Le combat des Palestiniens : Bien plus qu’une guerre religieuse, une cause humaine !

Depuis maintenant plus de 100 ans, une lutte sans merci se déroule à plusieurs kilomètres de chez nous. Une lutte pour la libération d’un état, une lutte pour retrouver ses terres. Cela se passe en Palestine et depuis plusieurs décennies, le peuple palestinien souffre mais résiste farouchement à l’invasion israélienne. Une résistance reconnue et légitimée par plusieurs nations du le monde, d’où l’observation d’une Journée internationale dédiée à la solidarité avec le peuple de la Palestine, par l’Organisation des Nations Unies, chaque 29 du mois de novembre.  

Marwan Dawood

Tous les ans, les Nations-Unies observent le 29 novembre comme la Journée internationale de solidarité avec le peuple palestinien. Cette date a été décrétée dans de nombreuses résolutions : 32/40 B du 2 décembre 1977, 34/65D du 12 décembre 1979, 60/37 du 1er décembre 2005 et encore dans d’autres résolutions pertinentes.

Si la date du 29 novembre a été retenue, c’est en raison de sa signification particulière pour le peuple palestinien. Il faut remonter en 1947, lorsque l’Assemblée générale de l’ONU adopta la résolution 181(II), connue par la suite comme la « Résolution sur le plan de partage ». Cette résolution prévoyait la création en Palestine d’un « État juif » et d’un « État arabe », tandis que Jérusalem serait placée sous tutelle internationale spéciale, comme Corpus Separatum.  À New York, au siège de l’ONU, le Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien et l’Assemblée générale se réunissent le 29 novembre, chaque année, en séance extraordinaire, pour célébrer cette Journée.

Dans plusieurs parties du monde, la Journée est marquée par des évènements mineurs, qui marquent toutefois les esprits. Ainsi, à Maurice, l’Islamic Cultural Centre (ICC) a tenu une exposition le jeudi 29 novembre, à la municipalité de Port-Louis (voir encadrement).

L’ICC se mobilise en faveur du peuple palestinien

Le Centre culturel islamique (ICC), conjointement avec la municipalité de Port-Louis, a tenu un rassemblement sur l’esplanade municipale ce 29 novembre 2019 pour marquer la Journée internationale de solidarité avec le peuple palestinien. Les invités ont pu admirer les chefs-d’œuvre de plusieurs artistes, où le martyre du peuple palestinien face à l’occupation israélienne est mis à nu. Des plants d’oliviers, symboles de la résistance palestinienne, ont été remis aux invités. Ces derniers ont pu déguster plusieurs plats palestiniens. Plusieurs personnalités ont marqué cet évènement par leur présence.

Pas une guerre entre musulmans et juifs

Il est faux de dire que les opposants à la politique coloniale d’Israël sont tous des musulmans ou des arabes. C’est un écueil récurrent : les opposants à la politique coloniale d’Israël sont souvent confondus avec la communauté musulmane ou la communauté arabe ou  maghrébine. Il s’agit là d’une contre-vérité, démentie par chaque manifestation, puisqu’on y trouve rassemblés des gens de toutes les confessions et de tous les horizons, ethniques, sociaux ou géographiques. Cette diversité se retrouve également dans les organisations qui militent en faveur des Palestiniens.

Dans le même ordre d’idées, on ne peut dire que tous les juifs sont favorables à la politique coloniale d’Israël. Comme tous les opposants à la politique israélienne ne sont pas musulmans, il faut aussi rappeler que tous les juifs ne sont pas sionistes ou favorables au gouvernement israélien. D’ailleurs, parmi les intellectuels (Stéphane Hessel, Alain Gresh, Rony Brauman) et les militants engagés (Michel Sibony, Olivia Zemor) pour une paix juste entre Israël et la Palestine, beaucoup sont de confession ou d’origine juive.

