Shalma Auckbaraullee, fondatrice de l’ONG La Main dans La Main, se trouve au cœur d’une controverse impliquant l’Institut Escoffier Île Maurice, établissement international spécialisé dans la formation aux métiers de luxe à la française. Cette femme d’origine mauricienne, née à Londres et ayant grandi au Canada, s’est installée à Maurice en 2019. Diplômée en Marketing/Commerce et en Administration des Affaires, elle s’est également formée dans divers domaines tels que l’enseignement Montessori et le coaching de vie.
Après un pèlerinage à La Mecque en 2022, Shalma a décidé de porter le hijab comme expression de son engagement spirituel. Ce choix personnel a cependant eu des répercussions inattendues sur sa vie professionnelle à Maurice, dit-elle. En effet, lors de son retour sur le marché du travail après l’épidémie de Covid-19 et une période consacrée au bénévolat, elle rapporte avoir été jugée “surqualifiée” par de grandes entreprises. Elle interprète cette excuse comme une réticence à embaucher une femme portant le hijab.
Shalma opte alors pour une reconversion professionnelle. Elle se porte ainsi candidate à un MBA en Management du Luxe et Marketing à l’Institut Escoffier Île Maurice. Elle se heurte alors à un obstacle inattendu, et reçoit un courriel de l’institut stipulant : “As the Institut Escoffier is a secular school, wearing the head scarf is prohibited on school premises as per our grooming policy.” Elle partage son expérience sur les réseaux sociaux ainsi qu’une capture d’écran du courriel, ce qui suscite une vive controverse et déclenche un large mouvement de soutien. « Pour la première fois, j’ai ressenti un débordement d’amour et de soutien et je me sens désormais Mauricienne et membre de la communauté », explique-t-elle.
Cet incident met en lumière les défis potentiels liés à l’implantation d’institutions étrangères ayant des politiques différentes des pratiques locales en matière de diversité et d’inclusion. Traditionnellement, Maurice est reconnu pour sa tolérance et son respect des différentes religions et cultures, le port de symboles religieux, y compris le hijab, étant accepté dans la plupart des sphères de la vie publique. Cette approche contraste fortement avec celle de la France, où le port du voile ou de l’abaya est interdit dans l’enceinte des établissements scolaires publics depuis 2004, et où le niqab est banni dans l’espace public depuis 2010. Les fonctionnaires y sont soumis à un devoir de neutralité qui leur interdit le port de signes religieux ostensibles, et dans le secteur privé, des restrictions similaires sont fréquemment appliquées, bien que les règles puissent varier selon les employeurs et les situations spécifiques. Ces lois sont souvent jugées discriminatoires envers la communauté musulmane.
Shalma a décidé d’engager une action en justice contre l’institut français, avec l’aide de l’avocat Shakeel Mohamed. « Je suis déterminée à lutter pour la justice et à être la voix de ceux qui font face à la discrimination », déclare-t-elle.