Louanges à Allah (swt) et Salutations au Prophète Muhammad (saw).
« Nous avons certes créé l’homme pour une vie de lutte. » Surah Al Balad (90), verset 4.
« Or, il ne s’engage pas dans la voie difficile ! Et qui te dira ce qu’est la voie difficile ? C’est délier un joug (affranchir un esclave). » Surah Al Balad (90), versets 11 – 13.
En marge de la journée mondiale contre le trafic humain, il convient de réfléchir sur la pertinence et l’impact de ce crime du point de vue islamique. De plus, les récents amendements au Private Recruitment Agencies Act 2023, glissée sous le Workers’ Rights Act, ouvre, selon les syndicalistes, les vannes au trafic humain et à l’exploitation des travailleurs migrants, les mettant à la merci des exploiteurs potentiels que sont les agents recruteurs.
Aucun être humain, le Musulman en particulier, ne peut être indifférent à cette situation, car il y va de son rôle de témoin pour l’humanité, et de son engagement de dénoncer l’oppression et l’exploitation, en prenant la défense des opprimés. C’est pour cela que les Musulmans devront soutenir la démarche d’une confédération syndicale ce mardi. Le peuple doit dire non aux marchands d’esclaves.
Il est reconnu que le trafic humain est le secteur criminel qui évolue le plus rapidement à travers les frontières de nombreux pays. Plus de 27,6 million de gens au monde n’ont plus l’autonomie pour déterminer leurs conditions de vie et de travail. Le trafic humain s’est développé en une industrie criminelle lucrative.
La traite des êtres humains consiste à recruter des personnes, à les transférer, à les faire passer par des intermédiaires, à les héberger ou les accueillir en vue de leur exploitation par des moyens illicites tels que la tromperie, les menaces ou d’autres formes de contrainte, telles que l’enlèvement, la fraude, l’abus d’autorité ou une situation de vulnérabilité, ou encore par l’offre ou l’acceptation de paiements ou d’avantages pour obtenir le consentement d’une personne ayant autorité sur une autre.
L’Islam condamne sévèrement l’exploitation des plus vulnérables, la base même du trafic humain.
Alors que l’expression trafic humain n’apparait pas explicitement dans les textes islamiques, l’interdiction de ce crime est évidente par la condamnation de diverses formes d’exploitation qui ont perduré à travers des générations.
A la base de l’offense criminelle associée au trafic humain se trouve le concept de l’exploitation. Celle-ci se rapporte à l’utilisation coercitive, abusive et contre l’éthique d’individus pour des actions illicites, telles que le travail forcé, l’exploitation sexuelle ou la servitude imposée.
Le trafic humain inclue aussi l’exploitation par l’esclavage, les transactions louches, les activités sexuelles, le trafic d’organes, l’adoption et des actes relevant de l’injustice.
Pour les besoins de ce khutbah, nous focalisons sur le domaine du travail et de l’exploitation des travailleurs étrangers. Il est avéré que la majorité des migrants qui sont à Maurice ne savent pas lire le contrat qu’ils auront signé par la force des circonstances. La pauvreté dans leur pays d’origine ou encore les promesses d’un eldorado où ils pourront manger à leur faim sont certains des éléments qui les ont poussé à émigrer. Ils sont nombreux à s’être embarqués dans cette aventure sans disposer de toutes les informations nécessaires ou ayant été leurrés par des personnes exploitant leur ignorance ou leur illettrisme.
Une fois à Maurice, c’est la désillusion totale, découvrant qu’ils ont subi une injustice. Le comble, c’est que certains sont ainsi devenus les propriétés de leur employeur, ce dernier allant jusqu’à détenir leurs passeports. Qui ne se souvient pas de ce propriétaire de boulangerie, musulman de surcroît, qui frappait son employé migrant comme si ce dernier lui appartenait ?
