On reconnaît un leader dans la tempête !

Un leader qui comprend non seulement les besoins de son peuple en situation de crise et qui a une maîtrise du fonctionnement de l’économie fait tout pour éviter une catastrophe sociale. En même temps, il sème les graines pour une reprise éventuelle dans les meilleures conditions, une fois la crise passée.

« Nous sommes en guerre. En guerre sanitaire certes… nous ne luttons ni contre des armées ni contre une autre nation. Mais l’ennemi est là, invisible, et il progresse. » Ce sont là les mots d’Emmanuel Macron, qui a fait une série d’annonces en adoptant un ton digne d’un général le lundi 16 mars.

« Aucune Française, aucun Français, ne sera laissé sans ressource », a annoncé Emmanuel Macron. Comprenez par là : report de charges fiscales, soutien au report des échéances bancaires, garanties de l’État à hauteur de 300 milliards d’euros… « Dès demain, les factures d’électricité, de gaz et les loyers seront suspendues », a précisé le président français en parlant des PME en difficulté. « Aucune entreprise ne sera livrée au risque de faillite », a-t-il assuré.

En contraste, l’on a assisté à un piteux débat à l’Assemblée nationale ce lundi où les différends politiques ont pris le dessus, avec le cinéma habituel qu’est devenu notre Parlement. Le ministre des Finances n’a pas trouvé mieux que de lancer une pique au ‘stimulus package’ institué sous Sithanen. Ce package, dans la conjoncture de l’époque, c’est-à-dire une crise économique mondiale (2008) entrainée par les ‘subprimes’ aux États-Unis, était un pas dans la bonne direction. On sait que c’est son application qui a été un échec. A-t-on réellement tiré les leçons de ce qui a marché et ce qui ne l’a pas été avant de faire des reproches ?

Le gouvernement a fait la sourde oreille aux appels des différents leaders politiques de fermer nos frontières. Mais l’inévitable s’est tout de même produit. Le principal marché touristique de Maurice, la France, a adopté une politique de confinement à partir de mardi. Donc ZÉRO touriste français.

Au lendemain de l’allocution du président Macron, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a annoncé une aide de 45 milliards d’euros pour les entreprises et les salariés.

Avec ou sans cas de Covid-19, les conséquences socioéconomiques sont évidentes et inévitables pour le pays. Il suffit tout simplement de suivre l’actualité et de faire preuve de clairvoyance. Si l’on est aveugle ou si l’on ignore encore ce que nous réserve la pandémie, qu’on ait au moins l’humilité de se faire guider ! Mettons l’ego de côté ! Ce combat, c’est celui d’une nation et non celui d’un gouvernement uniquement.

On a vu, lundi au Parlement, certains soutenir bec et ongles l’argument que nous ne sommes pas concernés avec les mesures prises par d’autres pays. Comme si leurs problèmes n’étaient pas similaires aux nôtres ! Et donc, on ne peut faire ce que les autres font !

Non messieurs, vous faites fausse route !On n’attend pas de vous que vous fassiez ce que les autres font. Mais au moins ayez l’humilité de tirer les leçons de ce qui se passe ailleurs afin d’y voir plus clair. Vous ne rassurez pas du tout ! Vos plans sont largement insuffisants autant en matière de mobilisation de fonds pour préparer la guerre contre l’ennemi’Covid-19’ que dans la manière dont vous aurez à livrer bataille.

On a entendu le ministre des Finances affirmer, en réponse au leader de l’opposition, que l’argent est destiné aux vulnérables. Qui sont les vulnérables lorsque le pays se retrouve en état d’urgence et face à un cas de force majeure, comme le nouveau Covid-19 ? Une telle situation ne pouvait évidemment pas être prédite au moment où les différentes parties, clients/fabricants, créanciers/débiteurs entre autres, ont consenti à des accords.

Les vulnérables, ce sont tous les acteurs économiques du pays et pas seulement ceux qui sont au bas de l’échelle ! Les vulnérables, ce sera aussi vous, messieurs les ministres et députés, lorsque les pourvoyeurs d’emplois auront été emportés par la crise car vous ne les avez pas protégés contre les banques qui, tels des vampires, séviront à la première occasion pour recouvrir ce qu’elles peuvent. Cela, sans se soucier des salariés et de l’économie.

C’est à ce moment que vous comprendrez qu’il y a un prix à payer pour la paix sociale !

En bon général, Macron a assuré sans équivoque 300 milliards d’euros comme garantie de l’État aux dettes des entreprises. Il rassure tout le monde. Il sait que seul l’État a le pouvoir de gérer une telle crise. Il assume ! Il rassure ses soldats (le personnel soignant) et prend en charge leurs soucis familiaux. Il réquisitionne hôtels, taxis, crèches… Voilà les méritesd’un vrai général en période de guerre.

Pourquoi n’a-t-on, par exemple, pas réquisitionné un hôtel comme Holiday Inn, qui se trouve à proximité de l’aéroport et qui a 140 chambres, pour mieux gérer la situation et donner un traitement décent à tous nos citoyens et visiteurs ?

