Irrégularités durant les dernières élections: Le rôle troublant d’Ali Dauhoo, ‘Senior Adviser’ du PM

Deux candidats battus aux dernières élections, Dev Sunassy et Axel Tan Yan, ont déposé une ‘plaint with summons’ en Cour suprême ce jeudi 6 février pour contester les dernières élections. Ce qui retient l’attention, entre autres, dans cette plainte, c’est le rôle troublant d’Ali Dauhoo, ‘Senior Adviser’ auprès du PM. Ce conseiller s’était implanté dans les locaux de la Commission électorale pendant le dépouillement des bulletins, mettant ainsi la crédibilité et l’indépendance de la Commission en jeu, selon les plaignants.

La plainte est dirigée contre l’État mauricien, l’Electoral Supervisory Commission (ESC), le Commissaire électoral, la State Informatics Ltd, l’Independent Broadcasting Authority (IBA), et la Mauritius Broadcasting Authority (MBC). Les plaignants réclament un jugement déclaratoire de la Cour suprême à l’effet que les défendeurs ont enfreint les provisions de la Constitution lors des élections, et que ces élections sont ‘null and void’, et d’ordonner que les élections se tiennent à nouveau et cela dans le respect des lois.

L’intervention du ‘Senior Adviser’ de Pravind Jugnauth, Ali Dauhoo, dans le processus de dépouillement, suscite plusieurs interrogations. Quel rôle ce monsieur a-t-il exactement joué durant l’exercice de décompte ? Ce dernier était activement impliqué avec la Commission électorale et l’ESC durant le processus de dépouillement. Or, la section 40(3) de la Constitution est explicite : la Commission électorale doit agir en toute indépendance et n’est pas sujet au contrôle d’une autre personne ou instance.

Selon les plaignants, la présence et la participation d’un « political appointee », notamment Ali Dauhoo, parmi les officiers de la Commission électorale ont sérieusement compromis l’indépendance de ces officiers. Comme l’affirment les plaignants dans leur plainte, « The said Mr. Ali Dauhoo made use of his authority as a Senior Adviser to the Prime Minister to exercise direction and control on the exercise of the functions of the Defendant No 3 (NdlR : la Commission électorale). »

Le sieur Dauhoo aurait même, selon les plaignants, “elected his office or sub-office within the premises of the Office of the Electoral Commissioner itself, and was seen on multiple occasions within the premises of the said office”.

Les autres points soulevés par les plaignants

  • 6 838 bulletins dépouillés ont été déclarés invalides et ni l’ESC ni le Commissaire électoral n’ont fourni aucune explication pourquoi tous ces bulletins ont été invalidés.
  • De nombreux électeurs ont vu leurs noms être retirés du registre électoral de façon arbitraire et injuste, ce qui constitue une violation grave de notre Constitution. Environ 6 800 personnes sont concernées mais les plaignants sont convaincus que le nombre réel de personnes qui n’ont pu voter est bien plus élevé.
  • Le rôle de la State Informatics Ltd a aussi été remis en question. Son intervention était « illégale » et contraire aux dispositions de la Constitution, vu qu’il n’y a aucune loi ou section de la Constitution qui autorise une personne autre que les officiers de la Commission électorale, les candidats et leurs agents d’être présents aux centres de dépouillement, et d’être impliqués dans le dépouillement des bulletins.
  • L’abus de l’appareil d’État, notamment la propagande de la MBC en faveur du gouvernement, a aussi été soulevée. En outre, l’Independent Braodcasting Authority (IBA) a été sévèrement critiquée pour avoir failli à rappeler la MBC à l’ordre.
  • L’annonce faite aux personnes âgées par le PM qu’il augmenterait la pension de vieillesse s’il est élu est, selon les plaignants, un « bribe » électoral en contravention de la ‘Representation of the People Act’.

 

L’ESC : Deux de ses membres, les hommes de loi du PM

Toujours selon la plainte, le Premier ministre Pravind Jugnauth avait été le client, à titre personnel, de deux membres de l’Electoral Supervisory Commission (ESC)(deux hommes de loi) pendant les élections ou juste avant. L’un des deux avait même fait une déclaration très partisane durant une conférence de presse  le 25 février 2010 après le premier acquittement du PM dans la saga Medpoint. Pour les plaignants, ces deux membres ont été nommés membres de l’ESC alors qu’ils agissaient comme les hommes de loi du PM. Dans ce contexte, quelle a été l’indépendance de l’ESC, qui est censée superviser le bon déroulement des élections selon les dispositions légales ?

ÉDITION : 09.02.2020/421