Sahana Jafer, auteure et journaliste

« Faire bouger les choses pour les jeunes auteurs mauriciens »

Âgée de seulement 22 ans, Sahana Jafer a déjà publié deux livres. Journaliste et écrivaine, elle veut se faire une renommée comme auteure. Toutefois, ce qu’elle dénonce, c’est l’absence quasi-totale de soutien et d’encadrement aux jeunes auteurs mauriciens. Elle a d’ailleurs créé une chaine sur YouTube pour expliquer aux écrivains en herbe ce qu’il convient de faire pour faire publier leurs ouvrages. Rencontre avec une femme des lettres qui n’a pas peur de faire bouger les choses.

Sahana Jafer est âgée de 22 ans et habite Vacoas. Elle et son frère cadet, âgé de 18 ans, viennent d’une famille aisée. Sa mère est une entrepreneure tandis que son père est ‘Accounting Manager’.

C’est au Seewa Bappoo SSS qu’elle a fait ses études secondaires. Avec sa passion mordante pour les langues, elle avait ainsi opté pour le français, la littérature anglaise et la sociologie comme matières principales. «J’ai toujours aimé écrire et créer. J’avais l’habitude de gribouiller avant même de savoir écrire. J’ai poursuivi mes études selon cette passion créative », nous confie-t-elle.

Après son HSC, elle s’était inscrite à la Curtin University en 2017, et trois ans plus tard, en 2020, elle devait décrocher son diplôme supérieur, notamment un ‘BA in Mass Communications’, avec spécialisation dans le journalisme et la production de clips d’entreprise.

Après avoir obtenu son diplôme, elle voulait d’abord essayer quelque chose de différent, avant de rejoindre un emploi à plein temps. Elle a ainsi travaillé comme ‘freelance writer’. Les gens prenaient contact avec elle pour qu’elle écrive leurs discours, leurs biographies ou pour rédiger un petit paragraphe pour leurs entreprises.  

Elle avait ainsi publié son premier livre, In the pursuit of the greater good, quelque temps de cela. Elle vient de publier son deuxième livre, Nemesis. « Je n’aurais jamais pensé pouvoir publier un livre, encore moins deux ! Je ne savais pas qu’une carrière d’auteur était possible à Maurice. Mais je l’ai fait, et tant d’opportunités se sont ouvertes, une à une », nous dit-elle. Maintenant, elle se focalise à se faire un nom comme écrivaine.

« Mes parents me soutiennent beaucoup. Même quand je voulais sortir hors des entiers battus, et me faire un nom en tant qu’auteure, avant de me lancer dans un travail à plein temps, ils ne m’ont jamais rien imposé. Ils ont toujours respecté mes choix de carrière », fait-elle ressortir.

Elle vient de rejoindre comme journaliste l’équipe d’un organe de presse écrite. « Je voulais être journaliste depuis peu car cela complémente d’une certaine façon mon désir de devenir écrivaine. Je suis contente maintenant de pouvoir faire un travail à plein temps, tout en concrétisant mon souhait de devenir écrivaine », nous confie notre interlocutrice. La jeune Vacoasienne pense que le temps est un ami et un ennemi à la fois. Elle estime qu’elle a toujours tellement de choses à faire, surtout qu’elle a commencé un travail à plein temps maintenant.

Elle revient sur sa carrière d’écrivaine. L’aspect le plus difficile pour elle est le fait qu’on ne sait pas comment faire pour publier son livre à Maurice. « Beaucoup de débutants ne savent pas où aller ni quoi faire. J’ai passé trois mois à parcourir l’île, à approcher des gens et à leur demander », dit-t-elle.

« Un jeune auteur aura également tendance à recevoir des regards sceptiques. On vous dira : ‘Vous êtes si jeune, sans aucune expérience, comment pouvez-vous écrire un livre ?’ », dit-elle. « De nombreux Mauriciens pensent encore qu’il faut avoir les cheveux gris pour écrire un livre », ajoute la jeune journaliste. « Pourquoi cet état d’esprit ? », s’interroge-t-elle. Notre interlocutrice souhaite que les détracteurs jettent un coup d’œil à la liste des best-sellers de New York et à la tranche d’âge des auteurs. Elle se demande si les jeunes d’autres pays peuvent écrire des livres, alors pourquoi pas les jeunes Mauriciens ?

Vu ces aléas, conseille-t-elle aux jeunes de poursuivre une carrière d’écrivain ? Bien sûr, nous dit la jeune femme. Son conseil est de continuer, quoiqu’il arrive. « Si vous voulez écrire, alors vous devez  le faire. S’il n’y a aucun moyen, alors tracez-vous une voie ! Vous avez reçu le don de créer de l’art, ne le gaspillez pas », soutient Sahana Jafer.

Pour l’instant, elle essaie de s’adapter à sa nouvelle routine au travail. Si les ventes de son livre Nemesis sont prometteuses, elle pourrait aller de l’avant avec une troisième publication. À long terme, c’est une renommée comme auteure reconnue qu’elle vise.

Hors-texte

Elle offre ses conseils aux auteurs mauriciens en herbe sur YouTube

Elle a rencontré beaucoup de gens qui veulent publier leurs écrits, mais qui ont peur ou qui ne savent pas quoi faire. C’est ce qui l’a inspirée à créer une chaîne sur YouTube pour apporter son expérience à ceux qui en ont besoin. Elle ‘coach’ ainsi les jeunes auteurs en herbe sur la façon de publier à Maurice, et où elle leur prodigue également divers conseils.

Pour pouvoir réaliser ce travail, elle a passé près de quatre mois à effectuer des recherches et à suivre des webinaires, tout ceci sur une base de ‘trial and errors’, pour en savoir plus sur tout ce qui se rapporte à être auteur.

Fiche perso

Meilleur conseil de mes parents : « Toujours faire ce qui me rend heureuse, dans la mesure où cela ne me fait pas de mal. De me respecter d’abord, de ne jamais baisser mon niveau et de toujours penser à long terme. »

Souvenir d’enfance : « Quand j’étais enfant, je chantais toujours chaque fois quand j’allais à une réunion de famille. Ou bien j’inventais toujours des fables dans ma tête et je les partageais avec mes amis. »

Plat préféré : ‘Wraps’ turcs ou fruits de mer

Dessert préféré : ‘Red Velvet’

Destination préférée : « J’ai les yeux rivés sur la Cappadocia et la Turquie. »

Passe-temps préféré : « Je chante et je joue du violon comme passe-temps. J’aime aussi sortir et rencontrer de nouvelles personnes. »

Animal préféré : Le chat.

Citation préférée : « ‘Where there is a will, there is a way’. Je me récite cette citation comme mantra pour me rappeler que si je suis incapable de faire quelque chose, c’est uniquement parce que je n’ai pas assez de volonté. S’il n’y a aucun moyen, vous vous tracez une voie vous-même. C’est comme ça que ça marche et c’est comme ça que vous réussissez. »

Un mot pour me décrire : « Je dirais que je suis une âme d’artiste. Je suis attirée par toutes les formes d’art, même celles que je ne pratique pas. »

SARAH KHODADIN