Accumulations d’eau

Accumulation d’eau, routes impraticables, maisons et cours inondées, drains bouchés, rivières débordées… Ces images étaient visibles dans plusieurs régions du pays depuis le début de l’année. Si pour le moment, les autorités arrivent à garder la tête hors de l’eau, la situation risque d’être plus grave si les pluies persistent. Qui sont les coupables de cette situation chaotique ? Pourquoi Maurice est-elle victime de ces situations à chaque tombée de pluie ? N’est-il pas temps d’investir encore plus dans la construction et l’aménagement des drains ? Un fait retient cependant l’attention, les régions Nord, Est et Sud sont les plus touchées.

Marwan Dawood

L’île Maurice figure parmi une liste des pays pour le moins « honorifique ». Selon le World Risk Report de 2016, le pays arrive à la 13e place des pays les plus à risque et 7e des 15 pays les plus exposés aux catastrophes naturelles dans le monde. Les faits ces derniers jours donnent raison à ce rapport. Il ne suffit que de quelques minutes de pluie pour que l’eau monte et que plusieurs régions du pays sont paralysées.  Qui montrer du doigt ? Les autorités dépensent des millions dans les travaux de tout-à-l’égout pour éviter des situations de crise. Mais ces derniers jours, un coupable est souvent mentionné dont l’incivilité de la population avec une urbanisation mal planifiée, les constructions sauvages et la pollution des cours d’eau et ruisseaux. Un autre souci gagne aussi du terrain, l’imperméabilisation importante des sols.

Drains : Plus de Rs 7 milliards d’investissements

À la suite des grosses et catastrophiques inondations meurtrières du 30 mars 2013, le ministère des Infrastructures publiques avait établi une liste de 55 zones dites à risque et un budget de quelque Rs 600 millions avait alors été alloué à la construction des nouveaux drains dans plusieurs régions de Maurice.  Quelques temps après le jour fatidique, l’ex-juge Bhushan Domah avait dans un rapport recommandé l’aménagement d’un réseau de drains à l’échelle nationale pour canaliser l’eau qui proviennent des bassins et des ruisseaux vers la mer.

Depuis 2013, l’investissement dans la construction des drains à Maurice est conséquent soit un chiffre de Rs 7 milliards.  L’État sait donc que c’est une chose importante et nous apprenons qu’en 2018, plus de Rs 720 millions seront investies dans les travaux de construction de drains à travers le pays.

Sur le terrain le constat est visible. Dans plusieurs régions de l’île, les travaux de construction se font. À Port-Louis, Canal-Dayot, Amaury, Gokoola, Fond du Sac, Rose-Hill, Beau-Bassin pour n’en citer que quelques exemples.

 Quid de la Land Drainage Authority (LDA) Act ?

Votée l’année dernière soit le 11 avril 2017 au Parlement, la Land Drainage Authority (LDA) Act vise essentiellement l’élaboration  et la conception d’un plan directeur pour permettre la mise en place d’un réseau de drains à Maurice.  La Land Drainage Authority prevoit egalement un inventaire et une cartographie de tous les drains naturels et fabriqués et travaille de concert avec la Road Development Unit, la National Develpment Unit et le National Disaster Risk Reduction and Management Centre.  Cette instance a pour objectif l’identification des zones dites à risque d’inondations, coordonnant ainsi la construction et l’entretien des nouveaux drains. \

Le rôle du National Disaster Risk Reduction and Management Centre

Situé à Port-Louis le National Disaster Risk Reduction and Management Centre (NDRRMC) est composé de la Police, du service météorologique et du Mauritius Fire and Rescue Service. Cette institution est chargée de prendre les décisions en cas de catastrophe.  Les membres du NDRRMC planifient, organisent, coordonnent et supervisent les actions de disaster risk reduction and management à tous les niveaux.

De ce fait afin de pouvoir affronter les cas de dangers potentiels, le NDRRMC a un plan d’action bien établi dont le nettoyage et l’entretien des drains par les autorités. Ils font également des campagnes de sensibilisation dans les écoles et les médias contre l’accumulation d’ordures dans les cours d’eau,  la surveillance des drains en permanence veillant à ce qu’ils ne soient pas bouchés ou obstrués par un tierce objet, assurer un service de voirie efficace et la mise sur pied des places d’évacuation d’urgence dans les aires de stationnement souterraines.

