Le MTC se tourne vers la Cour suprême

Résiliation du bail du Champ-de-Mars

  • 4 000 emplois directs et indirects menacés

La décision de la Gambling Regulatory Authority de ne pas renouveler le permis d’opération du Mauritius Turf Club (Sports & Leisure) Ltd pour l’organisation des courses, suivie par la décision brutale de la mairie de Port-Louis de résilier le contrat de bail entre le Mauritius Turf Club et elle-même concernant le Champ-de-Mars, a entraîné un mécontentement généralisé dans le secteur hippique. Le MTC a déposé une demande d’injonction en Cour suprême, et de leur côté, les employés de ce secteur se disent « soucieux » de leur avenir, d’autant plus qu’ils n’ont pas touché leur salaire pour le mois d’avril.

La décision de mettre fin au contrat de bail du Champ-de-Mars, qui liait la mairie de Port-Louis et le Mauritius Turf Club (MTC) depuis le 2 juillet 2008 a été annoncée par la mairie le mercredi 27 avril.

À l’origine de ce conflit : la décision de la Gambling Revenue Authority (GRA) de ne pas renouveler le permis d’opération de la MTC Sports & Leisure Ltd (MTC(SL)), après que la MTC(SL) eut refusé les conditions imposées par la GRA pour lui octroyer ce permis. Conséquence : sans permis, la MTC(SL) ne pourra plus organiser les courses.

Deux des 25 conditions imposées par la GRA pour l’octroi du permis ont posé problème au MTC(SL), notamment que la MTC(SL) devra organiser les courses selon le programme de la ‘Horse Racing Division’ de la GRA, et que la MTC(SL) devra mettre ses infrastructures à la disposition de la Horse Racing Division sans aucune restriction lors de la journée des courses. Jean-Michel Giraud, président de la Mauritius Turf Club avait affirmé aux medias que le MTC avait affaire à des gens qui voulaient sa mort.

Puis, les choses avaient tourné au vinaigre avec la décision de la mairie de Port-Louis de résilier le bail du MTC en ce qui concerne le Champ-de-Mars, avec effet immédiat.

Dans une lettre en date du 27 avril adressée au MTC, la mairie de Port-Louis fait ressortir « […] taking into consideration of the urgency of the situation and as directed by the parent ministry, the Municipal City Council of Port-Louis is hereby formally informing the MTC that it is terminating with immediate effect the Concession de Privilège agreement over the whole of Champ de Mars and is resuming its full rights over the whole of Champ de Mars forthwith […]».

La lettre indique que « Consequently not being a licensed horse racing organiser by the GRA, the MTCSL is not legally in a position to organize any race meeting at the Champ de Mars ».

La mairie fait ressortir qu’en raison de la non-tenue des courses, elle ne percevra pas de revenus émanant de cette source. L’État sera aussi privé des revenus sous forme de « betting taxes ».

Pour toutes ces raisons, la mairie de Port-Louis a décidé de mettre un terme à cette ‘concession de privilège’, qui concerne tout le Champ-de-Mars.

Une telle décision, unilatérale et inattendue, est perçue comme une démarche politique de la part des autorités pour court-circuiter le MTC et la MTC(SL) en ce qui concerne l’organisation des journées hippiques à Maurice. La question qui vient à l’esprit dans le sillage de cette décision est « À qui profite une telle démarche ? »

Cette décision a causé une consternation dans le pays, voire un coup de massue sur la tête des turfistes, et bon nombre de personnes se demandent pourquoi une décision si hâtive a été prise, sans même avoir consulté le MTC pour des négociations. D’autant plus que le lien de concession entre la mairie et le MTC ne date pas d’hier.

Rappelons aussi que quelque 200 employés au Champ-de-Mars n’ont pas touché leurs salaires pour le mois d’avril. Une situation qui les rend soucieux car beaucoup sont des pères de famille qui ont des lourdes responsabilités financières. Aussi, selon certaines informations, 4 000 emplois, directs et indirects, seraient menacés. Qui plus est, cette décision survient dans un contexte de mécontentement populaire, dans le sillage des émeutes qui avaient secoué le pays.

Notons que le MTC a demandé en Cour suprême une injonction interdisant à la  mairie de Port-Louis de résilier le bail. Quelle sera la tournure éventuelle de ce conflit qui a maintenant pris une dimension juridique ? L’avenir nous le dira.

« Une décision illégale », dénonce le conseiller Mamade Khodabaccus

Suite à la décision de la mairie de Port-Louis d’annuler, avec effet immédiat, le contrat de bail entre elle-même  et le MTC en ce qui concerne le Champ-de-Mars, un conseiller de la mairie de Port-Louis, le Dr. Mamade Khodabaccus (également secrétaire-général du PMSD), dénonce comme « illégale » une telle démarche. Selon lui, la mairie aurait dû avoir l’aval du Conseil municipal avant d’adresser une lettre d’une telle envergure au MTC.

C’est ce qu’il a laissé entendre jeudi dernier lors d’une réunion houleuse du Conseil municipal. Prenant la parole, Mamade Khodabaccus a déclaré que cette affaire n’a pas été discutée au préalable au niveau du Conseil et que le maire n’a aucune autorité de mettre cette instance au pied du mur en agissant seul. Il a aussi indiqué qu’il n’y a même pas eu de négociations avec le MTC à ce sujet.

S’adressant au lord-maire lors de son intervention, le chef de file des Bleus au Conseil municipal a voulu savoir si un avis légal avait été sollicité auprès du conseiller juridique de la mairie. À quoi le maire a répondu par l’affirmative.

Toutefois, Mamade Khodabaccus estime que la mairie aurait dû tenir des négociations avec le MTC au lieu de prendre une telle décision de manière unilatérale.

Pour Mamade Khodabaccus, le lord-maire aurait dû convoquer une réunion urgente du Conseil municipal. « Selon les termes de la loi, le lord-maire a le pouvoir de convoquer une réunion urgente dans les trois heures qui suivent. Or, il a opté d’agir seul et de manière unilatérale en adressant une lettre au MTC leur annonçant une décision qui n’a pas été débattue au niveau du Conseil. C’est dans cette perspective que je qualifie d’illégale l’action du Lord maire », a renchéri le conseiller. L’intervenant a conclu en disant : « We do not want to be the rubber stamp of the minister ».

Rechercher l’aval du Conseil après cette décision unilatérale est comme « la tisane après la mort ». Il a aussi annoncé que le PMSD étudiera toutes les possibilités légales avant d’annoncer la marche à suivre.

Même si le maire a obtenu une majorité qui s’est montré favorable à cette décision, le conseiller Parwez Nurwoollah, du camp du gouvernement, qui a quant à lui exprimé ses « réserves » sur cette affaire. Il dit ne pas être d’accord avec cette façon de faire car avait été mis au courant de toute cette affaire quelques heures seulement avant la réunion du Conseil municipal. Pour lui, le maire aurait dû convoquer une réunion du Conseil pour en faire état et de venir ensuite avec une motion formelle. Connu pour son franc-parler, ce conseiller de l’arrondissement No. 2 de Port-Louis refuse ainsi d’être un « yes man ». 

Après la réunion du Conseil municipale, le lord-maire a tenu un point de presse lors duquel il a laissé entendre que cette décision était de nature urgente et qu’il ne pouvait pas attendre que le Conseil se penche dessus.

Selon ses dires, de par la lettre émanant du ministère de tutelle, il devait agir tout de suite. Pour lui, la mairie enregistrait un manque à gagner dans ses recettes étant donné que le MTC n’honorait pas le paiement de deux journées de courses.

ASH