[VIDEO]Roshi Bhadain :« Je serai un challenger au poste de Premier ministre au no. 20 »

Il le dit haut et fort : il ne vise que le poste de Premier ministre et rien moins que ça. Roshi Bhadain affirme ne vouloir contracter aucune alliance avec les partis traditionnels car il aspire à changer le système mauricien. Et il est convaincu que ce n’est que son parti qui détient cette recette. Le fruit, dit-il, d’un travail de longue haleine étalé sur deux ans…

Zahirah RADHA

 

Q : Roshi Bhadain, dites-nous d’abord pour quelles raisons le Reform Party n’a pas aligné de candidat à la partielle au no. 7 ?

Nous avons dit dès le début que, selon nous, il n’y aura pas de partielle. Ce sera extrêmement irresponsable de la part du gouvernement de tenir une partielle le 13 novembre alors que l’Assemblée nationale sera automatiquement dissoute le 22 décembre. Ce sera un gaspillage des fonds publics que d’élire un député que pour quelques semaines.

Et puis, si vous analysez la stratégie du gouvernement, vous verrez que c’est clair qu’il ne prendra aucun risque de perdre cette élection. S’il prend ce risque et qu’il perd, il risquera alors de perdre aux élections générales. Donc, je ne pense pas qu’il prendra une décision qui va à l’encontre de ses intérêts.

Finalement, les élections générales sont, selon moi, derrière la porte. Elles se tiendront à partir d’octobre jusqu’à la première semaine de décembre. Au Reform Party, on se concentre sur les élections générales et ce n’est pas dans notre intérêt de perdre notre temps dans une partielle qui n’aura pas lieu. Mais je comprends que les autres partis de l’opposition doivent jouer le jeu du gouvernement, bien que leurs leaders ont aussi été unanimes à dire qu’il n’y aura pas de partielle.

Q : Ne serait-ce que par respect pour la démocratie, le Reform Party, qui se positionne comme une alternance, n’aurait-il pas dû quand même y aligner un candidat ?

Nous voulons faire les choses différemment. Nous ne voulons pas embêter la population. Aligner un candidat à cette partielle, tout en sachant qu’elle n’aura pas lieu, est une façon de couillonner l’électorat. C’est ce qu’ont fait le gouvernement et les partis politiques de l’opposition alors que le Reform Party veut être franc et honnête envers la population.

D’ailleurs, moi je le trouve anti-démocratique que de tenir une partielle à la veille d’une élection générale. La démocratie est synonyme de travailler dans l’intérêt du public, et non de l’embêter. Au sein de notre parti, nous nous préparons pour les prochaines élections générales. Nous avons déjà rendu public notre programme électoral basé sur quinze réformes fondamentales pour changer le système à Maurice. On finalise en ce moment notre liste de 60 candidats.

Q : Donc, pas d’alliance en vue ?

 Je l’ai dit haut et fort, de façon bien claire, que l’île Maurice a besoin d’un nouveau souffle. Nous présenterons nos 60 meilleurs candidats, hommes et femmes, qui apporteront le changement qu’il faut dans le pays. Nous ne voyons pas les partis traditionnels lutter contre la pension des députés et des ministres, de réduire leurs propres salaires ou d’accorder un salaire de Rs 15 000, entre autres, comme nous le préconisons.

Il faut se rendre à l’évidence : le modèle mauricien a créé deux Maurice. D’un côté, il y a des nominés politiques à la SBM, au SICOM ou à Mauritius Telecom qui touchent jusqu’à un million de roupies par mois, et de l’autre, des travailleurs qui peinent à faire joindre les deux bouts. Pourquoi donc ne pas appliquer une « wealth tax » de 20% sur le salaire de ces nominés qui pourrait être utilisée pour accorder un salaire de  Rs 15 000 aux travailleurs ? Si rien n’est fait pour soulager ceux qui vivent dans la vulnérabilité ainsi que la classe moyenne qui s’appauvrit, le pays n’avancera pas.

Certains vous diront que ce sont des mesures populistes. Au contraire, ce sont des mesures qui visent à rectifier les inégalités de la société mauricienne.

Q : Pensez-vous que les électeurs sont prêts de se baser uniquement sur un programme électoral au lieu d’autres considérations, comme leur attachement à certains partis politiques, pour faire leur choix?

Les électeurs ne croient pas dans le programme électoral des partis politiques traditionnels parce qu’ils savent qu’on les embête. Vous leur dites que vous ferez des flyovers à la place du Metro, et puis vous faites le contraire. Vous leur faites croire que le « Best Loser System » ne sera pas aboli, mais une loi est ensuite proposée au Parlement qui allait l’abolir. Quand vous tenez deux différents langages, c’est clair que la population n’y prêtera plus foi. Cela s’applique également à l’ancien gouvernement.

Q : Mais comment allez-vous financer ce programme si vous êtes élu alors que le pays s’écroule déjà sous les dettes publiques ?

En réduisant les gaspillages des fonds publics et en appliquant certaines taxes, entre autres. Il faut aussi réduire les privilèges accordés à certains. La beauté de ce programme, c’est qu’il y aura aussi plus d’argent qui entrera dans les caisses du gouvernement.

Prenons un exemple : trouvez-vous normal qu’on dépense Rs 5 milliards pour la construction d’un stade à Côte d’Or et Rs 100 millions pour la rénovation du stade George V et que finalement, la finale du foot a dû être disputée à Flacq où il n’y a aucune infrastructure ? En réduisant tous ces gaspillages, on peut économiser jusqu’à Rs 7 milliards au minimum.

