Cinq contestations logées en cour : La pression monte !

Renvoi des municipales

La décision du gouvernement de Pravind Jugnauth de recourir au Président de la République pour reporter une troisième fois les élections municipales, jusqu’en 2025, place Maurice parmi les pays qui avancent lentement mais sûrement vers une autocratie programmée. Certains citoyens et partis politiques d’opposition contestent cette décision purement politique et demandent à la Cour suprême d’obliger les dirigeants à revenir dessus pour diverses raisons. Cinq plaintes constitutionnelles contestent l’amendement du Local Government Act, remettant en question la décision du Premier ministre de reporter les élections municipales.

La dernière fois que les citoyens ont été appelés aux urnes remonte au 15 juin 2015. Alors que le mandat des conseillers municipaux aurait dû prendre fin en juin 2021, le gouvernement a décidé de le prolonger d’un an, avec la possibilité d’une prolongation supplémentaire d’un an supplémentaire en fonction de la situation de la Covid-19. Bien que des élections villageoises aient eu lieu le 20 novembre 2020, en pleine pandémie, ainsi que les élections pour l’Assemblée Régionale de Rodrigues le 27 février 2022, le président de la République, Prithviraj Roopun, a annoncé en avril 2022 le report des élections municipales d’un an. Selon la loi, celles-ci auraient dû se tenir au plus tard le 15 juin de cette année.

Outre le simple report, la raison avancée par le Premier ministre Pravind Jugnauth, à savoir un projet de réforme de l’administration des villes, a suscité l’indignation et un rejet massif tant sur le plan politique que médiatique. Bien que le report des élections municipales ne soit pas nouveau dans l’histoire démocratique du pays, celui-ci intervient dans un contexte de colère sourde de la population pour diverses raisons, notamment la perte significative du pouvoir d’achat, et l’érosion marquée des libertés individuelles.

Rajen Valayden donne le coup d’envoi

Rajen Valayden est le premier à avoir pris l’initiative de contester la constitutionnalité de l’amendement du Local Government Act, et le premier à contester en justice le report des élections municipales jusqu’en mai 2025. Il a déposé une plainte en Cour suprême. Il est soutenu par son équipe d’avocats composée de Me Sanjay Bhuckory, Senior Counsel, et Me Feroza Maurdarbocus-Moolna, Senior Attorney.

Ils ont demandé à la Cour de déclarer les amendements apportés pour le report des élections municipales invalides et anticonstitutionnels. La plainte vise l’État, le Premier ministre et l’Attorney General en tant que co-défendeurs. Rajen Valayden remet également en question le principe fondamental de la démocratie qu’est la séparation des pouvoirs, qu’il estime indiscutablement inscrit dans l’article 1 de la Constitution. Il affirme également que la période de report de deux ans n’est pas raisonnablement justifiable dans une société démocratique.

L’affaire a été entendue en Cour suprême le jeudi 22 juin, et a été renvoyée au 29 juin prochain.

Ashley Ramdass : « Lepep pu sanctionn zot dan eleksyon »

L’avocat Ashley Ramdass, membre du Parti Travailliste (PTr), a contesté le report des élections municipales à Quatre-Bornes, et a également demandé à la Cour suprême d’invalider les amendements permettant ce report. Il a fait appel aux services des avocats Mes Gavin Glover, SC, et Antoine Domingue, SC. Il devra attendre jusqu’au 29 juin pour connaître la décision de la Cour concernant sa demande.

Me Ramdass est d’avis que, selon les articles 17 et 83 de la Constitution, la Cour suprême devrait déclarer ces amendements comme étant “nuls et non avenus”. « Zot inn pass enn la loi ki anticonstitutionnelle. La cour suprême pu bizin deklar sa ‘null & void’. Biro Attorney General ena so propre agenda ek linn mal advice le Premier ministre. Population pu sanction sa gouvernement la dans ‘sphere politik’ » lance l’avocat.

Le membre du Ptr salue également l’initiative de l’opposition parlementaire, ainsi que de l’opposition extra-parlementaire. Il estime qu’il est important que tout le monde avance dans la même direction pour accroître la pression afin que l’affaire soit entendue le plus rapidement possible.

Linion Pep Morisien passe à l’action

Le parti LPM, à travers deux de ses membres, Rama Valayden et Jean Claude Barbier, demande aux juges de déclarer anticonstitutionnel l’amendement du 26 mai à la Local Government Act, qui reporte les élections municipales pour une durée d’au moins deux ans. Ils demandent également à la cour de prononcer la dissolution des conseils municipaux. L’affaire a été entendue le 22 juin.

Les demandeurs exigent également que les conseillers, dont le mandat a été prolongé par cet amendement, remboursent les salaires perçus au-delà du 15 juin 2023. Une plainte sera déposée en Cour suprême contre la municipalité de Port Louis, le Premier ministre, le ministre des Collectivités locales et l’Attorney General.

Nando Bodha dans la valse

Nando Boodha, le leader du Rassemblement mauricien (RM), ainsi que deux autres membres du parti, Vir Abhi Manuyu Trilochun et Maynanda Rajaratnam, ont déposé une plainte en révision judiciaire devant la Cour suprême le vendredi 16 juin.

Le leader du RM et ses deux collègues demandent l’autorisation de la cour pour contester le report des élections municipales pendant deux ans, à partir du 13 juin 2023. S’ils obtiennent l’autorisation, les trois demandeurs réclament un calendrier procédural afin que l’affaire soit entendue par la cour dans un délai de trois mois, compte tenu de l’urgence de la situation. Ils demandent également qu’un “mandatory order” soit délivré au Premier ministre, lui ordonnant de conseiller au Président de la République d’émettre un “writ” pour la tenue des élections municipales dans un délai de 60 jours, conformément à l’article 11 de la Local Government Act.

Veda Baloomoody : « Zot inn per l’alliance PTr-MMM-PMSD »

La cinquième plainte a été déposée au greffe de la Cour suprême, cette fois par le Mouvement Militant Mauricien (MMM), qui rejoint le mouvement de contestation contre le report des élections municipales. Mardi, deux anciens conseillers de ce parti ont déposé plainte pour contester la décision du Premier ministre Pravind Jugnauth de reporter les élections municipales pour une période de deux ans à partir du 13 juin 2023.

Selon Veda Baloomoody, il est évident que le gouvernement craint d’affronter les citadins. « Zot kone zot pu vinn gayn enn bate bef… si dans cinq municipalités li perdi, li pa pu ena face… MMM finn toujours lutter pour la démocratie, nou pu al Privy Council si bizin. Nous pas d’accord ki l’état pe susbtituer bann électeurs de la ville. Kan MMM vinn dan gouvernement, nou pu make sure ki nou pe met élection municipale aussi dans la constitution pour ki pena okenn abus kuma pe ena aster la ek sa gouvernement ki pe amenn enn pays dans enn autocratie », affirme-t-il.