« Où est le changement promis ? » s’interrogent les Mauriciens. Les doutes, les craintes, la colère, et l’exaspération s’empilent. Hélas, beaucoup de nos compatriotes ne comprennent pas que le changement ne s’opère pas à coup de baguette magique. Et que la baguette magique elle-même n’existe pas. Rien ne peut changer en une nuit. Les transformations significatives – qu’elles soient personnelles, sociales, économiques ou politiques – nécessitent du temps, de la patience et de la persévérance. Cette réalité peut parfois être frustrante, surtout dans notre époque où l’immédiateté est valorisée. Pour pouvoir voir et comprendre le changement, il faut alors qu’il y ait d’abord un changement de mentalité.
Le changement, dans le contexte actuel, commence surtout par la prise de décisions difficiles, voire impopulaires. Le Premier ministre l’a clairement dit : la réforme de la pension de vieillesse n’est pas un choix mais une nécessité, car le système actuel est devenu insoutenable. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les dépenses liées à la pension de vieillesse sont passées de 1,9 % du PIB en 2010 à 7,8 % en 2025, atteignant Rs 55,4 milliards cette année et risquant de dépasser Rs 100 milliards en 2035. Avec une population vieillissante et un ratio de travailleurs par retraité en chute libre, nous faisons face à une menace réelle pour la stabilité financière du pays et la sécurité de nos aînés.
Mais il est essentiel de rappeler pourquoi nous en sommes là. Le gouvernement précédent, sous Pravind Jugnauth, a laissé un véritable chaos financier derrière lui : des déficits budgétaires chroniques, une dette publique qui explose, des emprunts à répétition pour financer des projets mal planifiés, parfois inutiles, tout cela au détriment des générations futures. On ne peut pas oublier les milliards gaspillés dans des projets sans retombées claires, les surfacturations, le manque de transparence dans l’octroi des contrats, et les emprunts massifs qui n’ont fait qu’alourdir le fardeau de notre dette.
Aujourd’hui, ceux qui clament que « la caisse n’est pas vide » sont précisément ceux qui l’ont pillée par des gaspillages et une mauvaise gestion, et qui osent donner des leçons alors qu’ils ont contribué à la situation alarmante dans laquelle nous nous trouvons. Nul ne souhaite devenir impopulaire par choix, mais il s’agit aujourd’hui d’un mal nécessaire pour le pays, et pour ceux-là mêmes qui refusent de voir la réalité en face. C’est cela aussi le changement : avoir le courage de prendre des décisions difficiles pour protéger l’avenir de tous, même lorsque ces décisions sont douloureuses. Gouverner, ce n’est pas fuir ses responsabilités pour plaire à court terme, c’est agir avec lucidité et responsabilité pour ne pas condamner le pays à l’effondrement demain.
Il y a eu ces dernières années, une surenchère concernant le montant de la pension. Nos aînés ont été les principales cibles de mesures électoralistes. Il est évident que cela ne pouvait continuer. La décision de réformer la pension et de graduellement augmenter l’âge de l’éligibilité est une mesure difficile, et a peut-être péché par un manque d’explication et de préparation au préalable de l’opinion publique, mais c’est une mesure responsable. En parallèle, le gouvernement a démontré qu’il sait être à l’écoute en mettant en place un soutien aux plus vulnérables avec un revenu de Rs 10 000 pour ceux qui atteignent 60 ans, assurant qu’aucun Mauricien ne sera abandonné dans cette transition.
Il est temps de refuser l’hypocrisie politique et d’assumer la vérité : sans réforme, demain il n’y aurait plus de pension, ni pour les retraités d’aujourd’hui, ni pour ceux de demain. Il est temps de protéger nos aînés avec un système viable, tout en tirant les leçons des gaspillages d’hier. Ce n’est qu’en combinant compassion, responsabilité et courage que nous pourrons garantir une retraite digne aux générations futures, sans tomber dans les erreurs des gouvernements passés qui ont sacrifié l’avenir pour leurs intérêts politiques immédiats.