[Décès de patients dialysés en 2021] Une enquête judiciaire enfin ouverte

Le tribunal de Curepipe a officiellement ouvert le 29 avril 2025 une enquête judiciaire sur le décès de onze patients dialysés pendant la pandémie de Covid-19 en 2021. Supervisée par la magistrate Shavina Jugnauth, cette procédure initiée par le Directeur des Poursuites Publiques (DPP), Me Rashid Ahmine, cherche à établir les circonstances de ces décès survenus entre mars et avril 2021.

Les premières auditions, fixées au 23 mai 2025, concerneront seize témoins, principalement des proches des victimes. Le Senior Assistant DPP, Me Jean Michel Ah Sen, a précisé que d’autres témoins pourraient être convoqués ultérieurement.

Une gestion de crise défaillante

Les patients décédés avaient été transférés vers différents établissements durant la crise sanitaire : l’ENT Hospital, le New Souillac Hospital, le Jawaharlal Nehru Hospital et le Tamassa Hotel, temporairement converti en centre de quarantaine.

Un rapport du Fact-Finding Committee, publié en décembre 2024, révèle de graves manquements dans la prise en charge :

  • Transports inadaptés mêlant patients positifs et négatifs à la Covid-19
  • Réduction drastique du temps de dialyse
  • Absence de surveillance médicale adéquate
  • Conditions d’hygiène insuffisantes
  • Alimentation inappropriée

Les témoignages des proches des victimes décrivent des transferts précipités, sans information préalable ni accompagnement. Certains patients auraient voyagé pendant des heures sans s’alimenter avant d’être installés dans leurs chambres.

Un système hospitalier dépassé

Le New Souillac Hospital, utilisé comme centre d’isolement, n’était manifestement pas équipé pour gérer simultanément patients Covid et dialysés. L’accès aux médicaments était problématique et le personnel, récemment affecté, manquait de formation spécifique aux soins des patients dialysés.

Deux patients ont été retrouvés morts dans leur chambre sans surveillance préalable. Sur les 89 patients dialysés, 40 ont été testés positifs à la Covid-19, suggérant une contamination favorisée par les conditions de transport et d’hébergement.

Responsabilités politiques en jeu

Le rapport pointe des négligences graves dans la gestion de la crise, évoquant même une possible négligence criminelle. L’ancien gouvernement de Pravind Jugnauth et son ministre de la Santé, Kailesh Jagutpal, sont mis en cause pour avoir ignoré les alertes et retardé la publication des rapports.

L’enquête judiciaire devra déterminer précisément les responsabilités avant que le DPP ne décide des suites à donner à cette affaire, que le gouvernement actuel promet de ne pas laisser impunie.