INDÉPENDANCE Jeune Mauricien, qui es-tu ?

Le 12 mars 2019 notre pays a célébré ses cinquante-et-un ans d’Indépendance. Les Mauriciens se disent «fiers» de leur patrie. Mais peut-on se considérer comme de vrais patriotes ? Et les jeunes dans tout ça, se sentent-ils concernés par le patriotisme ? Mon jeune âge me dit que le jeune Mauricien n’existe pas, du moins pas encore. Mais ça peut changer et ce sont les jeunes eux-mêmes qui apporteront ce changement dans le futur.

La fête nationale est célébrée chaque année dans les écoles, entre autres, mais pourtant, le taux d’absentéisme des élèves, surtout au secondaire, ne cesse d’accroître chaque année, à cette date. Ces jeunes qui, pour moi, n’ont aucun sens du patriotisme, considèrent cette cérémonie comme une perte de temps. Alors ils restent chez eux, à dormir ou à jouer toute une journée, ou à ne rien faire de concret.

Nous, les jeunes, nous nous disons «Mauriciens», mais combien d’entre nous ressentons une vibration intérieure et la fierté d’appartenir à un pays à part entière en entendant notre hymne national résonner ? Combien d’entre nous le chantons chaque matin de bon cœur et avec respect durant l’assemblée, à l’école ?

Habitants de l’île Maurice, qui sommes-nous ? Si on demande à des jeunes «qui êtes-vous ?», la grande majorité nous répondra qu’ils sont Hindous, Musulmans, Créoles, Chrétiens, Chinois ou même athées. Si, par hasard, on répond qu’on est Mauricien, on nous reposera la question, encore une fois. Regardez l’expression de nos interlocuteurs quand ils vous diront : «oui mais QUI ES-TU ?» comme si on n’a pas répondu à la question la première fois.

Nos croyances et nos cultures religieuses sont une chose et notre patriotisme envers notre pays en est une autre et il est important d’en être fier et de le montrer. Par exemple, si je suis un habitant de Curepipe, je suis Curepipien. Donc, nous tous, habitants de l’île Maurice, affirmons d’abord que nous sommes Mauriciens avant de dire de quelle religion ou croyance nous sommes.

Supposément uni, notre peuple se dit être une nation arc-en-ciel. Mais comme dans un arc-en-ciel, nos couleurs ne se mélangent pas. À Maurice, chacun a tendance à camper sur ses positions et chacun défend sa culture et ses convictions, s’isolant des autres. Ainsi, l’écart se creuse non seulement entre les croyances religieuses mais aussi entre les classes sociales. Les riches gardent leurs richesses et les pauvres restent pauvres. Et ce n’est pas un cliché.

Les fêtes culturelles et religieuses sont les seules exceptions où chaque «communauté» fait le partage de gâteaux ou de plats propres à leur culture respective. Par exemple, pour le Cavadee, célébré par les Tamouls, le traditionnel «sept curry» végétarien est servi à tous ceux présents pour le repas, peu importe leur religion. Pour le Divali et l’Eid-Ul-Fitr, le partage de gâteaux ne se fait pas par rapport à l’appartenance ethnique de chacun. Mais n’est-ce pas hypocrite de permettre ce partage culturel uniquement pendant les fêtes ?

Ce pays a une histoire commune qui remonte à la colonisation. Plus de 250 ans de colonisation française et anglaise ont changé le pays. Tout le monde, depuis cette colonisation française qui débute en 1722, ne peut prétendre à 100 % d’être d’une pure «race» mauricienne. Il y a eu un mélange culturel et biologique au fil du temps.

Le jeune Mauricien est donc un jeune métissé. Il a des parents de différentes origines culturelles et ethniques, et souvent de nos jours, de différentes religions aussi. Ici, chacun est libre d’avoir sa croyance et aucune religion ne s’impose sur une autre. D’ailleurs, ce sont les mariages inter-ethniques qui ont donné naissance aux jeunes Mauriciens métissés. Ce métissage n’est pas seulement physique mais aussi culturel. Le Mauricien est indéniablement touché et influencé par d’autres cultures et c’est cela qui fait sa beauté si particulière.

Les jeunes d’aujourd’hui vivent dans un village global. Dans ce monde moderne et connecté, ce serait bien si le jeune Mauricien s’identifie d’abord à son pays avant de devenir un citoyen du monde. Cela signifie qu’il doit connaître sa patrie et sa culture. Si un jour ce jeune voyage vers d’autre pays, il apprendra à vivre selon la culture de ces nouveaux pays.

Aussi, nous remarquons que c’est à l’étranger que ce jeune qui se disait Musulman, Hindou, Créole, ou autres, à Maurice, se dira Mauricien. Il sera fier de l’être et de le montrer à sa nouvelle terre d’exil. Ce jeune comprendra finalement ce que cela signifie d’avoir ses racines plantées dans la terre mauricienne.

Le jeune Mauricien doit aussi être une personne interculturelle. L’interculturalité, concept qui fait naviguer et cohabiter les êtres entre les différentes cultures, est l’avenir des jeunes Mauriciens. Comme le dit si bien l’un de ses plus ardents défenseurs, Jean Marie Le Clézio, prix Nobel 2008 de littérature, «l’interculturalité est le seul recours» pour réaliser notre liberté.

Le jeune Mauricien doit s’ouvrir aux autres. Il doit faire preuve de respect et de tolérance et se mettre dans la peau de l’autre. C’est ainsi, en se comprenant les uns les autres, que les jeunes Mauriciens forgeront le vrai mauricianisme. Ils créeront ainsi cette véritable identité mauricienne.

 

 

Trishan Teeroovengadum

Grade 11, RCPL.

15 ans.