[L.E] Démystifier le Waqf

Ces derniers temps, il y a eu une augmentation de l’utilisation du Waqf au sein de la communauté musulmane de Maurice.

Bien que le terme « Waqf » puisse sonner une cloche pour certains, il reste un mystère complet pour d’autres. 

Creusons donc dans cette structure juridique pas-si-nouvellement disponible à Maurice. En effet, cette structure a été créée par la loi Waqf de 1941…

Pour commencer, à Maurice, le Waqf est une dédicace permanente de tout bien par une personne de foi musulmane, le Waqif. L’utilisation ou les revenus, qui découlent des biens mentionnés dans le Waqfnama, seront consacrés à toute fin reconnue par la loi musulmane comme étant religieuse, pieuse ou caritative. 

Avec l’apparence d’une nouvelle structure juridique, le concept du Waqf a des origines similaires au concept de dotation démontré par des universités, telles que Cambridge, Harvard et Oxford. Par exemple, le plus grand actif financier de l’Université Harvard est l’Harvard Endowment, qui est composé de plus de 13 000 fonds individuels investis en tant qu’entité unique.

Au fil du temps, l’émergence des nouvelles structures, tels que les ‘Trusts’, les ‘Global Business Companies’, entre autres, ont pris le dessus et la structure juridique du Waqf a sombré dans les oubliettes.

Alors, commençons par démystifier le Waqf, car « pour croire avec certitude, il faut commencer par douter » (dicton polonais).

La déclaration du Waqif est contenu dans le Waqfnama, une declaration qui peut se faire du vivant du Waqif ou par testament. Doté d’une force semblable à un acte notarial, le Waqfnama est enregistré auprès du Waqf Board. Lors de la déclaration du Waqf, il faut que le Waqif ne soit pas déclaré en faillite.  

Si l’on se pose la question sur les potentiels ‘zones troubles’ concernant le Waqf, il faut souligner que le Waqf peut être attaqué juridiquement par toute personne, qui se sent lésée par sa déclaration ou sa création, pendant un période de trois ans à compter de sa déclaration ou creation.

Comme l’a si bien dit Montesquieu, dans l’esprit des lois, « la liberté est le droit de faire tout ce que les lois permettent ». L’un des piliers du bon déroulement du Waqf à Maurice est le Board of Waqf Commissioners, qui a été mis en place par la loi Waqf 1941, afin d’agir en tant que chien de garde pour s’assurer à ce qu’il n’y ait pas d’abus dans l’utilisation de cette structure juridique. De plus, la Cour supreme est dotée des pouvoirs statutaires pour déclarer un Waqf nul et sans effet.  Un autre garde-fou en place pour cette structure juridique est le Mutawalli. En effet,l’administration du Waqf est soumise à un Mutawalli, qui est le gérant en charge de protéger la propriété du Waqf.

Petite parenthèse, chers lecteurs, saviez-vous que le Waqf n’est pas qu’un véhicule aidant à la planification de sa succession individuelle mais concerne aussi les mosquées ? En effet, la loi du Waqf 1941 a fait provision pour le Waqif qui veut faire d’une mosquée son Waqf.

Alors, l’objet du Waqif peut être une mosquée mais le Waqf sera complété que lorsqu’il y a une séparation de la mosquée du reste de sa propriété. Il faudra avoir fourni un moyen d’y accéder et permis, soit d’y dire des prières publiées, soit de remettre la possession de la mosquée à un Mutawalli. En effet, le Waqf n’est pas considéré comme étant complet si une personne ne fait qu’ériger ou désigner un bâtiment dans le but de le consacrer comme une mosquée.  

Lorsque l’objet du Waqif est une mosquée, le Waqf ne peut pas se réserver un avantage en vertu du Waqf. En cas d’un Waqf avec une telle réserve, il sera comme étant nul. De plus, lorsqu’une mosquée est un Waqf, des dispositions peuvent être prises pour les dépenses liées à l’utilisation et à l’entretien de la mosquée en tant que lieu de culte.

Cet aspect du Waqf est peu exploité dans la communauté musulmane de Maurice mais j’espère qu’à travers cet article, chers lecteurs, vos doutes sur ce véhicule juridique seraient dissipés. Comme le dit si bien Christine de Suède, « la sagesse est dans le choix de croire ou de douter. Il faut douter de tout, même de ses soupçons. » Cet article n’est que le premier pas à démystifier le Waqf concernant les mosquées. 

Zareena Tawheen Choomka
Avocate

NOTE : Les points de vue exprimés dans cette rubrique ne reflètent pas nécessairement ceux de la rédaction et n’engagent que les auteurs eux-mêmes.