Covid-19 Quand l’ENT est synonyme d’abattoir : « Kumadir ine avoy nou pou nou mort ici ! »

  • Un appel lancé à Ivan Collendavelloo pour qu’il réveille le ministre de la Santé de sa torpeur

Tandis que le nombre de morts liés directement et indirectement à la Covid-19 grimpe, patients positifs et proches des victimes montent au créneau pour dénoncer l’absence ou le peu de traitement accordé aux patients positifs symptomatiques ou souffrant de comorbidités à l’hôpital ENT. Des patients y meurent quotidiennement. Sans que la plupart de ces morts ne soient communiquées officiellement, n’étant pas attribuées au virus. Officiellement, 57 personnes infectées de la Covid-19 sont mortes depuis le 5 mars dernier. Rien que jeudi et vendredi, cinq décès de patients positifs ont été enregistrés. Des chiffres qui ont été révélés par le ministre de la Santé, vendredi. Sauf que les patients admis à l’hôpital ENT émettent des doutes sur ces statistiques. « Tous les zours dimoune pe mort. Bien plis ki seki zot pe dire. Pe mette zotte dans boîte pe aller », dénoncent des personnes infectées qui y sont admises. Conséquence : la psychose gagne les patients qui craignent de plus en plus de ne pouvoir y sortir vivants.

« Pas gagne soins. Pas gagne traitement kuma bizin. Partout sale. Bane conditions déplorables », nous témoigne un patient. « Kumadir ine avoy nou pou nou mort ici ! », martèle-t-il. La proche d’une des victimes récemment emportées par la Covid-19 nous relate d’ailleurs le calvaire qu’a subi le défunt avant sa mort. « Depi 9h le matin mo boper ine commence malade dan lotel. C’est à 3h tanto, faudrer plusieurs fois mone téléphone lotel lerla ki docteur ine vine guet li. Docteur la dire moi ki bizin transfère d’urgence à ENT. 4h30 line rentre ENT. Prend 4h30 ziska 8h asoir, mo boper ine assizer lor réception kumsa mem. Kan nou pe koz are li, li dire nou li pe touffer. Pena docteur, faudrer docteur vini pou guet li. Kan mone téléphone lopital, zot pane dire moi si zot ine met li dans ene la salle normale ou soit ICU. Et quand zot ine transfère li dans la salle, zot dire moi zot pas pou kapave donne moi auken renseignement », nous confie Suhairah Khodaboccus. Ce n’est qu’aux petites heures le lendemain matin qu’elle apprendra que son beau-père est décédé.

La famille Khodaboccus (voir aussi en page 9) estime ainsi qu’il y a eu négligence médicale dans ce cas. Comment se fait-il que le patient, dont l’état était jugé suffisamment grave par un médecin pour être transféré d’urgence d’un centre de quarantaine à l’hôpital ENT, n’a-t-il pas obtenu de soins ou de traitements pendant plus de trois heures, soit entre 16h30 et 20h, alors qu’il avait visiblement des problèmes respiratoires ? Comment se fait-il qu’il n’y avait pas de médecin sur place alors que l’hôpital ENT est censé traiter des cas sévères de contamination ? À quelle heure un médecin a-t-il finalement ausculté le patient ? La victime serait-elle encore en vie si elle avait été prise en charge immédiatement après son admission à l’hôpital ENT ? Autant de questions qui font effectivement craindre que l’hôpital ENT a été réduit à un abattoir où les patients sont laissés à leur propre sort. C’est à peu près ce qui s’était passé dans le cas du décès de 11 personnes dialysées contaminées et qui avait, face à la colère populaire, débouché sur la mise sur pied d’une commission d’enquête.

Une patiente dialysée récemment admise à l’ENT déplore d’ailleurs le manque d’hygiène au sein de cet établissement. Le non-respect de certaines conditions liées à leur état de santé est aussi déploré. « Komsi zot pas kas latet avec nou. Zot pas réalisé ki nou pli vulnérables et ki nou bizin bane soins appropriés pou ki nou la santé pas détérioré », nous avoue cette mère de famille qui dit avoir vécu un véritable cauchemar. « Bondié grand ki mo enkor en vie », ajoute-t-elle.

Sourde oreille des autorités et appel à Collendavelloo

Le ministre de la Santé et le « National Committee on Covid-19 » sont-ils au courant de ces problèmes qui persistent à l’hôtel ENT ? Pas un mot n’a été évoqué dessus durant la conférence de presse de ce vendredi ou celle de la semaine d’avant alors que les dénonciations dans la presse s’accumulent. Certains proches des récentes victimes songent même à rencontrer l’ancien DPM Ivan Collendavelloo pour qu’il prenne position sur cette affaire. « Nou envi ki li casse somey gouvernement pareil kuma li ti fer pou bane patients dialysés », disent-ils, d’autant que la plupart n’ont pas les moyens financiers nécessaires pour entamer des poursuites légales contre les autorités, bien qu’ils auraient souhaité le faire.