[EDITO] Farce

« Bane camarades de la presse, zot ena ène rôle mo considéré important dans nou pays. Zot pas ene n’importe zot. Nou appel zot ene pouvoir, non. Be quand zot ene pouvoir, nou attane ki zot zouer zot rôle, ki zot assume zot responsabilités », dixit Pravind Jugnauth, jeudi. On ne sait pas s’il faut en rire ou en pleurer. En rire, jaune il va de soi, parce qu’il reconnait, quand ça lui plait, l’importance de cette même presse qu’il qualifie parfois d’« antipatriotique ». En pleurer parce que lui, Pravind Jugnauth, qui n’a lui-même aucun contrôle sur son gouvernement et qui utilise le pouvoir à sa guise, pour satisfaire ses propres intérêts et celui de sa Lakwizinn, se permet de faire la leçon à la presse sur la façon dont elle doit assumer ses responsabilités. C’est fou, n’est-ce pas ?

Ce qui est encore plus comique, pour ne pas dire ridicule, c’est qu’il s’attende à des couvertures élogieuses de la presse sur le voyage scientifique à Chagos alors que celle-ci a été boycottée par son gouvernement au profit de la presse étrangère (ndlr : contre qui nous n’avons rien). « Noune donne zot ene priorité, c’est vrai », a d’ailleurs concédé le Premier ministre. Pourquoi n’avait-il pas pensé au rôle de notre presse « ki pas ene n’importe » et « ki nou appel zot ene pouvoir » au moment où il avait choisi de « donne zot ene priorité » ? Pour quelles raisons les médias internationaux ont-ils eu préséance sur les nôtres alors qu’il s’agit d’une revendication territoriale où la présence de nos journalistes aurait permis de donner une dimension nationale et symbolique à ce combat ? Quel toupet que de venir maintenant se plaindre du traitement accordé à ce sujet !

Par contre, on ne peut pas rester insensible à la déclaration de la ministre de l’Éducation le même jour. Leela Devi Dookun-Luchoomun, elle-même une enseignante de carrière, a de nouveau prouvé qu’elle ne mérite pas sa place à l’Éducation. Elle continue, comme à son habitude, de faire la sourde oreille face aux parents et enseignants qui crient, eux, comme des sourds pour lui faire entendre raison. Peine perdue. Pendant deux ans, soit depuis le début de la pandémie de Covid-19, elle n’est pas parvenue à mettre en place un système d’enseignement en ligne fiable et efficace contrairement aux institutions scolaires privées qui, elles, avec nettement moins de moyens et de ressources, peuvent alterner sans difficulté entre les cours en ligne et les classes en présentiel. De par son incompétence, les élèves ont perdu presque deux longues années de leur scolarité tandis qu’avec une bonne planification, nos enfants auraient pu apprendre, à chaque nouvelle flambée de cas, dans le confort de leurs maisons, grandement à l’abri du virus. L’incompétence de nos dirigeants et de nos autorités joue dangereusement avec la vie et l’avenir de nos enfants !

Le comble, c’est que Leela Devi Dookun-Luchoomun se fie aux calculs burlesques des autorités gouvernementales, l’on ne saura pas s’il s’agit de la Santé ou de l’Éducation puisque les deux ministères se renvoient chacun la balle, pour expliquer sa décision de maintenir les classes en présentiel. Or, on sait tous que le taux des élèves testés positifs parmi ceux qui ont pu se faire dépister dépasse largement les 4%, comme l’affirme la ministre. Des chiffres fiables, on en n’aura toutefois pas puisque la plupart des cas contacts dans les établissements scolaires n’ont tout bonnement pas été dépistés puisque le « testing team » n’avait même pas encore été mis sur pied à la reprise des classes. Ce « testing team », qui n’a plus sa raison d’être après l’entrée en vigueur du nouveau protocole sanitaire hier, s’est révélé être une autre farce. Comme l’avait été la DMU. Comme l’avait aussi été les cours sur les chaînes de la MBC. Comme l’est aussi ce gouvernement qui n’arrive plus à gérer les affaires du pays.