Pourquoi n’a-t-on pas organisé un système de confinement/quarantaine à résidence ? De toute façon, en cas de crise pandémique, les facilités de l’État et autres hôpitaux ne suffiront pas, comme l’a si bien dit l’épidémiologiste Dr Caussy. On aurait été bien obligé d’avoir recours à un tel système. Et pourtant, l’on n’a pas trouvé mieux que d’insulter son expérience et son intelligence… comme on préfère emprisonner des pauvres habitants de Quatre Sœurs, soucieux de leur sécurité, pour avoir manifesté contre l’implantation d’un centre de quarantaine dans leur région.

Dans ce cas précis de pandémie de coronavirus, ne parlons pas de ‘stimulus package’ ! C’est bel et bien un ‘Sustainability Package’, pour ne pas dire un ‘Survival Package’, que le pays a besoin. Sans quoi, vous risquez de prendre en pleine figure une crise sociale sans précédent alors que le pays peinait déjà avec ses dettes de 320 milliards de roupies, un déficit commercial de 122 milliards de roupies et une croissance largement insuffisante, essentiellement basée sur la consommation et les méga-constructions entreprises par l’État.

La France est allée plus loin en déclarant la situation comme « force majeure » sous l’article 1218 du code civil, compte tenu de l’importance mondiale de l’épidémie et des conséquences présentes et à venir sur tous les secteurs de l’économie. Ce qui amène tous les acteurs du système, en particulier les banques, à réfléchir sur la manière dont ils devront participer afin de surmonter cette période difficile et préserver les pourvoyeurs d’emplois.

Mais vous ici, qu’avez-vous fait ? Puiser Rs 18 milliards des réserves de la Banque de Maurice (BOM) pour mettre une grande partie en dépôt dans une banque commerciale et percevoir des intérêts afin de financer vos promesses électorales, comme la pension de vieillesse et autres avances aux fonctionnaires !

Cela a été fait alors que la loi l’interdit formellement. La section 47(5)(b) de la Bank of Mauritius Act est sans équivoque. Ce fonds de réserve ne peut être utilisé par la BoM « uniquement et strictement » que pour les besoins de la politique monétaire et le paiement des dettes externes du gouvernement.

Voilà ce que dit la section 47(5)(b) de la Bank of Mauritius Act…

(5) Funds out of the Special Reserve Fund may be used, only and strictly, in the following order of priority – (a) …. (b) by the Bank, in exceptional circumstances and with the approval of the Board – (i) for monetary policy purposes; (ii) for repayment of central government external debt obligations, provided that this is not likely to adversely affect the efficient discharge by the Bank of its functions under this Act .

Il est illégalde puiser de ces réserves, de mettre l’argent en dépôt et d’utiliser les intérêts pour payer vos besoins courants. C’est comme un père de famille qui annule un dépôt fixe en banque pour acheter un gadget/portable à son enfant.

Les réserves de la BOM doivent servir pour des imprévus messieurs, comme celui auquel nous faisons face actuellement. Pendant ce temps, la roupie a déprécié de 6,5% rien qu’en une semaine. Le dollar qui valait Rs 37,25 le 10 mars valait Rs39,70 le 18 mars. Crise économique mondiale diriez-vous ? Non ! Les réserves servent à soutenir l’économie et préserver le pouvoir d’achat du peuple pendant des tempêtes ou en temps de ‘guerre’.

En l’absence de réserves propres pour financer votre plan, vous ne trouvez pas mieux qu’une action imprudente que la diminution du ‘cash reserve ratio’ des banques, c’est-à-dire l’argent des épargnants que les banques mettent en garantie auprès de la BOM.

Vous n’avez plus de marge de manœuvre. Vous n’avez pas d’autre choix que d’emprunter car ce n’est pas 9 milliards de roupies dont vous aurez besoin, c’est plusieurs dizaines de milliards, dépendant de la durée de la crise. Il faut donc prier pour qu’il soit le plus court possible. Il faut être prêt et affronter la vérité en face.

Pouvez-vous vous tourner vers le Fonds monétaire internationale et la Banque mondiale ? Que diront ces deux organismes après la saga des Rs 18 milliards puisées des ‘Special Reserve Fund’ de la BoM.

Et quid des procédures d’acheminement d’aide ? Sont-elles en place ? Prenez garde à ne pas jouer aux pompiers absents pendant que l’incendie fait des ravages !

Les dégâts peuvent être limités à tous les niveaux et la relance préparée dans les meilleures conditions qu’avec des hommes la qualité qui dirigeraient la politique du pays et les institutions. Cessez de chercher des boucs émissaires et des excuses pour cacher la stupidité et l’incompétence ! Entourez-vous, avant tout messieurs, de patriotes qui ont les compétences appropriées pour éviter le pire !

Acceptez de donner à la différence sa juste valeur et non la mépriser.

Le président français Emmanuel Macron a non seulement conquis, mais a aussi rassuré et inspiré le peuple français dans le combat contre le Covid-19. C’est une leçon magistrale de leadership.

À bon entendeur salut !

Balkrishna Caunhye