Amateurisme et irresponsabilité décriés

Calvaire d’un patient

  • Transféré d’urgence à l’ICU de Flacq après une opération incomplète, B.Beekhun rend l’âme dans une autre clinique privée

La famille de Busseerudin Beekhun de Port-Louis crie à l’arnaque suivant le décès de cet homme de 62 ans après une intervention chirurgicale (uréthrotomie) incomplète dans une clinique des Plaines Wilhems. Transféré d’urgence à l’unité des soins intensifs de l’hôpital de Flacq, le patient y séjournera pendant une vingtaine de jours avant que les médecins ne signent son transfert pour le centre hospitalier de la capitale. Son cas empirant de jour en jour, il finira par être admis dans une clinique de la capitale où il rendra l’âme après un drôle de calvaire suivant les conseils d’un consultant de renom.

Que reprochent les Beekhun au Dr A.F ? « Il nous a caché la vérité. Après avoir examiné mon père lors d’une consultation privée, il nous a recommandé de le faire admettre en clinique pour son opération. Je lui ai demandé combien cela nous coûtera et il m’a répondu entre Rs 50 000 et Rs 57 000 parce qu’il devra y rester pendant cinq jours. C’est à 15h30 le 8 mars 2016 que le sexagénaire sera admis et il sera congédié le lendemain à 20h30 après une intervention incomplète. Il sera transféré d’urgence à l’ICU de Flacq. Après vingt heures seulement au lieu de cinq jours et un travail inachevé dans le bloc opératoire de cet hôpital privé, on nous a réclamé Rs 67 300. N’est-ce pas une arnaque ? » se demande Arshad, le fils du défunt. « J’alerte l’opinion publique et le ministère de la Santé pour que d’autres familles mauriciennes, surtout celles qui sont de condition modeste, ne soient pas victimes de ce que je considère être de l’amateurisme et de l’irresponsabilité. Même le Dr F. a reconnu qu’il y a de quoi être amer d’avoir autant dépensé sans recevoir la moindre satisfaction quand nous sommes allés le voir dans son cabinet à Port-Louis une semaine après le décès. »

Pourquoi se sont-ils rendus dans le cabinet médical du chirurgien et avoir enregistré la conversation le 3 mai 2016 alors que Busseerudin Beekhun est décédé le 25 avril 2016 à 6h15 dans une autre clinique que celle où il a été opéré sans succès ? Les membres de la famille Beekhun soutiennent que le consultant en question leur doit une explication après cette tournée des cliniques et hôpitaux qui a ajouté aux souffrances de la victime et à leurs déplacements et inquiétude alors qu’ils se sont tournés vers un spécialiste qui aurait dû tout faire pour les rassurer et leur dire toute la vérité sur ce qui a mal tourné. « Selon nos renseignements à l’hôpital de Flacq, mon père a connu un arrêt cardiaque après l’opération d’où cette admission d’urgence dans une ICU. » Le Dr A.F a, lui, repoussé cette affirmation en leur disant : « Mais non, jamais line gagne arrêt cardiaque. Sa bane docteurs kine écrire sa là bane zenfants sa ! »

Le consultant voulait compléter la chirurgie à Flacq alors que le patient était aux soins intensifs, mais ses collègues devaient le lui déconseiller. « Li dir li ti pé persisté pou réopère mo papa kan li ti Flacq parski li ti enkor sous anesthésie. Mais bane docteurs là-bas ine empêche li alle de l’avant akoz mo papa so cas ti bien critique. Li dir nou li remercié buku conseil so bane collègues pou sa zour-là. »

121-1

1223

A Memo from Flacq Hospital (FH) to Dr Gopal

Dans une note adressée au Dr Gopal du SOPD de l’hôpital Jeetoo, deux médecins de FH, les Drs Mungur et Burton écrivent ceci : « Dear Doctor, Kindly see and do needful for the above named patient who did a urethrotomy on 09/03/2016 in private and had a cardiac arrest. Patient was then transferred to Flacq Hospital and was monitored in ICU by surgical, cardiac and medical doctors. Patient already had a suprapubic catheter. We have tried clamping the suprapubic catheter and made the patient to pass urine freely but failed. Hence we are discharging the patient with the suprabic catheter. Dear Doctor, kindly follow up for the patient. With thanks, Dr T. Mungur – Dr Burton. »

 

Extraits d’une conversation révélatrice

Après une nuit d’enfer pour le patient  dans une clinique quatrebornaise, il passera vingt jours dans l’ICU à Flacq, une semaine à l’hôpital Jeetoo et six jours dans une clinique de la capitale où il rendra l’âme le 25 avril.  Le mardi 3 mai, trois membres de la famille Beekhun débarqueront dans le cabinet médical de ce consultant du ministère de la Santé pour chercher des explications.

A.B : « Dan clinique, kuma sorti dan la salle opération, ou dir nou top, opération ine korek, mais après cinq zours lôpital Flacq, nou apprane par ène lotte docteur ki l’opération pane complété ?

Dr A.F. : « Oui, opération ine korek… Mais parski patient-là ti ène dimoune bien fragile, nou ine bizin arrête tou en place. »

S.B : « Patient-là ti éna problème leker mais cardiologue pas assisté l’opération-là ? »

Dr A.F. : « Pa ti pou fer oken différence et ène cardiologue zamé assisté opération ».

S.B. : « Ou ti conné li ène dimoune bien fragile, bé kifer pa ti fer ène peridural  au lieu endormi li net. D’ailleurs ou ti dir ki anesthésie-là kine cause ène problème pou li ? »

Dr A.F. : « Pa kapav rentre dan Dr S. (anesthésiste) so travay. C’est li ki décide sa, li ki conné ki meilleure façon. »

M.B. : « Ou ti dir opération plus cinq jours ki li pou reste clinique, budget pou arrive Rs 50 000 – Rs 57 000, mais mo papa ine reste ène sel zour et opération pane complété et bill ine vine Rs 67 000 ? »

Dr A.F. : « Mo travay kuma ène freelance là-bas moi et clinique c’est ène association profit making. Alors côté comptabilité, mo péna narien à fer là-dan. Éna bane médicaments kine bizin servi are li akoz so cas, mo pensé c’est pour sa ki bill ine vine plus. »

« Rode place dan ICU »

Outre les services d’un anesthésiste (rémunération : Rs 15 000 alors que pour le chirurgien, les Beekhun ont déboursé Rs 20 600), ceux d’un cardiologue (Rs 3 500) étaient requis. Ce dernier n’est arrivé à la clinique qu’une heure et demie après l’intervention. « Entretemps, mo papa so cas ine pli aggravé et ine bizin rode place dan ène ICU. »

A.B : « Ou ti dire sa zour-là ou fine téléphone lôpital Candos, Jeetoo et le Nord, mais oken place pa ti éna dan ICU. Finalement oune gagne place dan lôpital Flacq kot ou travay… ? »

Dr A.F : « Li zis ène coïncidence sa. Au moins sa oussi line gagne ène place. »

Au total, les Beekhun ont payé Rs 67 300 à la première clinique où leur proche a été opéré et Rs 66 890 à la seconde où le malade a passé les derniers jours de sa vie. Avec les coûts d’une radiographie et d’une échographie à la Clinique Mauricienne, ils ont fini par dépenser une grosse somme pour des soins qui n’ont pas été à la hauteur de leur satisfaction.