Le Saint Géran a-t-il obtenu le permis EIA ?

Construction d’une jetée dans le lagon pour relier un îlot

  • Les pêcheurs et les plaisanciers se mobilisent contre ce projet qu’ils qualifient de « monstrueux »

Les pêcheurs, plaisanciers, les marchands de plage, ou voire ceux qui veulent simplement profiter de la plage, sont décontenancés. Bien qu’ils aient alerté les autorités dites compétentes quant aux travaux effectués par l’hôtel Le Saint Géran, leurs griefs sont restés lettre morte. Cet établissement hôtelier qui se trouve dans l’est du pays, selon eux, fait fi de l’environnement.

Sunday Times était à Poste-de-Flacq, plus précisément sur la plage menant à l’hôtel Le Saint Géran. Autour de nous, des plaisanciers et autres pêcheurs. Ils font la grise mine, non pas à cause des nuages gris et une mer quelque peu démontée, mais à cause des travaux qu’effectue l’hôtel Le Saint Géran. En effet, cet établissement est en train de subir un lifting complet depuis le mois de février avant de rouvrir ses portes vers la fin de l’année.

Or, ces travaux ne sont pas au goût de tout le monde. À l’instar de Vincent Moothoo, de l’Association des plaisanciers et Alain Hardy, président de l’Association des pêcheurs, les plaisanciers et les pêcheurs font cause commune contre la direction du Saint Géran.

Pour un constat de visu, Vincent nous invite à prendre place sur une vedette de plaisance. Après un trajet d’un peu plus de cinq minutes à bord de ce speedboat, nous nous retrouvons devant une vue sidérante. Le ponton dont parle Vincent se dresse devant nous sur une cinquantaine de mètres. Il relie la plage devant le Saint Géran à l’îlot Banane.

« On se demande si l’établissement a obtenu son Environment Impact Assessment (EIA) Licence pour ces travaux. On doute fort que ce permis a été délivré. Car ces travaux, plus précisément l’agrandissement de la plage devant l’hôtel et le ponton en phase de construction vont à l’encontre des lois sur l’environnement et des lois sur la gestion des côtes. Le Saint Géran est carrément en train de bousiller l’environnement », affirme Vincent.

« Autrefois, il n’y avait pas ce ponton d’accès et cet endroit, qui formait une piscine naturelle, était très prisé par les Mauriciens et surtout les touristes. Cette structure est aussi en train de détruire la vie marine en favorisant la formation de goémon. Même les touristes voient ce ponton d’un mauvais œil. Avant le lagon était bleu comme le ciel. Maintenant, nous voyons des grandes taches noires de goémon ».

Vincent ajoute qu’en temps cyclonique, les pêcheurs ainsi que les plaisanciers empruntaient une passe pour aller mettre leur pirogue ou autre vedette de plaisance à l’abri. « La passe a été détruite à cause de ces travaux. D’autant plus que de grosses pierres ont été jetées dans le lagon. Autour de l’îlot Banane, des femmes venaient récolter des huîtres et des moules. Elles gagnaient leur pain de cette façon. Ce n’est plus possible. D’autant plus qu’il y a toujours des policiers en faction sur la plage et sur le ponton à chaque fois qu’on s’y approche », déclare Vincent.

Ce dernier fait ressortir qu’il a consigné une déposition à la police contre la direction du Saint Géran en juin mais aucune action n’a été prise. « Un officier du ministère de l’Environnement devait venir faire un constat. Nous l’attendons toujours. »

Une tentative de soudoyer les pêcheurs ?

Quant au président de l’Association des pêcheurs, Alain Hardy, il déplore le fait que la direction du Saint Géran n’a montré aucun permis EIA aux pêcheurs. « Le General Manager Charles de Foucault a convié une soixantaine de pêcheurs à une réunion. Comme ces derniers ne savent pas lire, il les a fait signer un document en leur promettant Rs 1,2 millions. Les pêcheurs ont signé. Car ils croyaient que chacun allait toucher ce pactole. Or, ils n’ont eu que Rs 20 000 par tête de pipe, et cela sur quatre mois », affirme Alain Hardy.

Était-ce une compensation ? « C’est ce que nous nous sommes demandé. Charles de Foucault nous a fait comprendre que les Rs 1,2 millions étaient un présent. »