L’Islam préconise la libération de la dignité humaine. La condamnation de toutes les formes d’exploitation est fondée sur le principe fondamental du tawheed (monothéisme). Cette doctrine encourage la libération des humains de toutes les formes d’esclavage vers l’esclavage et la soumission à Allah (SWT) exclusivement. Le principe de tawheed libère les humains de considérations de statuts sociaux ou de races et exige que chaque personne soit traitée sur une base égale, sans discrimination. Selon ce principe, les êtres humains sont égaux aux yeux d’Allah (SWT). Ainsi, toute forme de discrimination ou d’exploitation de l’humanité est contraire aux enseignements islamiques.
L’Islam, faut-il le noter, avait adopté une approche graduelle à la pratique de l’esclavage, pratique profondément ancrée à travers des siècles globalement. Le Prophète Muhammad (SAW) avaient adopté diverses approches pour s’attaquer à cette pratique, apportant une restriction aux nouvelles formes d’esclavage, encourageant la libération d’esclaves et appelant au traitement humain de ceux existants.
Dans le contexte de la migration pour un emploi, de nombreuses victimes du trafic humain ont été leurrées par des promesses d’une vie meilleure, acceptant que leur choix et leur liberté leur soient enlevés.
Sur ce chapitre, l’Islam interdit toute forme de malhonnêteté dans les transactions. S’engager dans de telles pratiques est jugé frauduleux et peut entrainer une punition dans l’au-delà. Et ceci, selon les paroles du Prophète Muhammad (SAW): « Celui qui triche n’est parmi nous. »
Dans le contexte du trafic humain, l’intention de s’attaquer aux questions de manque de main d’œuvre, de la réduction de la pauvreté, des crises économiques, des conflits, d’instabilité et de déplacement ne rend pas légitime les activités de trafic. Ainsi, l’Islam interdit, selon Yousouf Qaradawi, toute exploitation, indépendamment des bonnes intentions en vue de faire respecter les principes de la justice, de l’équité et de l’éthique.
L’exploitation au travail comprend le travail forcé exigeant des individus de travailler sous contrainte, avec souvent des demandes excessives ou des heures supplémentaires et des taches additionnelles, sans paiement adéquat. Telle est aussi, selon les syndicats, la réalité à Maurice. Il faut ajouter à cela l’hébergement dans des chambres à 10 ou 15 personnes avec des facilités d’hygiène insuffisantes, ou encore la nourriture de qualité inférieure.
Les principes de justice et de transparence sont inscrits dans le Qur’an :
« Ne convoitez pas ce qu’Allah a attribué aux uns d’entre vous plus qu’aux autres ; aux hommes la part qu’ils ont acquise, et aux femmes la part qu’elles ont acquise. » (Surah An Nisa (4), verset 32)
De plus, il est attribué au Prophète Muhammad SAW) ceci :
« Donnez à l’homme son dû avant que sa sueur ne sèche. »
L’Islam valorise aussi le concept du contrat. Au-delà de sa valeur légale, il jouit d’un statut sacré tenant lieu de convention auprès d’Allah (SWT). Tel que l’affirme le premier verset du surah Al Maidah (5) :
« Ô vous qui croyez ! Remplissez fidèlement vos engagements. »
L’Islam met l’accent sur un contrat clair et transparent pour prévenir toute forme de difficulté.
L’éradication du trafic humain n’est pas seulement un devoir religieux, mais une responsabilité qui exige l’engagement de tout un chacun et la persévérance des individus, des communautés, des décideurs politiques et des organisations internationales pour agir les uns à côté des autres, et ainsi sauvegarder la dignité et les droits de chaque individu, en ligne avec les principes islamiques ainsi que les valeurs humaines universelles.
« Certes Allah commande la justice et la bonté et l’assistance aux proches. Et Il interdit les mauvaises actions et l’oppression (sous toutes ses formes). Il vous exhorte afin que vous vous souveniez. » (Surah An Nahl (16), verset 90)