Sanctions à deux vitesses ?

Propos insultants d’Anil Gayan : La lenteur du PM à le sanctionner inquiète

Plus d’une semaine s’est écoulée depuis que le pays a pris connaissance des propos insultants tenus par le ministre Anil Gayan contre la communauté musulmane. Malgré plusieurs plaintes logées contre ce dernier au CCID depuis la fin de la semaine dernière, aucune sanction n’a encore été prise contre lui. Le Premier ministre, qui est rentré au pays hier après avoir assisté à la cérémonie de ré-investiture de Narendra Modi en Inde, a aussi ordonné une enquête en parallèle et a fait savoir à des représentants de la communauté musulmane qu’il prendra une décision après avoir pris connaissance de la conclusion de ces enquêtes. Or, des associations musulmanes n’écartent pas la possibilité de tenir une manifestation au cas où aucune sanction n’est prise contre Anil Gayan dans les plus brefs délais. Le Premier ministre agira-t-il avec autant de fermeté que dans des cas précédents impliquant des élus musulmans ? se demandent les dirigeants de ces associations sans toutefois dédouaner ces derniers des accusations auxquelles ils font face. D’ailleurs, c’est le même sentiment qui anime des élus de confession musulmane de la majorité gouvernementale. Le ministre Anwar Husnoo, par exemple, n’a pas caché son irritation envers son collègue de parti et de Cabinet. « Pourquoi certains sont sanctionnés alors que d’autres sont épargnés ? » se demande-t-on au sein du gouvernement. Faisons le point sur ceux se trouvant au centre de polémiques et qui ont été désavoués par le Premier ministre et ceux qui ont été épargnés…

 

Les désavoués

Showkutally Soodhun

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Il est un inconditionnel du MSM. Showkutally Soodhun s’était même auto-proclamé « esclave » de SAJ. C’est vous dire à quel point il voue une estime sans borne aux Jugnauths. Ce qui lui a valu bien des ennuis malgré plusieurs polémiques dont il faisait l’objet pendant qu’il occupait le poste de vice-Premier ministre et ministre du Logement. Mais ses propos à fort relent communal et tout à fait condamnables contre une section de la population devaient provoquer sa chute. Le Premier ministre avait, dans un premier temps, dit qu’il prendra une décision après que l’enquête soit bouclée. Mais Pravind Jugnauth devait céder sous les pressions quelques jours plus tard, plus précisément après sa rencontre avec le Cardinal Maurice Piat. Peu après cette réunion, le chef du gouvernement devait réunir la presse pour annoncer la démission de Showkutally Soodhun comme ministre. Un développement qui est intervenu quatre jours seulement après que l’affaire avait éclaté.

Roubina Jadoo-Jaunboccus201117_roubina

Elle avait été promue comme ministre de l’Égalité des genres alors qu’elle avait déjà été entendue par la commission d’enquête sur la drogue. Mais Roubina Jadoo-Jaunboccus n’a pas fait long feu au sein de ce ministère, ayant été contrainte à la démission presque tout de suite après les conclusions du rapport qui la blâmait pour ses « unsolicited visits » à des prisonniers. Dans l’entourage de la députée du no. 2, l’on s’indignait que le Premier ministre ait pu se débarrasser d’elle aussi facilement. « A-t-elle été utilisée comme un bouc-émissaire pour montrer que le chef du gouvernement means business ? » s’interrogent ses proches qui ne comprennent toujours pas la raison de sa mise à pied. D’autant qu’elle a fait une demande de révision judiciaire.

 Ameenah Gurib-FakimAmeenah-Gurib-Fakim-In-Pakistan-1

Elle n’était pas une élue du peuple mais elle avait été nommée à la tête de la présidence pour des raisons ethniques, entre autres. L’ancienne locataire de la State House a été contrainte à la démission dans le sillage de l’affaire Platinum Card. L’ironie, c’est que c’était le Premier ministre lui-même qui avait annoncé que la démission de la présidente interviendrait après le 12 mars. Au grand dam d’Ameenah Gurib-Fakim qui a nié cette nouvelle sur sa page Facebook tout de suite après. Cette dernière finira toutefois par céder son fauteuil. Elle fera aussi l’objet d’une commission d’enquête qui, jusqu’ici, pas n’a encore livré son verdict.

 

Les épargnés

sudhir
Sudhir Sesungkur

Il a vraiment une veine de cocu, celui-là ! En dépit de ses nombreuses casseroles (et on ne parle même pas de celles impliquant son fils, son ami et collaborateur Ganesh Niko, Sudhir Sesungkur a pu, sans aucune peine apparente, conserver son fauteuil ministériel. Malgré des accusations de détournement de fonds, « using office for gratification » ou encore des allégations d’agression contre un photographe lors d’un mariage, le ministre de la Bonne gouvernance tient bon et résiste à toutes les accusations. Et ce, avec la bénédiction du Premier ministre.

 

Raj Dayal

raj dayalCertes, il a perdu son maroquin ministériel dans le sillage de l’affaire Bal Kouler. Et il n’en pouvait pas être autrement. Mais il n’a pas quitté le confort de son ministère les poches vides. En brandissant les menaces d’une démission de l’Assemblée nationale quelque temps après sa « démission forcée », il s’est assuré d’obtenir une compensation de Rs 15 millions pour avoir été auparavant limogé comme Commissaire de police. Il a re-tenté le coup il y a peu en jurant un affidavit contre SAJ, le but étant de forcer la main de Pravind Jugnauth pour le réintégrer au cabinet ministériel. Même s’il n’a pas eu de la chance cette fois-ci, malgré tout son cinéma, Raj Dayal s’en est quand même sorti indemne, sauf une petite suspension du parti pour son absence au meeting du 1er mai. Ce qui a choqué beaucoup, à commencer par des députés de la majorité eux-mêmes.

Anil GayanIl avait été au centre de l’affaire Vijaya Sumputh. Outre d’être celui qui avait nommé cette dernière à la tête du Cardiac Centre, c’est bel et bien Anil Gayan, en tant que ministre de la Santé, qui avait approuvé une augmentation de Rs 100 000 en faveur de son amie et ancienne partenaire en affaires. Il l’avait d’ailleurs défendue en expliquant qu’elle méritait son salaire. Qui plus est, Lutchmeeparsad Aujayeb, qui avait présidé le « Fact Finding Commitee » sur cette affaire, aurait fait état, dans son rapport, d’un probable conflit d’intérêt impliquant Anil Gayan. Mais ce dernier a été jusqu’ici épargné, le rapport n’ayant pas été rendu public. Les accusations pesant contre lui dans le présent cas étant de nature bien plus graves, puisqu’elles peuvent nuire à l’harmonie sociale de notre pays, le chef du gouvernement se décidera-t-il enfin à le sanctionner ?

 

Une décision attendue d’ici la fête Eid

Alors que des dirigeants de diverses associations brandissent la menace d’une manifestation au cas où aucune sanction n’est prise sous peu, le représentant de la Jummah Masjid, Nissar Ramtoola, précise, lui, n’avoir imposé aucune « time frame » pour que le Premier ministre sanctionne le ministre du Tourisme. Toutefois, de nombreux citoyens de foi musulmane se demandent s’il n’aurait pas été plus approprié si Pravind Jugnauth passait à l’action avant la fête Eid qui devarit être célébrée en milieu de semaine, question de rassurer cette communauté. « Kuma Pravind Jugnauth pou vine fer Eid are nou dans Sunni Razvi si li pas kapave sanctionne ene minis ki fine blesse nou dans nou la foi ? » C’est la question qui préoccupe…