Plus de Rs 39 millions empochés en trois ans pour Harvesh Seegolam, aujourd’hui accusé de détournement de fonds : le rapport annuel de l’année financière 2024 de la Banque de Maurice (BoM), publié ce mardi 25 février, dévoile les rémunérations astronomiques des hauts responsables de l’institution, en pleine tempête judiciaire. Alors que l’ancien gouverneur est sous le coup d’une enquête pour un présumé détournement de fonds de Rs 45 millions à la Mauritius Investment Corporation (MIC), ce document officiel expose un système où les émoluments des dirigeants n’ont cessé d’augmenter au fil des années. Ces chiffres, publiés sous le nouveau gouvernement Ramgoolam qui promet transparence et réformes, alimentent l’indignation populaire et soulèvent de sérieuses questions sur la gouvernance financière du pays pendant la dernière décennie.
L’un des points les plus scrutés du rapport concerne les honoraires versés aux dirigeants de la banque centrale et des entités affiliées.
Harvesh Seegolam, ex-gouverneur de la BoM
- 2022 : Rs 11,92 millions
- 2023 : Rs 12,97 millions
- 2024 : Rs 14,36 millions
Harvesh Seegolam a vu sa rémunération augmenter chaque année jusqu’à son départ, et a perçu un total de Rs 39,25 millions sur trois ans. Son arrestation en janvier 2025 et sa libération sous caution ont ravivé la colère populaire, de nombreux citoyens réclamant plus de transparence et de sévérité envers les hauts responsables proches de l’ancien régime de Pravind Jugnauth, et impliqués dans des affaires financières (détournement de fonds, blanchiment d’argent et corruption notamment).
Les Ex-Deputy Governors : Mardayah Kona Yerukunondu et Hemlata Sadhna Sewraj-Gopal
- 2022 : Rs 14,12 millions
- 2023 : Rs 15,57 millions
- 2024 : Rs 17,09 millions
Ces anciens adjoints du Gouverneur ont également été cités dans des affaires liées à la MIC, ce qui ne manque pas d’attiser les soupçons sur l’ensemble de la gestion passée de l’institution.
Rémunérations des administrateurs des entités affiliées
Ex-directeurs de la MIC
Les six anciens directeurs de la Mauritius Investment Corporation, dont Mardayah Kona Yerukunondu et Hemlata Sadhna Sewraj-Gopal, ont perçu les montants suivants :
- 2022 : Rs 2,16 millions
- 2023 : Rs 2,92 millions
- 2024 : Rs 4,01 millions
Ces chiffres montrent une progression importante des honoraires en 2024, en dépit des controverses entourant la gestion de la MIC.
Directeurs de la Mauritius Deposit Insurance Corporation Ltd (MDIC)
Créée en mars 2024, cette entité a rémunéré ses sept directeurs à hauteur de Rs 600 000 pour l’année.
Ex-directeurs de la BoM
Six anciens directeurs de la BoM ont conservé un salaire stable sur les trois dernières années :
- 2022 : Rs 2,16 millions
- 2023 : Rs 2,16 millions
- 2024 : Rs 2,16 millions
Chairperson de la Mauritius Investment Corporation (MIC)
Mark Florman, qui occupait le poste de Chairperson jusqu’en octobre 2024 avant d’être remplacé par Catherine Bouvier d’Yvoire, a vu ses honoraires évoluer :
- 2022 : Rs 2,92 millions
- 2023 : Rs 4,23 millions
- 2024 : Rs 4,1 millions
Son salaire mensuel était de 6 500 livres sterling, soit environ Rs 386 750.
Rémunération d’un ancien gouverneur de la BoM
Un montant de Rs 11,05 millions a été versé à Rundheersing Bheenick en 2024, représentant le solde d’une créance reconnue devant la Cour suprême.
Une institution en mutation sous le gouvernement Ramgoolam
La publication de ce rapport annuel intervient dans un contexte de refonte institutionnelle initiée par le gouvernement de Navin Ramgoolam. Après une décennie d’ingérences politiques et de controverses, l’exécutif s’est engagé à restaurer l’indépendance des grandes institutions financières, à commencer par la Banque de Maurice.
L’une des premières mesures a été d’assurer une gouvernance plus rigoureuse au sein de la BoM, en mettant fin aux pratiques opaques qui ont marqué les précédentes administrations. Désormais, la Banque Centrale opère sans interférence politique, lui permettant de mener une politique monétaire en toute autonomie et de regagner la confiance des acteurs économiques.
Dans le cadre de cette volonté de transparence, le gouvernement a également entrepris une refonte de la Mauritius Investment Corporation (MIC), dont la gestion sous l’ancien régime avait suscité de vives critiques. Un audit approfondi de ses finances a été lancé, et de nouvelles réglementations visent à garantir une meilleure supervision de l’utilisation des fonds publics.
Ces réformes s’inscrivent dans un programme plus large visant à renforcer l’État de droit et à rétablir la confiance du public envers les institutions du pays. Si les révélations du rapport annuel de la BoM soulignent les dérives du passé, elles marquent aussi un tournant vers une gouvernance plus responsable et plus transparente sous la nouvelle administration.