Quels sont les protocoles à respecter en cas de catastrophe ?

Il est indéniable que le changement climatique créé des situations sans précédent en ce qui concerne les phénomènes climatiques dont les cyclones, flash floods, tsunamis ou encore les glissements de terrain.  Pour mieux éviter les drames humains en cas de catastrophe naturelle, le gouvernement a établi le National Disaster Scheme 2015. Il faut donc se sécuriser en priorité et attendre les secours. À noter que Maurice est doté de 164 abris au total pour accueillir les sinistrés en cas de catastrophes naturelles.

Une analyse poussée de la situation à Maurice

Vassen Kauppaymuthu, expert climatique, nous explique que l’état du sol à Maurice a changé. Ce dernier se dit persuadé que les constructions sauvages y sont pour beaucoup dans les accumulations d’eau et des maisons inondées. «Il faut revoir la façon dont les maisons et bâtiments sont construites.  Avec l’immense quantité de béton qu’il y a partout dans l’ile cela résulte en une réduction des surfaces perméables qui servent à absorber l’eau de pluie et évite ainsi les inondations», explique-t-il.

Ce dernier rappelle aussi l’importance de se soucier du changement climatique qui rend les phénomènes atmosphériques encore plus imprévisibles et dangereux. Vassen Kauppaymuthu parle alors de la nécessité de faire une étude sur les types de pluie qui intéressent Maurice pour permettre aux autorités de mieux se préparer dans la construction des drains.

Les grands perdants : les légumes

Partout dans l’île, les étals des marchés sont vides. Les légumes sont les grandes victimes des grosses pluies de ces derniers jours. Des arpents de plantation ravagés par les eaux dans l’Est et le Nord. Pommes d’amour, carottes, fines herbes, laitues, chou, chou-fleur… tant de légumes qui n’ont pas résisté aux intempéries. Une scène cauchemardesque des champs de cannes qui sont inondés dans le Nord démontre la force de l’eau.

Umrith Dhanraj est planteur depuis maintenant plus de 25 ans. Retraité, il vit avec sa femme et ses enfants à Fond-du-Sac, village se trouvant dans le Nord. Umrith cultive plusieurs légumes dans son champ dont les lalos, les piments, les brèdes mais aussi des tomates. « Chaque semaine nous faire ene récolte. Dépi la pli ine tombé récolte ine affecté. Légumes ki lor la terre couma carotte tousala ine gaté. Mem lalo ine diminué. Mauvais temps ine fini gat partout », dit-il.  Ce dernier dit prévoir une pénurie de légumes pour les mois à venir si le mauvais temps persiste. Du côté du ministère de l’Agro-industrie, on ne se veut pas alarmant mais on concède quand même que l’importation des légumes sera inévitable.

Absence de drains dangereuse à Port-Louis

Qui ne se souvient pas des inondations du 30 mars 2013 ? À chaque tombée de pluie le niveau d’eau monte dans les rues de Port-Louis mais la situation reste sous contrôle mais pour combien de temps encore, se demandent plusieurs personnes. Jeudi après-midi la situation aurait pu être catastrophique. Une rivière boueuse s’écoulait sur l’autoroute en direction de la capitale.

Mais dans le centre-ville à la rue Jemmapes à proximité des Casernes centrales, et en quelques minutes de pluies seulement, la route est presqu’impraticable. La raison ? Une absence dangereuse de drains sur cette route très fréquentée par les automobilistes. Sur les photos nous voyons le niveau d’eau. Pire, cette route mal entretenue est remplie de nid de poule et avec l’eau qui les couvre cela représente un danger potentiel pour les motocyclistes. Plusieurs usagers de cette route tirent alors la sonnette d’alarme et demandent aux autorités d’y remédier.

De la pluie et un cyclone cette semaine

La station météo de Vacoas ne prévoit pas de grand changement dans le temps qu’il fera cette semaine. En effet, selon les prévisions de la station de Vacoas, la pluie sera une nouvelle fois au rendez-vous. Il y aura également des risques d’orages partout dans l’île en fin de semaine. Pour ne rien arranger, une basse pression évolue actuellement au Nord-Est de Rodrigues et pourrait influencer le temps dans les prochains jours.