La lenteur de l’hôpital ENT décriée… Ismed Abdoolah aurait-il pu être sauvé ?

  • La famille Abdoolah dénonce le traitement « inhumain » qu’a subi ce dernier

Ismed Abdoolah, un habitant de Quatre-Bornes âgé de 74 ans, avait été testé positif à la covid-19 le 11 novembre. Selon sa nièce Jabeen Thug, dans la trentaine, Ismed Abdoolah n’avait pas de comorbidité ou autre trouble de santé, et s’était fait vacciner avec deux doses du vaccin Sinopharm.

Le 16 novembre dernier, il ne sentait pas bien. Sa famille avait alors appelé un médecin pour l’examiner à domicile. Le médecin avait alors constaté que le niveau d’oxygène dans son sang était de 88 %, ce qui est anormalement bas.  On a ainsi dû le faire admettre à l’hôpital Victoria à Candos. Vu que son état de santé se détériorait, il avait été transféré à l’hôpital ENT, où il avait été placé sous oxygène. 

Les médecins avaient confié à ses proches qu’il y avait une possibilité qu’on allait le mettre sous intubation, mais cela n’a jamais été le cas et il est resté sous oxygène, malgré que son état de santé se détériorait  de plus en plus. « Je me demande pourquoi ils n’ont pas mis mon oncle sous intubation  », nous lance Jabeen, encore ulcérée par la tournure des évènements.

Un médecin proche de la famille Abdoolah lui fait savoir qu’Ismed était traité à la Dexaméthasone, mais qui n’agissait pas sur lui. Le médecin leur demanda d’acheter le médicament connu comme Tocilizumab, dont l’efficacité contre la covid-19 est reconnue.

Débute alors une course contre la montre. La famille va frénétiquement chercher ce médicament dans toutes les pharmacies du pays mais peine perdue. Au final, elle dépêcha un proche à la Réunion pour se procurer le Tocilizumab.

Une fois reçu le médicament a été placé dans un réfrigérateur pour le ramener à une température de 8 oC avant de l’acheminer à l’hôpital ENT le vendredi 19 novembre.

Ce n’est que le lendemain, Samedi 20 novembre que le patient a pu prendre le Tocilizumab.

Malheureusement Ismed Abdoolah  devait décéder le lundi 22 novembre dans l’après-midi.

La famille est toutefois très remontée contre le personnel soignant « Nous avons bien apporté le médicament, mais il ne le lui a administré que le lendemain. C’est inadmissible », fustige Jabeen Thug. « Nous avons tout fait pour sauver mon oncle mais par la faute de l’hôpital ENT, nous n’avons n’a pas pu le sauver », maintient Jabeen Thug.

Selon elle, 4 jours avant le décès de son oncle, elle avait déjà informé les membres du personnel de santé de l’hôpital ENT que la famille ramènerait le médicament Tocilizumab. Mais ce n’est que le vendredi 19 novembre, en possession du médicament, qu’on a décidé d’effectuer des tests sanguins nécessaires avant l’administration du médicament. « Pourquoi n’ont-ils pas effectué les tests dans l’intervalle de 4 jours ? », se demande Jabeen Thug. Le médicament a été ainsi administré tardivement, mais selon cette dernière, un seul jour aurait pu faire la différence.

Le vieil homme traité dans des conditions « inhumaines »

Jabeen Thug  tient à dénoncer le traitement « inhumain » infligé à son oncle, traitement qui selon elle, est infligé aux autres personnes atteintes de la covid-19. « Les soignants ne s’occupent pas des patients comme il le faut », déplore-t-elle.

Elle fustige tout d’abord  l’absence de communication du personnel soignant de l’hôpital ENT. « Quand on leur téléphone, ils ne répondent pas aux appels. Je me demande comment ils fonctionnent », lance Jabeen Thug. « Il y a trop d’incohérences de leur part. »

Selon elle, elle avait appelé l’hôpital pour avoir des nouvelles de son oncle. On lui avait répondu que son oncle se remettait et qu’il se sentait bien, alors que ce n’était pas le cas. « On disait que son état était stable mais comment se fait-il qu’il est décédé ? Je veux à tout prix connaitre la vérité. Si une personne est en train de guérir, comment se fait-il qu’elle n’ait pas survécu ? Les informations fournies par le personnel de santé de l’hôpital ENT ne sont pas fiables. Elles sont même totalement fausses ! », dit-elle.

Le vieillard avait été laissé à son triste sort. Il avait gardé la même couche pendant des jours. On ne lui a pas donné son bain, et il n’a pu se brosser les dents, selon les dires de Jabeen Thug.

Un jour avant son décès, Ismed Abdoolah avait appelé Jabeen et lui avait dit qu’il avait soif et qu’il n’avait pas une seule goutte d’eau à boire. Elle s’est rendue à l’hôpital ENT avec une bouteille d’eau et avait demande au vigile à l’entrée de bien vouloir faire livrer cette bouteille, ce que faisaient aussi les autres proches des personnes atteintes de la covid-19. Or, après sa mort, la famille a constaté que la bouteille d’eau n’était jamais parvenue à son destinataire. Elle était restée au même endroit où elle avait été déposée, soit près de l’entrée de l’hôpital. Jabeen Thug maintient que les aliments et les bouteilles d’eau laissés par les proches ne sont pas remis aux patients, alors que cela aurait pu les soulager.

Selon les dernières paroles d’Ismed Abdoolah à ces proches, il n’y avait que deux médecins qui s’occupaient des patients à l’hôpital ENT. C’était le ‘burn-out’ total pour le personnel de cet hôpital.

Le fait de voir son oncle être mis dans un sac mortuaire l’a rendue encore plus triste. Pour Jabeen Thug, « L’hôpital ENT est un abattoir ! Une fois atterri à l’ENT, on n’en sort pas vivant ! »

Elle dénonce le fait que le gouvernement est en train d’agir de façon « criminelle », etdemande que les autorités aient un plus de respect pour les dépouilles des personnes mortes de la covid-19 car derrière, il y a toute une famille en deuil.

La famille comptait plus que tout pour Ismed Abdoolah, et il laisse derrière lui une famille dévastée par son départ tragique. « C’est une épreuve dont on a du mal à se relever », dit Jabeen.

Selon elle, Ismed Abdoolah était une personne amicale qui n’avait jamais eu de problèmes avec qui ce soit dans son entourage. À l’âge de 74 ans, il était toujours actif. Il prenait souvent le bus pour se déplacer et avec l’aide de son épouse, était encore capable de gérer son café. Il était aussi le secrétaire du ‘Front commun des commerçants’.

Comme il n’avait pas d’enfant, il avait toujours traité Jabeen comme sa fille. Cette dernière avait ainsi connu son oncle depuis toute petite. Jabeen nous raconte qu’Ismed était comme son père, et qu’elle passait la plupart du temps en sa compagnie. L’avoir perdu laisse un grand vide dans sa vie, et elle ne peut se résigner que son oncle ait été emporté par la covid-19.