Le rapport de l’Audit doit précéder l’exercice budgétaire afin que le budget alloué à chaque ministère puisse être déterminé de sorte à ce qu’il n’entraîne pas de gaspillage. Il faut un « forensic approach to budgeting », donc un « zero based budget ». La « wealth tax » ou l’ « exit fee » qu’on propose rapporteront respectivement Rs 2, 5 milliards et Rs 1, 8 milliards respectivement. Ces revenus nous permettront de réaliser notre programme, dont un salaire de Rs 15 000 qui comprendra, le salaire minimal de Rs 9 000 et une « top up allowance » du gouvernement.

Le système à Maurice est dépassé, que ce soit en termes de logement ou de l’emploi. Il nous faut des « job centres » comme il en existe à l’étranger, pour pourvoir des emplois aux jeunes au lieu qu’ils aient à frapper à la porte des politiciens. Bref, il faut tout revoir et ce n’est que le Reform Party qui peut le faire.

Q : Vous pensez pouvoir convaincre la population du bien-fondé de votre programme ?

Il y a deux catégories de personnes à Maurice. L’une qui en a eu assez des partis politiques traditionnels et qui veulent voir un changement du système. Et puis l’autre qui est toujours attachée aux partis traditionnels et qui aime un parti comme on aime une équipe de foot. Mais je constate que l’électorat des familles travaillistes et militantes s’effrite de plus en plus. Idem pour le MSM. Il n’y a que les « hardcores » qui vont aujourd’hui aux meetings et aux réunions. Bien entendu, le gouvernement peut, lui, utiliser l’appareil d’état pour faire grossir ses foules.

Voyons par exemple les militants. Qu’ont-ils eu après 30 ou 40 ans de lutte? Ces derniers ont finalement réalisé qu’ils ont été embêtés. Le MMM a éclaté en mille morceaux. Tous ceux qui ont claqué la porte, que ce soit Collendavelloo, Ganoo, Obeegadoo, Jeeha, Labelle, ont été qualifiés de « bon débarras » par Bérenger. Finalement, il ne reste que lui, sa fille et son gendre au MMM.

Les jeunes ne veulent plus suivre aveuglément les partis auxquels sont attachés leurs grands-parents. Ils cherchent quelque chose de nouveau, une équipe respectable, fiable, professionnelle, qui veut travailler dans l’intérêt du pays et qui soit à l’écoute des gens.

Q : Vous êtes confiant de pouvoir rallier les indécis ?

Si je ne l’étais pas, je ne l’aurais pas fait. Beaucoup de ceux que je côtoie sur le terrain me disent que j’aurai plus de chances d’être élu et de faire parti du gouvernement si je contracte une alliance. Mais pour nous, ce n’est pas que le pouvoir qui nous intéresse, mais celui de changer le système et de présenter un programme dans lequel tout le monde se retrouve. Je n’ai rien contre les partis A, B ou C. Mais rien ne changera avec eux.

Sur les 950 000 électeurs enregistrés, il y a une masse silencieuse de 500 000 personnes. Ce sont elles qui doivent comprendre les quinze réformes qu’on propose. Il leur appartiendra maintenant de faire leur choix. Si elles veulent voter pour blanc bonnet et bonnet blanc, libre à lui. Mais le système actuel ne fera alors que perdurer.

Q : Le Reform Party donne l’impression d’être un « one-man show ». On n’entend et ne voit que Roshi Bhadain. Qu’en est-il de votre équipe ? L’avez-vous déjà constituée ?

Vous y avez également une part de responsabilité car, et vous et la presse en général, ne cherchez que Roshi Bhadain pour les interviews ! Ceci dit, les autres partis, que ce soit le MMM, le PTr ou le MSM, ne sont pas moins que des « one-man show ». Pravind Jugnauth est lui un « one-man government ». Vous n’avez qu’à regarder la MBC et vous ne verrez que lui qui coupe les rubans. Quant à moi, j’aimerais bien que mon équipe puisse avoir l’hospitalité de vos colonnes pour s’exprimer.

Q : Votre liste de candidats est-elle déjà prête ?

Notre liste est déjà prête, mais il faut qu’on voie aussi le « response » des candidats potentiels sur le terrain. Vous pouvez avoir des idées, de l’enthousiasme pour faire progresser le pays ainsi qu’un bon bagage professionnel, mais si vous n’êtes pas écouté et accepté par la population, rien n’y fera. D’où ce test sur le terrain. Ce n’est qu’en nous basant sur le feedback reçu, qu’on choisira les meilleurs candidats. Je tiens aussi à souligner que ceux-ci ne seront pas choisis uniquement sur leurs profils ethniques, mais aussi sur leurs compétences et leur acceptation auprès de l’électorat.

Q : Il n’y aura donc pas de système communautariste ou castéiste ?

Nous ne croyons pas dans ce système. Mais bien sûr, il faudra quand même que tout le monde se retrouve dans cette équipe. On ne peut pas présenter une équipe isolée composée d’une section de la population seulement. Elle doit être représentative de toutes les communautés et couches sociales. Mais on ne choisira pas un candidat uniquement en fonction du profil ethnique d’une circonscription. La « bottom line » toutefois, c’est que le candidat doit être aimé par l’électorat.

Q : Vous insistez donc qu’il n’y aura aucune alliance ?

Non ! Il n’y aura pas d’alliance ! Je serai un challenger au poste du Premier ministre.

Q : Dans quelle circonscription ?

Au no. 20 (Beau-Bassin/ Petite-Rivière). Il y aura quatre prétendants au poste de Premier ministre : Pravind Jugnauth, Navin Ramgoolam, Paul Bérenger et Roshi Bhadain. Et je dis à ceux qui ne veulent pas voter pour ces trois leaders qu’ils ont maintenant un choix. Et je suis prêt à faire un face-à-face avec eux.