Par Zahira RADHA
Q : La crédibilité de Vishal Shibchurn est mise en cause en raison de ses antécédents avec la justice. Mais peut-on balayer d’un revers de main l’affidavit qu’il a juré sous serment ?
Nous connaissons bien sûr son passé et ses antécédents. Mais je ne pense pas que quelqu’un viendra de l’avant pour dire qu’il connait qui sont les assassins de Soopramanien Kistnen sans qu’il n’ait d’inside information ou qu’il ait fréquenté un camp mafieux. Il dit même avoir reçu des menaces de la part d’un officier de police. Il a fait allusion à des tentatives de blocage malgré ses précédents courriers.
Bien sûr, il faut les prendre avec une pincée – pour ne pas dire une poignée – de sel, mais ce n’est évidemment pas à nous, les citoyens, de le décider. Il faut qu’il y ait une enquête. Il y a un système qui prévoit si ce témoignage peut être retenu ou pas : c’est le Directeur des Poursuites Publiques (DPP), après avoir pesé le pour et le contre. Il faut voir comment ce témoin s’est comporté dans le box et s’il a passé le test de cross-examination. Ce n’est qu’à ce moment-là qu’on peut dire s’il est crédible ou pas.
Q : Que pensez-vous des déclarations du Premier ministre et de l’Attorney General qui disent que c’est un tissu de mensonges et un complot politique sans même qu’il n’y ait encore eu d’enquête ?
On ne peut pas écarter cette possibilité, d’autant que l’avoué de Vishal Shibchurn serait candidat dans la circonscription du Premier ministre aux prochaines élections. Mais en même temps, je tiens à rappeler que le Premier ministre avait déjà innocenté Yogida Sawmynaden avant de devoir accepter la démission de ce même Yogida Sawmynaden par la suite. D’ailleurs, ce dernier a été sérieusement mis en cause durant les travaux de l’enquête judiciaire sur la mort de Kistnen.
Cet affidavit contient des éléments troublants, surtout sur les circonstances dans lesquelles des photos compromettantes de Mme. Kistnen se sont retrouvées dans le domaine public. M. Shibchurn a avoué que c’est lui qui a transmis ces photos à une personnalité proche du MSM après que les détails qui se trouvaient sur un portable qui – on conclue – a été cloné avant que toutes les données sur ce téléphone ne soient effacées puisqu’il était complètement vide lorsqu’il était produit en cour durant les travaux de l’enquête judiciaire.
On doit se poser beaucoup de questions. On ne peut pas le rayer d’un trait de plume parce qu’il va dans le sens de l’agenda politique de ceux au pouvoir. C’est possible qu’il n’y ait pas de grand développement tant qu’il n’y a pas un changement de gouvernement. Mais on a vu récemment, notamment dans le cas de Vanessa Lagesse, comment de nouvelles preuves ont aidé à trouver le coupable même des années et des années plus tard. Donc, ce n’est pas à nous, le public ou le cercle politique, d’écarter des preuves avant qu’elles ne soient pesées par les autorités compétentes, plus précisément par le Parquet.
Q : Pensez-vous que la police va pouvoir enquêter sur ces nouvelles allégations, vu les intimidations mentionnées par Vishal Shibchurn et l’enquête sur la mort de Kistnen qui piétine toujours ?
Justement, vu que l’enquête n’est pas encore terminée, ces nouveaux développements peuvent être pris en considération. Une personne dit qu’elle a rencontré celui qui avait organisé cet assassinat. Cette personne l’a non seulement rencontré, mais elle a aussi assisté à des réunions où il y eu des négociations d’argent avec, qui plus est, un conseiller de Premier ministre. On ne peut pas simplement étouffer cet aspect. Il faut qu’il y ait une enquête pour entendre les personnes concernées.
Hormis le ‘self-confess offence’ de Vishal Shibchurn concernant la diffusion des photos compromettantes de Simka Kistnen où il cite également le nom du frère du ministre Hureeram, on ne peut pas fermer les yeux sur les personnes proches du milieu du MSM qui sont mentionnées dans cet affidavit, y compris Yogida Sawmynaden, Bassoo Seetaram et Mme. Kobita Jugnauth. J’insiste sur le fait que ce n’est pas à nous, en raison de notre positionnement politique ou autre, de décider si ce qu’a dit Vishal Shibchurn est monté de toute pièce ou pas. Il faut des investigations pour déterminer sa véracité.