Souillée par l’argent sale

Les informations révélées, que ce soit à la commission d’enquête sur la drogue ou dans la presse, par rapport au financement de la campagne électorale de Raouf Gulbul sont un réel ‘eye-opener’. Mais elles ne seraient que le ‘tip of the iceberg’. Au fur et à mesure que les auditions se poursuivent, les langues se délient. Ceux qui étaient hier dans les petits papiers de ce Senior Counsel se font aujourd’hui un plaisir de dévoiler, en cercle restreint, les dessous d’une campagne ponctuée d’argent sale et de gros bras. C’est ainsi qu’on a appris que le « big black bag » de Saint Pierre, soupçonné de contenir quelque Rs 9, 7 millions, ne serait pas le seul qui aurait été acheminé vers le candidat battu du MSM. Il y en aurait également d’autres qui étaient tout aussi garnis que celui-là. Si bien qu’à un moment donné, il y aurait eu, tenez-vous bien, Rs 50 millions qui auraient été soigneusement dissimulées pour lui. Rs 50 millions rien que pour un seul candidat ! Et les donateurs, vous l’aurez compris, ne sont pas forcément tous des saints.

Raouf Gulbul n’était bien entendu pas l’unique candidat de la défunte Alliance Lepep qui aurait reçu de financements pour sa campagne. Mais si l’on s’attarde spécifiquement sur son cas, c’est parce qu’il y aurait eu des promesses pas très catholiques qui ont été faites à ceux qui l’ont financé. Celle faite au caïd Peroomal Veeren en est un exemple criant. Alors que ce candidat du MSM s’amusait à jouir de tous les bénéfices que son ticket lui permettait d’obtenir, les Jugnauths, père et fils, promettaient, eux, d’instaurer la bonne gouvernance. D’un côté, les dirigeants du MSM donnaient la garantie d’en finir avec le trafic de drogue et de l’autre, la campagne d’un des leurs était financée par un trafiquant notoire. Ils ne pourraient pas plaider l’ignorance puisque, selon Samad Goolamaully, sir Anerood Jugnauth étaient bel et bien au courant de « certaines choses »  comme l’ancien ami intime de Raouf Gulbul nous révélait dans son entretien la semaine dernière. Ce qui rend SAJ également responsable de toute cette affaire car s’il était vraiment sincère dans ses démarches, il aurait agi avec fermeté dès le départ.

Que Pravind Jugnauth le veuille ou pas, la dernière campagne électorale du MSM a été entachée, voire souillée par l’argent sale, qu’il provienne du trafic de drogue ou du gambling, autre fléau que Vishnu Lutchmeenaraidoo voulait contrôler. Si le Premier ministre veut maintenant se montrer crédible, il lui faudrait ordonner l’ouverture d’une enquête en bonne et due forme afin de faire la lumière sur toutes les ramifications entourant le financement électoral de Raouf Gulbul. Une enquête qui puisse, par exemple, déterminer si c’est éthiquement correct que ce soit un policier travaillant aussi au SMS Pariaz qui remette, au nom d’un bookmaker, les dépenses journalières au chauffeur d’un candidat politique. Il faut aussi que la population puisse savoir où ont atterri toutes ces généreuses donations. La Mauritius Revenue Authority (MRA), généralement si prompte à agir quand il s’agit des petits commerçants, devrait aussi s’y intéresser. Au nom de la transparence et de la bonne gouvernance, Pravind Jugnauth se doit d’agir. Et vite. Sinon, il se fera dépasser par les spécialistes de « devire lenket ».