À Maurice, les militants engagés et avertis sur la question de la Palestine, dont Sedley Assonne, condamne la « communalisation » du combat des Palestiniens. Ce dernier a pendant des années pris position sur le combat des Palestiniens pour recouvrer leurs terres. Il se livre à Sunday Times : « C’est un problème humain. Il est vrai que la perception existe que la guerre israélo-palestinienne n’est qu’une guerre entre musulmans et juifs ». Le journaliste et observateur affirme que la Palestine est également peuplé d’une forte composante chrétienne, qui est aussi victime des attaques israéliennes. « Je suis surpris que les chrétiens de Maurice soutiennent Israël car ce pays est mentionné dans la Bible, mais ils doivent comprendre que l’Israël d’antan n’est plus le même. L’Israël de Netanyahu est différente de ce que mentionnait la Bible. Le problème palestinien est un problème humain et non une chose religieuse », explique-t-il.

Par ailleurs, Sedley Assonne se dit « étonné » de voir que l’État mauricien a changé son fusil d’épaule. « Auparavant, pendant 50 ans, nous avons reconnu le combat des Palestiniens. Nous avons toujours pris position pour ceux qui sont opprimés mais aujourd’hui, le gouvernement mauricien reconnait l’état d’Israël et a même accueilli un ambassadeur de ce pays chez nous. »

Alain Laridon : « On ne peut supprimer un peuple » 

Lui aussi militant engagé, passionné de la géopolitique et observateur, Alain Laridon nous parle de la Palestine et de ses autres combats. « Je milite encore pour que la République arabe sahraouie démocratique obtienne son indépendance. C’est un engagement de ma part. En ma capacité d’ex-ambassadeur du Mozambique, basé à Maputo, j’échange mes idées à travers des interfaces sur la politique internationale avec d’autres pays de la région car je suis un passionné de la géopolitique », explique Alain Laridon. « Il faut mobiliser la société civile pour des actions de solidarité. Cela doit être un combat international car il faut croire dans la libération de la Palestine. On ne peut supprimer un peuple », dit-il. Pour répondre à la question de « communalisation » de la cause palestinienne, Alain Laridon explique qu’il a beaucoup suivi le combat de George Habbas, un chrétien palestinien, secrétaire général du Front populaire pour la libération de la Palestine (Popular Front for the Liberation of Palestine (PFLP)).  « Son combat est un signe que le combat des Palestiniens n’est pas une guerre des musulmans seulement », explique Alain Laridon. Ce dernier demande aux jeunes Mauriciens de s’intéresser à la chose géopolitique. « Il faut que plus de jeunes se joignent au combat.  Il faut qu’ils soient partie prenante de la cause de libération, pas uniquement pour la Palestine mais également ailleurs. »

Le conflit israélo-palestinien oppose des camps sans commune mesure 

Le conflit israélo-palestinien n’est pas une guerre entre deux puissances comparables. Il s’agit en réalité d’une puissance coloniale, Israël, qui réprime des indigènes, les Palestiniens. On retrouve en effet toutes les caractéristiques du joug colonial avec la colonisation des territoires, le blocus, la disproportion des forces militaires, la répression indifférenciée des résistances armées et des cibles civiles (femmes, enfants, journalistes, écoles, hôpitaux). La disproportion en termes de puissance économique et médiatique est également patente et parachève l’asymétrie totale de ce conflit, qui dure maintenant depuis plus de 60 ans avec la complicité ou l’indifférence à peine voilée de la communauté internationale. En effet, l’état d’Israël contrevient régulièrement au droit international et aux droits de l’Homme.

En 2008 et 2009, l’opération « Plomb Durci » menée par Israël avait ainsi tué près de 1 400 Palestiniens, dont 758 civils, et 13 soldats Israéliens . Le rapport Goldstone, commandé par le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU, avait alors fait état d’actes pouvant constituer des crimes de guerre, voire des crimes contre l’Humanité. Le déni de cette réalité dérangeante par une partie de la communauté internationale, notamment les États-Unis, et les pressions exercées sur les auteurs de ce rapport, ont eu raison de sa valeur informative. Ces faits incontestables sont la parfaite illustration d’une guerre coloniale, totalement asymétrique, qui démontre un traitement politique et médiatique différencié entre des forces coloniales et des résistances anticoloniales.

