Liste rouge du CDC : « On serait surpris si Maurice recevait 100 000 touristes cette année »

Après que le Centre for Disease Control (CDC) américain nous a placé sur sa liste rouge en ce qui concerne la situation de covid-19, il convient de s’interroger sur l’impact que cela pourrait avoir sur le secteur du tourisme,  alors même que la réouverture de nos frontières était prévue pour ce 1er octobre.

Maurice est en fâcheuse posture avec son classement comme ‘Level 4: Covid-19 Very High’ par le US Center for Disease Control (CDC), cela depuis le lundi 13 septembre. Les destinations qui entrent dans cette catégorie ont enregistré plus de 500 cas de covid-19 pour 100 000 habitants au cours des 28 derniers jours, selon les critères du CDC. Le site du CDC décourage les gens de voyager vers Maurice. « En raison de la situation actuelle à Maurice, même les voyageurs entièrement vaccinés peuvent être à risque de contracter et de propager des variantes de covid-19 », fait-on ressortir sur le site.

Tout ceci alors que l’ouverture de nos frontières est prévue dans moins de deux semaines…

Quelles répercussions sur les arrivées touristiques alors que cette information a été reprise sur les chaînes internationales telles que CNN ou l’AFP, entre autres ? Est-ce que nous arriverons à atteindre l’objectif de 350 000 arrivées de touristes d’ici fin décembre 2021 ou 650 000 d’ici juin 2022 ? Selon les chiffres de Statistics Mauritius, pour le mois de juillet, 1 242 touristes ont foulé le sol mauricien, tandis que pour août, il y a eu 2 499 touristes. Au total, 3 741 voyageurs sont venus dans le pays depuis l’ouverture partielle de nos frontières.

D’autres facteurs jouent contre Maurice

Ajay Jhurry, président de l’Association of Tourism Operators, ne veut pas utiliser pas le mot ‘décourageant’ mais indique plutôt que ce classement de Maurice fera les touristes réfléchir où ils voudront voyager avant de quitter leur maison. « Quand vous quittez votre maison pour vos vacances, vous souhaitez rentrer chez vous sain et sauf», souligne-t-il. Il est d’avis que cette information, qui circule sur le plan international aura définitivement un impact.

Le ‘Managing Director’ de Tourism Business Intelligence, Sen Ramsamy partage le même avis qu’Ajay Jhurry. « Cela aura définitivement un impact. Mais quel genre d’impact ? Cela relève de notre stratégie de marketing et de promotion, ainsi que des autres mesures qu’on doit prendre par rapport à ce nouveau classement », analyse notre interlocuteur.

Ce dernier devait toutefois faire ressortir que les pays concurrents de Maurice en matière touristique se retrouvent sur la même liste. Ce qui est important, selon Sen Ramsamy, c’est de prendre les mesures nécessaires et d’inciter la population à ne pas baisser leur garde, faisant référence à ce relâchement qu’on voit dans la population locale.

D’autre part, l’économiste Vinay Aucharaz pense lui aussi que cela affectera de façon certaine les arrivées touristiques dans le pays. « Quand un touriste décide de passer ses vacances, l’un des facteurs qu’il prendra en considération, c’est le niveau de risque que présente un pays. Il se tournera vers des statistiques fiables, dont parmi le classement du CDC », indique-t-il.

Pour lui, c’est extrêmement grave car les touristes européens vont définitivement voir ces données. L’économiste estime que cela fera beaucoup de tort au pays. Pour lui, il est extrêmement probable que ces touristes décident de se tourner ailleurs.

Qu’en est-il du plan du gouvernement d’attirer 350 000 touristes d’ici décembre 2021 et 650 000 touristes jusqu’à juin 2022 ? Se basant sur les statistiques pour les mois de juillet et d’août, il conclut qu’on a attiré moins de 10 000 touristes.

Même si octobre, novembre et décembre constituent la ‘peak season’ touristique, l’économiste pense que cela paraît impossible d’atteindre l’objectif du gouvernement. « Je serais agréablement surpris si Maurice reçoit 100 000 touristes pour cette année-ci, avec les facteurs qui jouent contre le pays actuellement », prédit-il.

Selon lui, le classement du CDC n’est pas le seul facteur qui joue contre Maurice. Ainsi, les vacanciers pourront opter pour des ‘short-hold destinations’, c’est-à-dire une destination présentant moins d’heures de voyage et de transits, où ils seront plus exposés à la pandémie. Or, Maurice, malheureusement, ne compte pas parmi ces ‘short-hold destinations’, du point de vue européen.

Pour sa part, l’économiste Pierre Dinan fait ressortir que rien n’est caché aujourd’hui et qu’il est fort possible pour les touristes européens de prendre connaissance de ce classement de Maurice. « Ce n’est pas une nouvelle réjouissante », devait-il ajouter.