[Hécatombe au ML] Le parti d’Ivan Collendavelloo perd ses plumes

Le Muvman Liberater (ML) est actuellement secoué par une série de démissions qui reflètent une crise interne profonde. En l’espace d’une semaine, trois personnalités influentes du parti ont quitté leurs fonctions, soulignant des tensions grandissantes et des désaccords au sein du mouvement et plus largement de l’Alliance Lepep.

Le premier à claquer la porte fut Zahid Nazurally, ancien Deputy Speaker de l’Assemblée nationale, fonction qu’il a officiellement quittée le vendredi 18 octobre. Il a annoncé sa démission des instances du parti le 7 octobre lors d’une réunion du bureau politique du ML à Rose-Hill. Si les raisons précises de son départ n’ont pas été formellement exprimées, des rumeurs indiquent que cette décision pourrait être liée à l’absence de ticket pour les prochaines élections générales. Il aurait également manifesté à plusieurs reprises son mécontentement à l’égard de certains collègues du gouvernement et du Premier ministre, Pravind Jugnauth, alimentant les spéculations sur un climat de désaccord ayant conduit à son départ. D’ailleurs, la façon impartiale dont il présidait les séances parlementaires n’était pas appréciée au sein du gouvernement.

Deux jours plus tard, c’est Ismaël Rawoo, leader adjoint du ML et député de la circonscription n°13 (Rivière-des-Anguilles–Souillac), qui a annoncé sa démission. Dans une lettre adressée à Ivan Collendavelloo, leader du ML, il a critiqué la position subalterne du parti au sein de l’alliance gouvernementale, et a exprimé son désarroi face à l’incapacité du ML à défendre ses priorités et à influencer les décisions stratégiques, ce qui a érodé, selon lui, l’influence du parti et sa capacité à représenter efficacement ses électeurs. Ismaël Rawoo a également dénoncé le manque de soutien de la direction du parti, précisant qu’il avait dû travailler seul dans sa circonscription sans aide adéquate.

Enfin, le 15 octobre, Ken Fong, conseiller municipal et ancien maire de Beau-Bassin–Rose-Hill, a lui aussi présenté sa démission. Dans une lettre brève, il a remercié Ivan Collendavelloo et affirmé qu’il garderait de bonnes relations avec les membres du ML. Il a déclaré à Sunday Times que plusieurs raisons l’ont poussé à prendre cette décision. « L’affaiblissement du ML mo trouv sa inacceptable dans le sens que 2014 tou ban candidats ML inn élu très honorablement et ti bizin consolide parti la. Nou inn subir humiliation lor humiliation, et surtout mo ti dir en avril/mai ki avec arrivée PMSD le ML pou affaibli davantage et mo ti ena raison », dit-il. « Mo finn surpris ek démission Ismaël Rawoo, mo pa ti atane. Concernant Zahid Nazurally c’est vrai ki ti ena ban signes de frustration légitime. Monn koz avec Ivan Collendavelloo lor traversée du désert du ML pendant sa 4 ans la au sein du gouvernement, be eski ena garantie ki si l’alliance Lepep revinn au pouvoir sa pou évoluer ? Mo ena ene l’amertume personnelle ki mo finn exprimer avec nou leader. Kifer li pa defane so ban membres ? Peut-être ki so entourage mal conseil li », ajoute-t-il.

Par ailleurs, il dénonce l’inaction du gouvernement face à la prolifération de la drogue dans sa région de Camp-Levieux. Selon lui, malgré ses avertissements répétés, le parti n’a rien fait pour lutter contre ce fléau qui touche de plus en plus de jeunes. Il reproche aussi à l’Alliance Lepep d’avoir négligé la communauté sino-mauricienne, soulignant que l’absence de candidats issus de cette communauté constitue un véritable « manque de reconnaissance ».

Ces démissions successives révèlent une désaffection croissante au sein du ML, dont plusieurs membres expriment leur frustration quant à leur rôle marginalisé dans l’alliance gouvernementale. Le parti, autrefois perçu comme une force influente au sein de l’Alliance Lepep, semble aujourd’hui perdre de son éclat. Les critiques concernant le manque de soutien interne, l’absence d’influence dans les décisions gouvernementales et la gestion électorale semblent être les principales causes de cette vague de départs.

Parallèlement, Ivan Collendavelloo, le leader du Muvman Liberater qui avait été évincé de son poste de Deputy Prime Minister et ministre des Utilités publiques en juin 2020 en raison du scandale de corruption lié au projet de la centrale thermique St-Louis, a récemment été blanchi de toute implication. Après plus de quatre ans d’enquête, aucun élément compromettant n’a été trouvé contre lui, ce qui écarte toute poursuite judiciaire. Cependant, ce scandale a eu un impact considérable sur sa carrière politique, le reléguant du rang de numéro 2 du gouvernement à simple backbencher.

Cette situation fragilise considérablement le ML à l’approche des élections générales de 2024. Alors que des figures clés quittent le navire, des questions se posent sur la capacité du parti à maintenir son unité et son rôle au sein de l’alliance gouvernementale, alors qu’il a obtenu cinq tickets. Le Muvman Liberater semble désormais à la croisée des chemins, et son avenir politique est plus incertain que jamais.

Ken Fong a exprimé à Sunday Times sa déception face à l’absence d’avancées dans l’enquête sur le meurtre de son beau-frère, Soopramanien Kistnen, ce qui a contribué à le faire remettre en question son affiliation politique. « Bokou dimoun pa ti koné ki Kistnen mo bofrère. Fer 4 ans. Mo finn fer confiance lapolice ek Premier ministre pou resoud l’enquête la mais pann trouv narien vini. » Sa présence à une réunion de l’Alliance du Changement récemment, où Navin Ramgoolam a promis de tout mettre en œuvre pour résoudre ce meurtre, témoigne de son désir de voir justice rendue. Pour Ken Fong, soutenir un gouvernement qui semble ignorer de telles injustices est devenu inacceptable, et il se tourne désormais vers des formations qui se montrent plus engagées à faire éclater la vérité.

Voir interview : https://fb.watch/vhKb1JZ17d/