 Message d’Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU le 29 novembre dernier

« La lutte du peuple palestinien pour l’autodétermination, l’indépendance et la dignité, qui dure depuis des décennies, se heurte à de nombreux obstacles, notamment la poursuite de l’occupation militaire du territoire palestinien ; la poursuite des violences et de l’incitation à la violence ; la poursuite de l’implantation et de l’expansion des colonies de peuplement ; les profondes incertitudes liées au processus de paix ; la détérioration de la situation humanitaire et économique, en particulier dans la bande de Gaza. »

Les dates importantes

En 1917, en pleine première Guerre mondiale, le Royaume-Uni se positionne déjà sur la question de la Palestine. Arthur James Balfour, Premier ministre britannique, publie sa lettre adressée au sioniste Lord Rothschild  : il s’y déclare favorable à la création en Palestine d’un «  foyer national juif  ».

Dans le camp des vaincus en 1918, l’empire Ottoman est démantelé par les traités de paix. À l’exception de la Turquie, le Proche-Orient est désormais administré par les puissances occidentales auxquelles la Société des Nations (le prédécesseur des Nations Unies) a confié un mandat. La Palestine relève d’un mandat britannique. Aucun état juif n’est alors créé.

Durant la Seconde Guerre mondiale, le génocide juif initié par l’Allemagne nazie et par les régimes collaborateurs (la Shoah) provoque la mort de cinq à six millions de personnes. La « destruction des juifs d’Europe » accentue le phénomène migratoire. En 1945, la Palestine compte environ 553 000 Juifs pour 1 240 000 Arabes. La Shoah rend ainsi d’autant plus urgente la question de la création d’un état juif.

Après la Seconde Guerre mondiale, alors que les états arabes du Proche-Orient obtiennent leur indépendance, les Nations unies votent un plan de partage pour la Palestine. Ce plan prévoit un état juif, un état arabe, ainsi qu’un statut international pour Jérusalem. Accepté par les sionistes, ce plan est refusé par les Arabes de Palestine et leurs alliés. En 1948, alors que le plan de l’ONU n’est pas encore mis en œuvre, le mandat britannique prend fin. Les juifs proclament l’État d’Israël, rapidement reconnu par les États-Unis et par l’URSS. D’emblée, les Arabes de Palestine ainsi que l’ensemble des états arabes voisins (la Syrie, l’Irak, la Transjordanie et l’Egypte), qui ne reconnaissent pas l’État d’Israël, lancent une offensive. La coalition arabe est vaincue en 1949.

En conséquence, Israël repousse ses frontières. Les Arabes de Palestine voient quant à eux leur territoire nettement scindé en deux :

  • d’une part, on trouve la Cisjordanie, bordée par Jérusalem à l’ouest et par le Jourdain à l’est ;
  • d’autre part, le long de la côte méditerranéenne, où se trouve la bande de Gaza.

La Cisjordanie est annexée en 1950 par la Transjordanie (qui devient la Jordanie) tandis que Gaza est contrôlée par l’Egypte. Dans les territoires nouvellement conquis par Israël, de nombreux Palestiniens sont chassés. Ils sont contraints de se réfugier dans les états arabes voisins : alors que les juifs se rassemblent en Israël conformément au projet sioniste, on assiste donc en même temps au début de la diaspora palestinienne.Fait marquant

 Chrétiens et musulmans unis dans la défense d’Al-Aqsa

Les chrétiens palestiniens participent aux côtés des musulmans aux manifestations et autres sit-in à Jérusalem, démontrant ainsi leur solidarité avec leur cause. Des images  montrant Nidal Aboud, un jeune homme chrétien palestinien, lisant sa Bible au milieu d’une foule de musulmans faisant la prière du vendredi, le 21 juillet 2017, devant la mosquée d’Al-Aqsa à Jérusalem ont créé un buzz sur les réseaux sociaux. Les militants palestiniens ont vu les images comme un modèle de coexistence entre les musulmans et les chrétiens à Jérusalem et l’expression d’un sort partagé contre les mesures israéliennes dans la ville.