Fermeture des frontières : L’’inquiétude s’installe

 

Le 24 juillet dernier, le Conseil des ministres devait prendre une décision sur l’ouverture des frontières. Hélas, rien n’a été dit pour l’heure à ce sujet. Ce silence sur l’ouverture des frontières suscite une certaine inquiétude chez les opérateurs économiques, les opérateurs touristiques, les petites et moyennes entreprises (PME) et tous ceux qui sont concernés par l’ouverture des frontières. Nous avons dans cet article abordé le sujet avec quelques acteurs de ces secteurs, qui sont tous d’accord pour une éventuelle réouverture de nos frontières, mais en prenant toutes les précautions pour éviter la ‘deuxième vague’ tant redoutée du coronavirus.

Malenn Oodiah

« On va vers l’asphyxie si on n’ouvre pas les frontières »

Malenn Oodiah, ex-chargé de communication à l’hôtel Beachcomber fait ressortir sur sa page Facebook : « Il est temps d’ouvrir nos frontières sinon le pays ira vers l’asphyxie et des milliers de Mauriciens vont mourir en ‘bonne santé’ ». Selon lui, il faut d’abord prendre l’avis des autorités médicales, et faire un état des lieux de la pandémie à travers le monde. Il souligne que beaucoup de pays s’interrogent sur l’ouverture de leurs frontières, et les stratégies et les modalités à adopter.

Pour Malenn Oodiah, Maurice doit se baser sur un pays qui a été frappé de façon similaire et voir comment procéder pour l’ouverture des frontières. Selon lui, cette ouverture est vitale car notre économie est ouverte au monde et environ 125 000 personnes sont attachées au secteur touristique, de façon directe ou indirecte. « S’il n’ouvre pas ses frontières il va vers l’asphyxie.  L’État ne pourra éternellement servir de béquilles à une partie des entreprises du secteur à travers le Wage Assistance Scheme et le Self Employed Assistance Scheme », fait-il comprendre sur sa page Facebook.

Il explique qu’il faut mettre en place un consensus sur l’ouverture des frontières, accompagné d’un plan de gestion afin d’éviter tous risques. Cela serait possible, selon Malenn Oodiah, quand tous les acteurs des divers secteurs viennent de l’avant pour s’assurer du bon déroulement de l’ouverture des frontières. « La gestion de la crise sanitaire a connu plusieurs étapes – de la légèreté du début et l’hésitation à la fermeture des frontières suivies d’un lockdown brutal, d’un amateurisme effrayant dans la communication de crise et sans compter l’opacité entourant des décisions importantes. Les autorités auraient une peur bleue que l’ouverture des frontières ne provoque une deuxième vague », estime l’ancien responsable de communication de Beachcomber.

Il poursuit que l’ouverture est nécessaire mais ne sera pas suffisante. De leur côté, la Mauritius Tourism Promotion Authority (MTPA) et les hôtels ont un énorme défi à relever pour élaborer une formule de promotion innovante et créative.

« L’ouverture ou pas des frontières ne relève pas de la politique partisane avec la posture « Seul contre tous » choisie par le gouvernement jusqu’ici dans la gestion de la crise sanitaire. Moyennant que les autorités adoptent une approche appropriée, nous sommes certains que compte tenu de ce qui est en jeu tous les acteurs du développement – partis politiques, syndicats, associations et société civile – sauront faire preuve de responsabilité dans la conjoncture. Les autorités doivent déjà disposer de toutes les données nécessaires pour ne pas tergiverser sur la date et les modalités précises de l’ouverture des frontières. Une décision doit être prise pour effacer le flou actuel. Il y a urgence », conclut Malenn Oodiah sur sa page Facebook le vendredi 31 juillet.

Amar Deerpalsingh, président de la Fédération des PME

« Il est impératif que le gouvernement prenne une décision et tienne la population au courant »

Pour Amar Deerpalsingh, le président de la Fédération des PME, notre économie souffre alors que nos frontières sont fermées. « On a un gros problème pour l’acheminement des matières premières et aussi pour l’exportation des produits finis », dit-il. Il indique qu’on a aussi un problème sur la non-arrivée des touristes, secteur qui, selon lui, représente 25 % du PIB.

Il avance qu’il y a un effet multiplicateur : c’est-à-dire, avec la crise financière, les gens consomment moins. « Il y a aussi un effet psychologique. Il y a un reflexe parmi les Mauriciens pour ne pas dépenser sur des choses non essentielles. Quand il n’y a pas de consommation, l’économie souffre quelque part », indique Deerpalsingh. Selon lui, cet effet négatif se répercute sur toute l’économie.

Le Premier ministre, ajoute-t-il, doit au moins venir parler sur la durée de la fermeture de nos frontières pour que les prestataires de service puissent au moins gérer leur ‘business’, selon un ‘forecast’ sur la durée. « On a des employés, et on doit impérativement savoir pour combien de temps on doit les retenir », explique-t-il.

Il estime que c’est très important que le gouvernement prenne une décision et mette la population au courant, sur une date d’ouverture des frontières. « Qu’on ouvre nos frontières dans une façon contrôlée, avec des protocoles strictes, entre autres, comme certains pays l’ont fait », dit-il. « Tout dépend maintenant de la politique du gouvernement. »

Asraf Ali Ramdin, General Taxi Owners Union

« Les chauffeurs de taxi d’hôtels dans l’angoisse »

Les chauffeurs de taxis d’hôtels rongent toujours leur frein et ils comptent beaucoup sur la réouverture des frontières pour qu’ils puissent reprendre leur travail normalement. Ces taximen sont en effet sans emploi, en raison des restrictions sur les voyages liées à la pandémie du covid-19. Il faut dire que leur situation était déjà déplorable avant le déferlement du coronavirus à Maurice, avec la concurrence déloyale des ‘taxis marrons’.

Le secrétaire du General Taxi Owners Union, Asraf Ali Ramdin, fait ressortir que la non-réouverture des frontières présente des vives inquiétudes chez les chauffeurs de taxi opérant devant les hôtels.

Il est pour la réouverture des frontières le plus vite possible et il lance un appel au gouvernement d’éviter de pratiquer une politique « de deux poids deux mesures » en ce qui concerne les chauffeurs des taxis d’hôtels.

Il explique qu’une partie de ces chauffeurs n’ont pas encore touché le ‘Government Wage Assistance Scheme’ (GWAS) pour le mois de juillet auprès de la Mauritius Revenue Authority (MRA). « Avec l’aide financière de Rs 5 100, c’est très difficile pour eux de payer les ‘Monthly Bill Fees’ », souligne Asraf Ali Ramdin

Le secrétaire du General Taxi Owners Union affirme que les chauffeurs ont du mal à payer les factures d’électricité, d’eau et de téléphone. Il insiste que ces dépenses soient réduites pour eux par le gouvernement. Il fait aussi une demande au gouvernement de mettre un moratoire sur les prêts pour ces taximen.

En ce qui concerne les ‘contract cars’, il demande au ministre du Transport, Alan Ganoo, de ne pas appliquer cette loi pour les chauffeurs des taxis, car « leurs poches sont déjà vides » dans cette période de crise.

Hors-texte

Des touristes arabes à Maurice ?

Asraf Ali Ramdin nous affirme qu’il a constaté la présence de touristes arabes dans le pays, dans des hôtels spécifiques. Comment ont-ils pu atterrir à Maurice et par où ont-ils transité ?, se demande-t-il.

Pour lui, il est clair que « Les hôtels continuent de s’enrichir, tandis que les chauffeurs de taxis des hôtels ont été délaissés dans le secteur touristique ».