Vache à lait

Les caisses de l’État sont devenues une vache à lait pour le gouvernement. Il l’utilise à sa guise pour plaire à qui il veut. Il peut en faire profiter à ses petits copains à travers des nominations scandaleuses ou de juteux contrats non moins révoltants. Ou il peut saigner ces mêmes caisses à blanc quand il décide d’amadouer différentes catégories de personnes, plus précisément d’électeurs, qu’il s’agisse de nos aînés à travers la pension de vieillesse ou des fonctionnaires via le PRB, bien souvent pour des raisons bassement politiques, mais aussi pour détourner l’attention des problèmes majeurs auxquels font face le pays et la population. Qu’il tienne parole suivant ses promesses est une autre paire de manches. Aucune surprise donc si le Premier ministre a choisi pile le moment où les Avengers organisaient une série d’activités pour marquer le premier anniversaire de l’assassinat de l’ex-activiste du MSM Soopramanien Kistnen pour rendre public le rapport du PRB.

Ce qui est surprenant toutefois, c’est qu’il a aussi décidé de l’appliquer dans son intégralité au lieu des deux tranches préconisées dans le rapport alors que le pays est économiquement à genoux, indiquant qu’il a d’autres desseins en tête. Puisque les élections générales ne sont prévues que dans trois ans, soit en 2024, moment où il augmentera probablement la pension de troisième âge à Rs 13 500 comme promis durant la campagne électorale de 2019, le seul objectif de cet exercice de séduction auprès des fonctionnaires ne peut être que les prochaines municipales. L’accélération de certains projets dans les villes, l’accumulation des cérémonies de pose de première pierre et d’inauguration et la présence plus fréquente des élus du gouvernement sur le terrain semblent soutenir cette thèse. Ce n’est pas la tenue de ces élections urbaines qui pose problème puisqu’elles relèvent, au contraire, du processus démocratique de toute république digne de ce nom, à condition qu’elles ne sont pas truquées. Mais c’est le moyen utilisé pour tenter de renverser la vapeur en sa faveur en utilisant les biens de l’État qui est condamnable.

Quand Pravind Jugnauth comprendra-t-il enfin qu’il ne peut continuer à faire des largesses pour assouvir ses ambitions politiques ? Plus préoccupant, d’où sortira-t-il ces Rs 6, 5 milliards alors que l’enveloppe initiale prévue à cet effet dans le dernier budget s’élève à seulement Rs 1, 7 milliards ? Va-t-il puiser du « Consolidated Fund » ou dépouillera-t-il les réserves d’autres paraétatiques pour honorer d’un seul trait cet engagement ? Hormis des ministres irréalistes du gouvernement, y compris Kailesh Jagutpal qui estime que cette mesure « exceptionnelle » et « extraordinaire » a été rendue possible grâce à la bonne gestion économique du pays, la vérité concernant les finances publiques est connue de tous. La dette publique frôle les 100% du PIB, mais qu’à cela ne tienne. Les mots tels que sacrifices et austérité ne semblent pas figurer dans le dictionnaire de nos dirigeants. Le gouvernement continuera donc à dépenser comme si « larzan pousse lor pied » avec l’ultime but de faire oublier ses frasques. Mais la population les oubliera-t-elle réellement ? Nous en aurons une idée à l’issue des prochaines municipales.