Ils ne savent plus vers qui se tourner pour attirer l’attention sur les dangers potentiels que représente la construction par Desbro Trading Ltd d’une usine de production de fertilisants à quelques mètres seulement de leurs maisons.  Regroupés au sein du Collectif Pour le Bien-être de Pointe aux Sables, les habitants de ce petit village côtier non loin de la capitale craignent le pire. Après avoir dénoncé une fonderie pour pollution, ils remettent ça et s’engagent dans une guerre sans merci pour la protection des leurs mais aussi de l’environnement de leur quartier. 

Marwan Dawood

Depuis quelques semaines déjà, des travailleurs bangladais occupent un dortoir sur le terrain d’une superficie de deux arpents sur lequel Desbro Trading Ltd compte construire une usine de production, de stockage et de distribution de fertilisants.  Alors que les travaux viennent de commencer, les habitants démontrent déjà une crainte terrible face aux dangers que représente ce type de développement pour la santé humaine et l’environnement.  Pour eux, ce développement est comme un volcan sur lequel ils s’assoient.  Pourtant, la compagnie a déjà eu le feu vert du ministère de l’Environnement et avec son EIA en poche, Desbro Trading Ltd, va de l’avant avec son projet.

Ce fameux rapport justement fait état de la construction par DTL des infrastructures visant à stocker des produits chimiques industriels pour le textile, de qualité alimentaire, des solvants organiques, des fertilisants, pesticides, fongicides et surtout les résines plastiques.  Pire, le document révèle que DTL envisage également d’implémenter une unité de production et de mélange de NPK (azote, phospore et potassium) pour  fabriquer des fertilisants comme le Glyphosate ou le très toxique Lamdacyhalothin.  Selon nos informations, le site comprendra également d’un abri ouvert pour la dilution des produits chimiques.  Ce n’est qu’en tout début de cette année que le projet fera surface et les habitants prendront connaissance à la suite des rumeurs dans le quartier.  Mais ce n’est qu’en mai 2018 que la compagnie obtiendra sa licence EIA comme le démonte le site du ministère de l’Environnement.  Toutefois, le ministère de l’Environnement affirme dans ce document que DTL devra entre autres obtenir une licence du Dangerous Chemical Control Board du ministère de la Santé et d’un Fire Certificate du Mauritius Fire and Rescue Service. À l’heure où l’EIA Licence a été octroyée, DTL n’avait pas ces autres permis.

«Nous ne pouvons plus continuer à vivre dans la peur qu’un jour où l’autre nous allons nous faire cramer par un accident industrielle que ce soit avec ce projet ou un autre. Les autorités octroient des terrains, des licences et tout cela sans prendre en compte la santé des habitants.  Si on nous demande de partir, où partirons nous ?  Nous avons investi dans nos maisons, il n’y avait pas tout cela avant. Nous sommes ici depuis trop bien longtemps et nous n’allons pas accepter de nous sacrifier pour que les autres se fassent de l’argent », disent les habitants concernés.  Par ailleurs, DTL affirme elle que le projet est sans risque. «Il n’y aura pas d’effluve chimique dans l’air », affirme un représentant.

Si les défenseurs du projet affirment que la situation géographique du site se trouve dans la zone industrielle par rapport aux autres, pas une seule fois sa proximité avec deux quartiers résidentiels n’est mentionnée.  Sur le terrain, on constate qu’effectivement le site est à la limite de deux quartiers hautement résidentiels dont Morcellement Rey et Morcellement Petit-Verger.  Desbro Trading Ltd opère actuellement à St-Pierre où le gouvernement mise sur la construction de deux Smart City à Moka et à Côte d’Or. «Là-bas Smart City, ici Pollution City…Nous sommes tentés de baptiser Pointe aux Sables, Cancer Village », disent les membres du Collectif.

 

Situation inhumaine pour les travailleurs étrangers

Sur place nous constaterons que le petit bâtiment s’avère être un dortoir pour des travailleurs bangladais sur le site et sont au nombre de 4 ou 5 employés.  Cependant ils sont dépourvus de facilité sanitaire et doivent prendre leur douche en plein air avec un tuyau de la CWA qui traine sur le site… Voir images.
Les accidents au NPK qui ont retenu l’attention

France – Nantes1987 – 850 T d’engrais NPK 15-8-22, stockés dans un entrepôt du port, ont fait l’objet d’une DAE, initiée par une source électrique, pendant plusieurs heures. Le développement d’un épais nuage toxique jaune, sur 10 Km a incité le Préfet à faire évacuer 70 000 personnes.

France St Nazaire2002 – Le chargement de 2 700 T d’engrais NPK 15-12-24 du cargo « DENEB », apponté au port de St Nazaire, a fait l’objet d’un phénomène de DAE, initié par un projecteur. Le développement d’une épaisse fumée blanchâtre a incité le Préfet à faire confiner 10 000 personnes.

Espagne – (2007) – Le chargement de 6 000 T d’engrais NPK 15-15-15 du cargo hollandais « Ostedijk », a fait l’objet d’un phénomène de DAE, initié par point chaud (serpentin chauffant), au large des côtes espagnoles. La décomposition a duré plusieurs jours, le cargo a fait l’objet d’une quarantaine au large avant d’être autorisé à accoster au port de Bilbao.

Brésil – (2013) – Le 24 septembre un stockage de 10 000 T d’engrais à base de nitrate d’ammonium, dans le dépôt du terminal ferry de São Francisco do Sul, a fait l’objet d’un phénomène de DAE. L’émission d’un nuage jaune orangé épais pendant plusieurs heures a nécessité l’évacuation de plusieurs quartiers exposés aux fumées, puis de la ville entière