitot, un nouveau ‘lockdown’ sera un autre coup dur pour l’industrie touristique car « Encore une fois, le pays devra repartir de la case départ ». Selon lui, alors que nous avons déjà franchi l’étape de la réouverture des frontières, ce sera difficile pour le secteur du tourisme de revenir en arrière. Il souligne que notre économie dépend beaucoup sur ce secteur, et que c’est grâce à lui que  le pays a pu avancer dans le passé. « De ce fait, le pays ne peut se permettre un nouveau ‘lockdown’. Encore une fois, nous allons nous retrouver à genoux en ce qui concerne l’économie », dit-il.

Il explique qu’il est évident que si l’on impose un ‘lockdown’, on devra refermer les frontières et les touristes ne viendront plus dans le pays. Et si les touristes ne viennent plus, le gouvernement ne pourra pas engranger de revenus de ce secteur. De plus, le gouvernement devra nécessairement débourser de l’argent pour soutenir les familles car avec un nouveau ‘lockdown’, de nombreuses personnes vont forcément perdre leur travail et se retrouveront devant le mur pour se nourrir et nourrir leur famille. « C’est pour ces raisons que je maintiens qu’un ‘lockdown’ n’est pas envisageable pour l’heure », réaffirme-t-il.

Autre son de cloche de l’économiste Kugan Parapen. Ce dernier avance que notre économie ne sera pas tout à fait à genoux si le gouvernement impose un ‘lockdown’ de deux semaines pour pouvoir contenir le virus dans le pays. Mais si le ‘lockdown’ dure plusieurs mois, c’est à ce moment-là qu’on devra s’inquiéter pour notre économie. Il pense ainsi qu’on peut se permettre d’envisager un ‘lockdown’ car il estime que la situation sanitaire est très grave dans le pays. « Le gouvernement doit savoir ce qui est plus important : l’économie ou la vie des gens », dit-il. Pour lui, il est clair que la vie des gens est plus importante que tout car l’économie pourra respirer de nouveau, même s’ils passent par des phases difficiles.

Kugan Parapen souligne que la moitié de la population mauricienne consiste en des personnes vieillissantes mais que la plupart des décès que nous avons aujourd’hui, dus à la covid-19, concerne de plus en plus de jeunes, de la population active. De ce fait, il faudra prendre des décisions fermes afin d’éviter toute problématique liée à la population active, et par ricochet, à toute l’économie.

« Nous devons savoir ce qui est plus important pour le pays. C’est à partir de là qu’on pourra établir nos priorités et dire si on peut se permettre un ‘lockdown’ ou pas. Mais le gouvernement doit consulter les avis éclairés avant de prendre une quelconque décision », explique-t-il.

« Le gouvernement doit réagir au moment opportun, si la situation persiste. Mais je réitère qu’un ‘lockdown’ dans les jours à venir ne mettra pas irrémédiablement notre économie en danger ou même à genoux, du moment que ce ‘lockdown’ ne dure pas plusieurs mois », conclut-il.

Des élus du PTr réclament un lockdown

Il n’y a pas d’autres moyens, selon eux, pour casser la chaîne de transmission. Face à l’urgence de la situation, surtout au vu de l’aide recherchée par le gouvernement auprès de la France, des élus du Parti Travailliste réclament un lockdown. Patrick Assirvaden insiste que cette mesure est nécessaire pour que le pays puisse surmonter la crise sanitaire actuelle. Auparavant, Eshan Juman avait plaidé dans le même sens, arguant que les touristes reporteront de toutes les façon leurs voyages à Maurice face à la flambée de cas de contamination. Il cite l’exemple de l’ambassade saoudienne qui déconseille à ses compatriotes de venir chez nous ainsi que la décision de Madagascar de suspendre ses vols vers Maurice.

Pravind Jugnauth

« Lockdown pas ene badinaz »

Intervenant à l’issue d’une cérémonie officielle à Beau-Vallon hier, le Premier ministre s’est prononcé contre un lockdown. « Lockdown c’est pas ene badinaz sa », a-t-il répliqué. « Nou bizin fer bien attention. Nou ena ene l’économie. Combien dimoune pe gayn zot la vie dans bane secteurs économiques, secteur touristiques et tou bane secteurs. Touristes pe fer confiance au pays », a soutenu Pravind Jugnauth, en dénonçant dans la foulée « certains dimounes ki ti pe dire pou éna révolution dans pays quand mo ti met lockdown premier fois ». Il a également, et comme d’habitude, ciblé des journalistes « antipatriotes » qui publient des articles « anti-Maurice ».

Flambée de cas de Covid-19

La destination Maurice accuse le coup

  • L’ambassade saoudienne décourage les voyages à Maurice alors que Madagascar suspend ses vols et que deux grandes compagnies aériennes pourraient lui emboîter le pas

350 000. C’est le nombre de touristes que le gouvernement prévoit d’accueillir d’ici la fin de l’année. En dépit d’un certain pessimisme affiché par certains opérateurs et économistes concernant cet objectif jugé irréaliste dans le contexte actuel, les autorités ont estimé ce taux réalisable surtout avec l’affluence des touristes depuis l’ouverture de nos frontières. Mais voilà que la Covid-19 est venue jouer au trouble-fête. La flambée de cas de contamination dans le pays risque de tout chambouler.

La reprise économique tant attendue repose grandement sur le tourisme. Raison pour laquelle le gouvernement s’oppose énergiquement à toute idée d’un reconfinement. Mais le nombre élevé de cas positifs et de morts enregistrés ces derniers temps dans le pays n’arrange guère les choses. Cette semaine d’ailleurs, l’ambassade saoudienne a émis un communiqué pour demander à ses compatriotes saoudiens de reporter leur voyage à Maurice en raison d’une hausse inquiétante de contaminations à la Covid-19.

Dans un reportage consacré à la situation sanitaire à Maurice et diffusé sur une chaîne réunionnaise en fin de semaine, des Réunionnais ont fait part de leur intention de mettre « on hold » leur plan de séjour à Maurice pour les festivités de fin d’année, préférant attendre un assainissement de la situation au lieu de prendre des risques inutiles. Les autorités malgaches ont quant à elles déjà signifié leur intention de suspendre leurs vols commerciaux vers Maurice à partir du 27 novembre.

Il nous revient aussi que deux grandes compagnies aériennes surveillent l’évolution de la situation de près. Elles songeraient à suspendre leurs vols pour au moins deux semaines jusqu’à ce qu’une diminution du nombre de cas ne soit enregistrée. Certaines sources évoquent même la mise sur pied d’un « contingency plan » pour évacuer les touristes en cas d’une suspension temporaire de ces vols.