Giovanni Merle risque de ne pas être confirmé à son poste

Après avoir dénoncé l’ambassadeur Phokeer

  • Contrairement aux règlements, son contrat serait renouvelé sur une base temporaire et ses attributions diminuées

La riposte ne s’est pas fait attendre. Depuis qu’il a élevé la voix contre l’ambassadeur Sooroojdeo Phokeer, qui voulait qu’il coupe ses dreadlocks, Giovanni Merle, un employé de l’ambassade mauricienne aux États-Unis, se dit victime de discrimination et d’humiliation. Pire, il court le risque de ne pas être confirmé à son poste. Ce qui serait contraire aux règlements. S’agit-il d’une vendetta ? C’est la question qu’il se pose…

Zahirah RADHA

L’ambassadeur Sooroojdeo Phokeer voulait qu’il coupe ses dreadlocks. Mais Giovanni Merle, un employé de l’ambassade mauricienne à Washington, ne l’entendait pas de cette oreille. Se sentant humilié, le jeune homme n’a pas hésité une seconde avant de dénoncer son harceleur. Mais cette dénonciation n’aura été que le début de ses malheurs. Du moins, c’est ce qu’il croit. Alors qu’il devrait bientôt être confirmé à son poste comme réceptionniste, messenger et chauffeur, le responsable de l’ambassade lui aurait déjà fait savoir que son contrat allait être renouvelé sur une base temporaire et que ses attributions seront revues. Une révision qui n’augure rien de bon. “On m’a déjà interdit de recevoir les appels téléphoniques et les courriers postaux et électroniques. Je suis contraint de rester assis à ne rien faire alors que je suis aussi payé pour m’occuper du front desk“, dénonce Giovanni Merle. À ses yeux, cette interdiction serait synonyme de persécution. “C’est clair qu’ils tentent de m’évincer. En ce faisant, ils ne réalisent pas qu’ils ne me pénalisent pas seulement, mais qu’ils sont aussi en train de gaspiller les ressources de l’ambassade. Leur gestion laisse visiblement à désirer“, déplore-t-il.

Évincé injustement

Giovanni Merle trouve aussi injuste qu’il ait été sciemment évincé comme caterer pour la réception organisée par l’ambassade pour les cinquante ans de l’indépendance de Maurice. En tant que chef reconnu et ayant participé à diverses compétitions de haute facture, le trentenaire avait proposé ses services à l’ambassade pour le catering de l’événement. “Ils n’ont pas retenu mes services mais ils ont quand même volé toutes les idées que j’avais proposées. Qui plus est, le caterer qu’ils ont embauché n’a pas été à la hauteur. En voulant me couper l’herbe sous le pied, ils ont été pris à leur propre piège puisqu’ils n’ont pas eu ‘value for money‘”, ironise-t-il tout en avouant ne pas comprendre pourquoi l’ambassade a préféré opter pour les services d’un étranger alors qu’en sus d’être un employé de l’ambassade, il a déjà fait ses preuves dans le milieu culinaire. “Est-ce un camouflet, une tentative de démontrer que je ne suis pas productif ou suis-je victime de mon appartenance ethnique?” s’interroge ce Mauricien qui vit aux Etats-Unis depuis maintenant cinq ans.

Le jeune homme accuse aussi l’ambassade de ne pas vouloir le laisser participer au “Embassy Chef Challenge 2018” qui se tiendra le 7 mai prochain. Une tentative qu’il a pu cependant déjouer. “J’ai représenté Maurice à cette compétition à mes propres frais durant les deux dernières années. Cette année, certaines personnes à l’ambassade ont tenté de bloquer ma participation en ne me remettant pas la fiche de participation qu’on m’a envoyée. Heureusement qu’un des organisateurs de l’événement m’en a informé personnellement afin que je puisse me porter candidat“, souligne Giovanni Merle en insistant qu’il fera de son mieux pour que Maurice puisse être fier de lui lors de cette compétition. Il se demande, dans la même foulée, pourquoi l’ambassade mauricienne ne prend pas en charge les frais de participation à cette compétition alors que les autres ambassades se font, elles, un devoir pour que leurs pays soient représentés à cet événement tout en encourant les frais y relatifs. “Tous les pays africains y participent et ils prévoient tous un budget pour cette compétition. Malheureusement, Maurice ne semble nullement s’y intéresser. Au lieu de me soutenir, on veut me pénaliser“, s’indigne Giovanni Merle.

Mauvaise gestion

Notre compatriote s’élève, par ailleurs, contre la mauvaise gestion de l’ambassade. Le travail, précise-t-il, s’y fait au petit bonheur. “L’ambassade est censée être la vitrine de Maurice mais elle est gérée de façon amateur“, dit-il en citant l’exemple de cet officier qui ne peut se servir d’un Gmail. Ou encore “l’invitation sélective” envoyée aux représentants des ambassades africaines pour assister à la réception organisée à l’occasion du jubilé d’or de l”indépendance de Maurice. Malgré les menaces qu’il dit avoir reçues pour qu’il ne parle pas à la presse, Giovanni Merle ne compte pas se laisser intimider. “Je continuerai à me battre contre ces persécutions. La vérité doit triompher“, dit-il.