Mauritius Fire and Rescue Services : Quand le QG délabré des pompiers met leur vie en danger

  • L’immeuble à la rue Deschartes possède-t-il un ‘Fire Certificate’ en bonne et due forme ?

Les grosses pluies du lundi 10 décembre ont permis de révéler au grand public trois choses principales. Le manque de drains dans divers endroits, les dangers du réchauffement climatique mais également le pétrin dans lequel se trouvent nos amis les pompiers, qui travaillent soit à la caserne des pompiers de Port-Louis soit à l’immeuble bleu de la rue Deschartes qui abrite le bureau administratif de la Mauritius Fire and Rescue Services. Une vidéo qu’un internaute nous a fait parvenir lundi et que nous avons postée sur notre page Facebook a tout déclenché. Nous avons été à la recherche d’informations dans cette affaire, et les faits présentés devant nous sont troublants !

Marwan Dawood

Pendant qu’ils sont présents sur le terrain en temps de grosses pluies à évacuer les maisons dans chaque coin et recoin du pays, un mal se cache au sein de la communauté des sapeurs-pompiers de l’île Maurice. On nous a toujours dit qu’être pompier était un métier risquant, cela nous le savons tous, mais risquant sur le terrain et non pas dans les locaux que les pompiers occupent ! Ces locaux sont supposément là pour assurer la sécurité de ceux qui luttent contre le feu et les inondations, au service de la population. Ce mal, qui couve au sein de la caserne de Port-Louis et dans l’immeuble administratif de la Mauritius Fire and Rescue Services (MFRS), est le signe même que les pompiers sont les enfants pauvres du Service civil.

La quête vers l’information nous mène à un rapport, suite à une étude effectuée par le ministère de du Service civil récemment sur l’aspect Health & Safety concernant l’immeuble de la MFRS à la rue Deschartes. Ceux qui ont travaillé sur ce rapport le savent : les findings sont brûlants. Tellement brûlants que le rapport a été rangé dans un tiroir au ministère du Service civil pour ne pas mettre le feu aux poudres. «Tellement brûlants que même les hauts gradés de la MFRS ne sont pas en possession du rapport », apprend-on d’une source proche du dossier.

En l’absence de ce rapport qui n’a pas été rendu public, nous avons été contraints de trouver d’autres façons pour faire un constat de la situation prévalant au sein du quartier général de la MFRS à Port-Louis. Incursion donc dans le quartier général… On n’a pas besoin attendre longtemps pour connaître les appréhensions des pompiers et autres officiers qui travaillent sur place. Leur crainte principale : un risque permanent d’électrocution. Il faut savoir que l’immeuble date de plusieurs années et en temps de pluie, la toiture fuit. « Nous ne pouvons travailler. Ici, nous avons le service 115, un service nécessaire pendant les grosses pluies. C’est ici que nous recevons les appels provenant du public à travers le pays. Quand il pleut, nous avons l’impression d’être à découvert, il faut mettre des seaux ou autres récipients pour empêcher le plancher d’être inondé », explique un employé des lieux.

Dans le couloir donnant sur l’entrée du bâtiment, un panneau jaune sur lequel est écrit CAUTION, WET FLOOR attire l’attention. On pourrait croire que le couloir vient d’être nettoyé, mais il suffit de soulever la tête pour trouver un énorme trou dans le plafond en bois, à travers lequel l’eau s’égoutte (voir photo 1).  À l’intérieur de ce trou, des installations électriques d’une lumière qui se trouve non loin. Quelques pas plus loin, des fils électriques recouverts de goémon, signe d’humidité (voir photo 2).

On se rend aux étages supérieurs. Même constat. Le bâtiment en entier subit les effets de l’humidité. De plus, la ventilation est très mauvaise, laissant stagner une forte odeur d’humidité. « Nous sommes contraints de travailler dans un lieu où les climatiseurs sont plus souvent en panne qu’opérationnel. Et après, on s’étonne que de nombreux officiers tombent malade », explique un habitué des lieux.

Ascenseur certifié ou pas ?

Prendre les escaliers, il paraît que cela permet d’économiser l’énergie, mais au quartier général des pompiers, ils sont nombreux qui prennent les escaliers par obligation ou par peur, car l’ascenseur ne les rassure guère. Ces peurs se confirment par les sons que produisent ce cagibi. Le grésillement de la porte, l’obscurité à l’intérieur et, bien évidemment, l’état délabré dans lequel elle se trouve (voir photo 3)… Par ailleurs, des questions sont soulevées par rapport à la certification de l’ascenseur. Plusieurs sources expliquent qu’il ne serait tout bonnement pas certifié. Cette liste, non exhaustive, décrit un peu la situation dans laquelle vivent les employés de la MFRS.

Fire Certificate valide ou pas ?

L’état du bâtiment suscite ainsi des interrogations. Une chose nous intéresse, notamment le Fire Certificate du quartier général de la MFRS. Selon nos informations, ironiquement, l’instance responsable d’octroyer les Fire Certificates, ne serait pas elle-même en règle ! Une information que personne ne souhaite confirmer.

Une chose est sûre : en ce qui concerne les employés travaillant sur place, ils sont en surnombre, donc à l’encontre de ce que préconise la loi dans un si petit espace.

 

« Enough is enough! », dit le syndicat

Ashraf Buxoo, président de la MFRS Employees Association, monte au créneau pour dénoncer le gouvernement qui ne bouge pas d’un iota sur ce sujet aussi important. « Je demande à la VPM, Fazilah Daureeawoo, d’assumer ses responsabilités. Nous ne pouvons continuer à mettre la vie de ces employés à risque. Il doit avoir une vraie volonté politique à ce sujet. Le quartier général doit bouger pour un endroit plus adapté aux exigences modernes du service », dit le syndicaliste. Ce dernier juge qu’il est « inacceptable que des personnes soient obligées de travailler dans de telles conditions. En 2014, le ministère des Infrastructures publiques avait demandé à ce que la caserne des pompiers à Port-Louis soit démolie. Pourquoi rien n’a été fait ? », se demande Ashraf Buxoo.