De mauvais médicaments lui ont été prescrits pendant 19 ans !

Souffrant d’insuffisance rénale et en attente d’un rein

Monique, une mère de famille de 54 ans, doit aujourd’hui trouver un donneur de rein pour qu’elle puisse continuer de vivre. Une course contre la mort qui s’annonce loin d’être gagnée pour la quinquagénaire  car la liste de ceux qui attendent un rein est très longue ! En outre, en absence de tout amendement à la Human Tissue (Removal, Preservation and Transplant Act) de 2006, elle ne peut recourir à un donneur en dehors de sa famille. Pour couronner le tout, elle vient d’apprendre d’un consultant en néphrologie qu’après 19 ans de traitement à l’hôpital, les médicaments qu’elle prenait n’étaient pas les bons !

Marwan Dawood

Cela fait plusieurs années maintenant que Monique souffre d’insuffisance rénale et elle n’est pas au bout de ses peines. Elle doit trouver un donneur d’urgence mais elle a appris que la liste de patients qui attendent un rein est très longue. En outre, la Human Tissue (Removal, Preservation and Transplant Act)(2006) ne lui permet pas le don d’un organe qui ne provient pas d’un membre de sa famille. Comme Monique, ils sont plusieurs à attendre. Beaucoup ont déjà perdu la bataille contre leur maladie.  Comme cette dernière, il y a une jeune mère de trois enfants, âgée de 36 ans, qui lutte pour trouver un donneur de rein. Mais contrairement à Monique, la jeune mère peut se faire faire des séances de dialyse.

Monique garde une lueur d’espoir, ne voulant pas s’avouer vaincue. Elle blâme cependant le service de santé public de Maurice.  « Il y a trop de dysfonctionnements dans nos hôpitaux. Il n’y a pas suffisamment de spécialistes dans ce domaine », martèle Monique.

Il faut remonter à 2012 pour bien comprendre son calvaire. Elle reçoit un appel de l’hôpital Dr. Jeetoo l’informant qu’elle passera sur la table d’opération pour la préparer aux séances de dialyse. « Je devais subir une première opération aux reins pour ensuite commencer la dialyse 9 mois après », explique-t-elle. En arrivant à l’hôpital, Monique est informée qu’elle va être opérée  à 19 h. Malgré la peur qui la ronge, elle se souvient comment elle a tout bravé et voyait déjà la lumière au bout du tunnel, une lumière qui s’éteindra très vite. « Il était 18 h 30. On m’a emmenée dans la salle d’opération, mais une fois là-bas, on m’a renvoyée à la salle d’attente. Jusqu’à présent, on ne m’a pas opérée et je ne fais pas de dialyse », dit-elle.

Elle a essayé d’avoir une rencontre avec le directeur de l’hôpital Dr. Jeetoo pour exposer son problème. « C’est finalement l’adjointe du directeur que j’ai rencontrée. La dame été intraitable face à mes questions. Elle ne paraissait pas intéressée à savoir que j’étais dans une situation difficile », raconte-t-elle. Qui plus est, on ne lui fournit pas de raisons pour l’annulation de son opération.

Cet incident va faire empirer la situation de Monique. Les semaines, les mois et les années passent. Elle a dû arrêter de travailler car elle souffrait trop. Monique décide de prendre les choses en main vers la fin de l’année dernière.  En décembre, elle décide de recourir aux services d’un consultant privé en néphrologie, qui avait traité Monique à l’hôpital lors des dernières étapes de son traitement.

« Je décide alors de me tourner vers le privé mais le traitement coûte cher. En fin de l’année dernière, j’ai commencé à ressentir de nouveaux symptômes et je suis partie voir en privé le néphrologue qui a été présent à mon chevet durant les dernières phases de mon traitement à l’hôpital. »

« Il ose me dire que la dialyse ne servira à rien dans mon cas »

Là, monique tombe des nues quand elle apprend que les médicaments qu’elle prenait  à l’hôpital depuis… 19 ans n’étaient pas les bons. « J’ai ingurgité des médicaments tout le long de mon traitement. Pas un ou deux comprimés, mais plusieurs. En fin de compte, le néphrologue me dit que tous les médicaments qu’on me prescrivait à l’hôpital ne sont pas les bons et d’arrêter de les prendre. Pendant 19 ans, j’ai pris les mauvais médicaments ! », dit-elle, révoltée. « C’est révoltant ! Je ne comprends pas comment se fait-il qu’à l’hôpital, il n’a rien vu et quand je lui paie de grosses sommes d’argent en privé, tout change immédiatement. Or, c’est sous ses directives, vers la fin de mon traitement à l’hôpital, que j’ai été traitée. »

Le consultant tient maintenant un tout autre langage envers Monique. « Il ose me dire que la dialyse ne servira à rien et qu’il faut absolument que je trouve un donneur de rein. Aujourd’hui, je suis obligée de subir un traitement alternatif à la dialyse en 10 séances à la clinique, qui me coûte Rs 2 500 par séance. J’attends les résultats de ce traitement pour décider de la marche à suivre », explique-t-elle

Selon nos renseignements, l’unique médecin qui pouvait effectuer une transplantation de reins à Maurice n’est plus en service et son remplaçant pas encore trouvé. La longue liste de patients en attente continue à s’allonger  alors  que l’oiseau rare ne soit trouvé.

Amendement à la loi relative au don d’organes : un espoir aux patients en attente

Selon les estimations du ministère de la Santé, le budget pour les « Renal Dialysis»  à Maurice dépasse les centaines de millions de roupies par an. Le nombre de Mauriciens effectuant la dialyse dans les centres de santé publics est estimé à 1 260 en 2018, alors qu’en 2000, le nombre était de 493. Les prévisions du ministère est de 1 500 patients d’ici 2020.

Une nouvelle qui pourrait redonner un peu d’espoir aux patients. La Human Tissue (Removal, Preservation and Transplant Act) (2006) sera amendée pour permettre le don d’organes entres des personnes qui ne sont pas de la même famille. Une partie de l’amendement a trait au prélèvement d’organes sur des personnes décédées, avec le consentement de la famille du défunt, afin d’effectuer la transplantation.

Au niveau du ministère de la Santé, on avance que la loi est en voie d’être finalisée à la State Law Office (SLO). « Nous voulons tout faire pour la protection de la population. Il faut que les lacunes soient revues pour ne pas donner naissance à un nouveau problème de trafic d’organes, entre autres », explique une source au ministère.