Impact économique du Coronavirus : L’action suivra-t-elle les annonces ?

Lors d’une conférence de presse le vendredi 13 mars, le ministre des Finances, Renganaden Padayachy avait annoncé 27 mesures proposées par le gouvernement en cette période de crise économique, à cause de la pandémie du Covid-19. En prenant en compte les mesures phares annoncées, nous avons voulu savoir si ces mesures répondent aux exigences des différents secteurs, tels que le tourisme, les petites et moyennes entreprises (PME), et les petits planteurs.

 

Tourisme

Sen Ramsamy : « Prévenir tout abus de certains profiteurs »

Il avait été annoncé pour le secteur du tourisme que le ‘Passenger Fee’ a été mis en berne pour certains pays, afin d’encourager le tourisme régional, une offre valide jusqu’au 31 juillet. En outre, des tarifs promotionnels, variant de 15 % à 35 %, seront offerts par les hôtels. Il y aura aussi 15 % de remise sur les produits à la boutique hors-taxe du Mauritius Duty Free Paradise (MDFP), ainsi qu’une hausse du nombre autorisé de bouteilles de vins et de spiritueux qui pourra être vendu aux passagers.

Sen Ramsamy, le directeur du Tourism Business Intelligence, nous explique que le ministre des Finances a proposé une panoplie de mesures d’accompagnement aux opérateurs du secteur touristique, dans le but de les aider à faire face au manque à gagner qu’occasionnerait une éventuelle baisse dans les arrivées touristiques au cours des prochains mois.

Il est d’avis que ces mesures sont les bienvenues, car elles offrent un soulagement financier important aux opérateurs dans la gestion quotidienne de leurs entreprises. Cependant, il est primordial, à son avis, que ces mesures de soutien soient attachées à des conditions strictes pour qu’il n’y ait pas d’abus de la part de certains employeurs contre leurs employés. « Je connais un peu la mentalité de certains » dit-il.

Une crise de cette ampleur risque d’être utilisée par des employeurs pour licencier des employés qu’ils n’aiment pas ou de les mettre au chômage technique. Ils doivent pouvoir utiliser cette aide étatique pour améliorer leur offre, innover dans leur stratégie de commercialisation et offrir un service de qualité à leur clientèle.

« On ne peut prendre ces incitations et faire du ‘business as usual’ en se disant que le gouvernement va combler toute perte. Ce serait inacceptable. Le package du ministre a un coût qui provient des contribuables. Un employeur ne peut profiter de cette offre tout en mettant des gens à la porte ou faire des dépenses extravagantes », lâche-t-il.

« L’ancien ‘stimulus package’, de triste mémoire, doit servir de leçon pour qu’il n’y ait pas d’abus de la part de certains profiteurs qui chercheront avant tout à se frotter les mains et à remplir leurs poches en premier lieu. Le moindre abus doit être sanctionné. Il faut absolument qu’il y ait un ‘trade-off’ », affirme Sen Ramsamy.

Ajay Jhurry : « Beaucoup d’annonces, comme pour le Budget »

Quant à Ajay Jhurry, ancien directeur de l’Association of Tourist Operators, il ne cache pas sa confusion, en ce qui concerne les baisses des tarifs dans les hôtels. Il dit qu’il essaye toujours de comprendre comment cette annonce a été incluse dans des mesures gouvernementales, car les hôtels n’appartiennent pas à l’État.

En ce qui est des suspensions sur les « Passenger Fee », il dit noter que les gens ne voyagent pas, par peur d’attraper le virus. « Cette mesure est comme une promotion pour des produits non-végétariens pour des  personnes végétariennes. La question se pose : Quel impact cette annonce aura-t-elle sur notre économie dans l’immédiat alors que les gens ne vont pas voyager ? », interroge-t-il.

Il y a plusieurs pays qui sont affectés par le virus et ils vont essayer eux aussi de remonter la pente.  En ce qui est des promos de 15 % à 35 % dans les hôtels, il explique que ce seront les petits hôtels qui vont souffrir le plus avec ces annonces, selon la classification des hôtels en termes d’étoiles.

« Il y a beaucoup d’annonces, comme pour le Budget , mais en termes d’implémentation, il existe des problèmes », affirme-t-il.

 

Agriculture

Pradeep Jeeha : « Du bluff ! »

Sur le montant de Rs 100 millions  allouées aux petits planteurs pour encourager et augmenter la production locale des légumes, Pradeep Jeeha explique que c’est une mesure qui est en place depuis assez longtemps. C’est-à-dire que durant le mauvais temps, ou les cyclones, entre autres, les planteurs perçoivent déjà cette allocation. « C’est une mesure que tous les gouvernements ont annoncé dans le passé, mais comment cet argent est-il distribué, à qui et comment, cela est inexplicable », lâche-t-il.

Sur les terres qui devraient être allouées aux planteurs, c’est une mesure qui existe depuis des années, et en ce qui est des importations qui seront effectuées par le Marketing Board, il note  c’est déjà sa mission d’importer de l’ail, des oignons et des pommes de terre.

« Si le gouvernement veut faire croire que c’est à cause du Covid-19 que ces mesures sont annoncées, c’est du bluff ! », s’exclame-t-il.

Pradeep Jeeha demande au gouvernement de mettre de fonds pour les produits qu’on devra utiliser dans les prochains six mois. Il demande aussi que le gouvernement prévoit des programmes de semences avec des facilités accompagnatrices pour tous les planteurs.

 

Secteur des PME

Amar Deerpalsing : « On saura lundi si ce sont des mesures creuses »

Sur les annonces concernant les Petites et moyennes entreprises (PME), Amar Deerpalsing explique que ce n’est qu’à partir de lundi que les PME pourront savoir si les annonces sont concrètes.

Il faut que les PME se rendent à la Banque de Développement pour savoir si c’est positif, mais s’il n’y a rien, « Ce sont des annonces creuses ! » Il poursuit : « Les Mauriciens sont habitués avec des annonces qui ne sont jamais concrétisées. » Il a aussi fait ressortir que le ministre des Finances a annoncé qu’il a consulté tous les ‘stakeholders’ mais il n’a pas mentionné s’il a consulté les banques commerciales.

En ce qui est des Rs 200 millions dans la Banque de Développement, il estime que cette somme n’est pas suffisante, vu le nombre de PME dans le pays.