La police joue à cache-cache !

Insécurité à la Rue Célicourt Antelme, Rose-Hill

Prostitution, drogue, bagarres, jurons, pollution sonore… les habitants de la Rue Célicourt Antelme à Rose-Hill ne savent plus comment sortir de la gadoue. Plaintes à la police ? Ils sont nombreux à avoir porté plainte au poste de police de Rose-Hill. Les actions prises ? Aucune ! Sauf quelques rares patrouilles policières, alors que les constables restent dans le confort de leurs véhicules pour éviter de se frotter aux trublions nocturnes.

Une fois la nuit tombée, les va-et-vient commencent à la rue Célicourt Antelme. Autrefois, ces envahisseurs de la nuit s’embusquaient à la rue Thommy Pitôt à quelques mètres de leur nouvelle « baz », mais d’où ils ont été chassés par les autorités. Rose-Hill a changé de décor depuis quelques temps. Longtemps habitués à trouver les prostitués près du fameux Coin Idéal, les choses ont beaucoup changé pour les noctambules. Aujourd’hui, plusieurs d’entre eux n’ont aucun respect pour l’église Notre-Dame de Lourdes, qui se dresse majestueusement à l’angle de la route Royale et de la rue Célicourt Antelme, non loin du Plaza.

Les doléances des habitants

Ce sont des dizaines de prostituées, « hommes » et femmes, qui ont élu domicile d’un soir à proximité de l’église et de l’école primaire, quelques mètres plus loin, en direction de Buckingham. Le mouvement est dense la nuit.  Youvraj, 34 ans, un habitant de cette rue depuis sa naissance, n’en peut plus de ces va-et-vient à longueur de la nuit. « Zot péna aucun respect pou bane habitants là. Si fami vine kot ou, zot bizin passe par enn parades fam asoir ek bane dimoune louches ki vraiment faire peur pou marsé », dit-il. Youvraj nous emmène alors chez son voisin, Vishnu, qui a été victime de vol à plusieurs reprises. « Mone dépense plis ki Rs 30 000 pou mett caméra, zot ine cokin caméra la mem. Mone ale lapolice, zot dire moi faire patrouille asoir pena nanié. Zot ine cokin boku kikchose dan la cour cot moi, situation pé vine invivable », dit-il.

La police et Candy Crush

Le temps d’un soir, nous faisons un arrêt incognito à la rue Célicourt Antelme. Vers 20 h, les premières femmes arrivent, suivies des proxénètes qui guettent au loin. Les minutes passent et se ressemblent, la pluie de l’après-midi aurait probablement effarouché les habituées du coin. On se décide alors à aller voir plus loin. À la rue Ambrose, deux ‘collègues’ fument une cigarette et l’une d’elles tente désespérément de nous ralentir. Raté ! En regagnant la route Royale, nous apercevons un véhicule de la police, qui est stationné en face du Plaza avec les gyrophares allumés. En passant près du véhicule, nous constatons que l’un des policiers fait la sieste pendant que son collègue est absorbé par son téléphone portable, engagé dans une partie de Candy Crush !

Retour à la case départ après une tournée dans les rues de Rose-Hill. Il est 21 h 30, le décor est tout autre ! De loin, le constat est flagrant… plusieurs groupuscules se sont formés, on se croirait dans un ghetto aux States. Quelques instants plus tard, une patrouille de police arrive mais ne s’arrête pas, les occupants de la rue ne s’inquiètent pas de la présence des hommes de Mario Nobin. La voiture passée, le ton monte entre deux hommes. « Rann li so cass, fini ek sa. Péna pou batté f**** mo fam la mem li pena client », entend-on. On peut compter des dizaines de femmes qui squattent la rue en attendant d’avoir un client pour une nuit intime dans l’un des pensionnats de la ville.

Ça se déroule ainsi…

Notre attention se dirige très vite vers un homme à moto qui aborde une femme vêtue d’une belle robe rouge. Ils échangent quelques mots et très vite, l’homme enjambe un buisson. La femme le rejoint en deux trois mouvements. Elle a son premier client de la nuit. De loin, le « m*** » guette.  Il se rapproche discrètement pour ne pas faire fuir le client et se place devant le buisson.

Une deuxième patrouille arrive et les policiers ne trouvent rien d’anormal. En l’espace de deux heures, la police a sillonné par deux fois la rue Célicourt Antelme. Devant le Plaza, la première équipe est rejointe par une autre et les policiers se mettent à bavarder.  Peu après 11 h, une BMW M3 blanche s’arrête et repart très vite avec une fille à bord.

Le moment est alors venu d’approcher l’une des filles pour plus d’informations. Estelle (prénom fictif) est dans le métier depuis trois ans. Ses propositions choquent… « Kot nou alé ? », lance-t-elle, nous prenant pour un client. On joue le jeu, « Kot to dire ». Elle déballe une liste, « Dan bois ? lor parking ? dan pensionnat ? l’hôtel ? dan la cour l’église ou bien dan lécol ? » Ses ‘honoraires’ ? « Rs 400 à monter depann lor céki oulé missié », dit-elle.

Des heures passées sur la route ce soir-là nous amènent à plusieurs interrogations. Pendant que les habitants vivent au quotidien dans l’insécurité avec la présence des prostituées et des drogués la nuit, la police n’agit pas. Aucune arrestation n’a été enregistrée selon nos informations. Ils circulent certes dans des patrouilles, sans plus. Pour les habitants, l’unique question qui se pose…  « Est-ce bientôt fini ces parties de cache-cache ? »