Fondée en 2015 par le couple Dirish et Venna Noonaram, Verde Frontier Solutions Ltd est aujourd’hui au centre d’une affaire aux ramifications multiples mêlant marchés publics, opérations financières d’envergure et soupçons de conflits d’intérêts. Elle a franchi un nouveau cap cette semaine au Parlement, lorsque le Premier ministre, Dr Navin Ramgoolam, a révélé l’ampleur des liens contractuels entre la compagnie et l’État.
« Selon les informations obtenues jusqu’à présent, 20 contrats ont été attribués par les ministères et organismes publics durant la période de 2015 à 2024 à Verde Frontier Solutions Ltd, pour une valeur contractuelle totale de Rs 50,6 millions », a déclaré le Premier ministre dans l’Hémicycle, interpellé lors de la séance parlementaire du mardi 6 mai par le député de Pamplemousses/Triolet, Kaviraj Rookny.
À ce chiffre s’ajoute un contrat distinct de Rs 17,9 millions octroyé par MauBank Holdings Ltd à un consortium incluant Verde Frontier, agissant comme conseiller transactionnel pour la cession des filiales de la banque. L’affaire fait l’objet d’une enquête officielle. « En raison du fait que des informations supplémentaires sont en cours de compilation, j’ai l’intention de faire une autre déclaration sur toute la saga Verde », a précisé le Premier ministre. « C’est désormais l’objet d’une enquête en cours et je m’abstiendrai donc d’en dire davantage à ce stade », a-t-il ajouté.
Le déclencheur de cette affaire retentissante demeure la participation de Verde Frontier Solutions en tant que Consultant Agent dans l’acquisition controversée d’Apavou Hotels Ltd. La transaction, estimée à 48 millions d’euros (près de Rs 2,4 milliards), fait l’objet de soupçons concernant une possible commission de Rs 300 millions que la société aurait touchée. Une offre initiale de Rs 2,1 milliards ayant été surenchérie, les autorités cherchent à établir les conditions exactes de l’opération.
Depuis le 24 février, la Financial Crimes Commission (FCC), en collaboration avec la Financial Services Commission (FSC), a lancé une enquête officielle. Parallèlement, la FSC a également initié une procédure réglementaire indépendante en vertu de l’article 44 de la Financial Services Act 2007 pour examiner la conformité de Verde Frontier Solutions en tant que conseiller en investissements, une licence obtenue le 10 août 2020.
La société, en moins d’une décennie, a su s’imposer dans des secteurs aussi variés que le conseil financier, la communication stratégique, ou encore les technologies numériques. Mais sa croissance fulgurante alimente aujourd’hui le scepticisme, d’autant plus que certains contrats auraient été accordés sans procédure d’appel d’offres. La proximité supposée entre Verde Frontier et l’ancien ministre des Finances Renganaden Padayachy est également pointée du doigt.
Parmi les institutions publiques ayant eu recours aux services de la société figurent :
- La State Bank of Mauritius, avec cinq contrats pour un montant total de Rs 1,788 million ;
- La Financial Services Commission, avec six contrats atteignant Rs 17,46 millions ;
- La Banque de Maurice, avec deux contrats totalisant Rs 15,5 millions ;
- L’Economic Development Board, avec deux contrats de Rs 9,6 millions et Rs 1,1 million ;
- Le Central Electricity Board, ainsi que plusieurs ministères, dont celui de l’Égalité du Genre et du Commerce.
Dans ce contexte de révélations successives, l’opinion publique, la presse et les parlementaires attendent désormais les suites de l’enquête et la déclaration complémentaire promise par le Premier ministre.