Fréquente agression des policiers
Ces derniers temps, de nombreux cas d’agression envers des policiers ont été constatés. Cette situation soulève la question de la confiance que la population accorde à la force policière, et des raisons qui pourraient expliquer ces agressions. Au cours de la semaine écoulée, on note qu’il y en a eu quatre, envers des agents des forces. Le 20 juillet dernier, un constable de la police a été agressé par un individu à Grand Baie, puis a été emmené à l’hôpital pour recevoir des soins. Un autre policier a été attaqué par un humoriste très connu dans la capitale, il y a quelques jours. Enfin, un policier aurait été malmené par le beau-frère d’un ministre.
Pour mieux comprendre ce phénomène, nous avons sollicité l’avis de l’observateur politique Feizal Jeerooburkhan. Notre interlocuteur confirme que la violence envers les policiers a pris de l’ampleur ces dernières années. « Le Premier ministre a récemment déclaré qu’entre 2015 et aujourd’hui, cinq policiers en service ont perdu la vie, et que 69 autres ont été gravement blessés. La police joue un rôle fondamental dans la sécurité de la population et des institutions, le maintien de l’ordre, les enquêtes, et plus encore. Pour remplir efficacement cette mission, elle doit impérativement bénéficier de la confiance et de l’estime des citoyens. La grande majorité des policiers assument bien cette responsabilité. Cependant, des éléments indélicats au sein de la force policière ternissent de plus en plus son image. Il est inconcevable de constater que certains policiers ne respectent pas les lois du pays ou sont impliqués dans des affaires de drogue, de corruption, de protection illégale, de brutalité, d’extorsion, etc. Cette perte de confiance généralisée débouche malheureusement sur des agressions envers certains policiers », déclare-t-il.
Manque de confiance en la force policière
Selon Feizal Jeerooburkhan, la force policière a perdu son aura d’antan, et le respect du public en général. « L’incompétence et le comportement inacceptable de certains policiers ont considérablement détérioré l’image de l’institution. Les policiers agressés sont souvent ceux qui abusent de leur pouvoir, qui font preuve d’un comportement agressif injustifié, d’un langage dégradant et irrespectueux, et qui ne respectent pas les droits des individus. Des vidéos circulant sur les réseaux sociaux ont mis en évidence l’usage excessif de la force, des arrestations musclées, des actes de torture, des manipulations de preuves (‘planting’), des abus de pouvoir pour cibler des adversaires politiques, ainsi que des décès suspects en détention policière. Ces actes répréhensibles ont alimenté un sentiment de « haine anti-policiers », qui se traduit par des agressions envers les membres des forces de l’ordre », explique-t-il.
Selon l’observateur politique, il existe actuellement un sentiment de découragement et de frustration parmi les citoyens vis-à-vis de la force policière. D’après lui, le nombre croissant de policiers impliqués dans des actes illégaux, l’insécurité dans les lieux publics et au sein des foyers, la recrudescence des accidents de la route, la propagation de la drogue, en particulier chez les jeunes, les arrestations arbitraires, ainsi que la guerre ouverte contre le DPP, contribuent à ternir l’image de la force policière. La confiance et le respect des citoyens envers la police dépendent de sa capacité à combattre efficacement ces nombreux fléaux.
L’urgence d’une réforme globale
« La situation actuelle découle principalement d’un déficit en matière de gouvernance, de compétences (formation), d’indépendance, d’impartialité, de recevabilité, de rigueur et d’efficacité au sein de la force policière. Aucun gouvernement n’a pris la décision de mettre en œuvre des réformes appropriées pour améliorer ses performances et répondre aux besoins de la population », observe-t-il.
Feizal Jeerooburkhan estime que le problème se situe au niveau de la gestion globale de la force policière, notamment dans le recrutement, la formation, les mécanismes de promotion, la discipline, les sanctions rapides et sévères en cas de mauvaise conduite, ainsi que l’évaluation et la remise en question régulières. « Une réforme de la force policière serait indéniablement bénéfique pour résoudre plusieurs problèmes économiques, sociaux et environnementaux dans les meilleurs délais », conclut-il.