Nouvelles restrictions anticovid : Une incohérence en ce qu’il s’agit des lieux de culte ?

Les nouvelles mesures qui ont été annoncées par le chef du gouvernement, Pravind Jugnauth, dans la soirée du jeudi 11 novembre et qui ont pris effet dès le lendemain suscitent une certaine controverse chez les religieux. Ces derniers se posent des questions sur un aspect a priori irrationnel de ces mesures, à l’effet que les rassemblements, les mariages et les funérailles pourront accueillir un maximum de 50 personnes, alors que les lieux de culte ne pourront accueillir que 10 personnes.

Selon ce qui a été annoncé par le Premier ministre, en ce qui concerne les rassemblements et autres réunions (publiques et privées), il pourra y avoir un maximum de 50 personnes. Idem pour les mariages et les funérailles, avec un maximum de 50 personnes. Toutefois, les familles devront avoir au préalable l’autorisation de la police. Là où le bât blesse : en ce qui concerne les lieux de culte, il ne pourra y avoir que 10 personnes, avec un respect strict des règles sanitaires. De nombreux prêtres, musulmans, hindous et catholiques, affichent ainsi leur désaccord avec la décision du gouvernement.

Le maulana Shamim Khodadin, président du Sunniy Ulama Wal Aimmah Council (SUWAC), souligne d’emblée qu’il n’est pas d’accord avec cette décision du gouvernement. Il a ainsi adressé une lettre au chef du gouvernement de revoir les nouvelles mesures qui ont été mises en place. « C’est une bonne chose de prendre des décisions pour le bien-être du pays. Nous ne sommes pas contre les mesures sanitaires qui ont été mises en place. Mais nous ne sommes pas d’accord avec cette décision selon laquelle les lieux de culte ne pourront accueillir que 10 personnes, alors que dans les rassemblements, les mariages et les funérailles, il pourra y avoir une cinquantaine de personnes », dit-il.

Il explique que les mosquées ont la capacité d’accueillir un maximum de 200 personnes, et cette restriction d’uniquement 10 personnes sur les lieux de culte est une décision « inacceptable et injustifiée ». Il ajoute que les ablutions, comme se laver les mains et les pieds avant de pénétrer un lieu de culte, sont obligatoires. Il maintient également que les gestes barrières sont scrupuleusement respectés par tous les dévots. De ce fait, selon lui, les lieux de culte présenteraient des risques moindres en ce qui concerne la propagation de la covid-19. Il lance ainsi un appel au Premier ministre de revoir cette décision.

Le pandit Neelkanth est d’avis que dans l’ensemble, les mesures annoncées sont bonnes, mais si pour un rassemblement, un mariage ou des obsèques, le gouvernement peut autoriser une cinquantaine de personnes, pourquoi ne peut-il pas autoriser 50 personnes dans un lieu de culte ? « Les autorités auraient pu permettre une cinquantaine de personnes d’accéder aux lieux de culte, tout comme pour les mariages, les funérailles ou les rassemblements », nous dit-il.

Le pandit ajoute que cela incommodera beaucoup de personnes qui ont l’habitude de venir faire leurs prières dans les lieux de culte en compagnie des membres de leur famille.

Pour lui, si les autorités ne peuvent pas, ou ne voudront pas, revoir cette décision, elles devront alors n’autoriser que 10 personnes durant un mariage ou durant des funérailles ou durant tout autre rassemblement, comme on l’avait fait au début de la pandémie.

Il lance lui aussi un appel aux autorités de revoir cette décision car il estime que c’est une « injustice » qui se fait à l’encontre des dévots des différentes confessions.

Le père Labour, vicaire-général de l’Eglise catholique, dit lui aussi qu’il n’est pas d’accord avec la décision du gouvernement. Dans un communiqué émis par le diocèse, les messes dominicales (qui comptent comme des rassemblements) pourront accueillir un maximum de 50 personnes. Les paroissiens sont invités à s’inscrire auprès du secrétariat de la paroisse pour pouvoir assister à une messe. 50 personnes seront admises aux mariages et aux enterrements dans les églises. Il revient aux familles concernées d’en informer la police de la localité. Cependant, selon les directives du gouvernement, un maximum de 10 personnes sera admis dans les grottes ou dans le caveau du Père Laval.

Maulana Haroon

« Que chaque citoyen prenne ses responsabilités »

Sollicité pour une réaction concernant la décision de restreindre le nombre de personnes à 10 dans les lieux de culte, le Maulana Haroon a déclaré d’emblée que les autorités se trouvent en pleines contradictions dans la façon dont elles communiquent avec la population.

Pour le Maulana, devant une telle situation, les Mauriciens ont tendance à banaliser ce qui se passe dans le pays. Rejoignant les autres dignitaires religieux, il s’insurge que les mariages ou autres cérémonies peuvent accueillir 50 personnes, les bus, 60 personnes, les malls, foires, marchés, en toute liberté, alors que seules 10 personnes sont autorisées à se rendre dans un lieu de culte. Où est la logique, se demande-t-il.

L’officiant religieux trouve cela anormal et demande aux autorités de revoir leurs communiqués par dix fois avant de les publier.

Dans la même foulée, le Maulana Haroon demande à ses coreligionnaires d’éviter de quitter leurs demeures, d’assumer leurs responsabilités et de prendre conscience du danger qui nous guette.