Récentes saisies d’héroïne dans le port
- Démantèlement d’un important réseau de trafiquants au Kenya, dont le Mauricien Roger Alberty
- Un lien établi entre ce réseau kenyan et les récentes saisies d’héroïne dans le port (au total, 157 kg depuis début mars)
- La drogue allait être réexpédiée vers d’autres pays de la région
Comment écouler des dizaines de kilos d’héroïne sur le marché local ? L’héroïne récemment saisie était d’une pureté entre 80 et 85 %, selon les premières analyses du Forensic Science Laboratory (FSL). Selon des experts, la quantité saisie allait être mélangée et multipliée par 10, avant d’être mise en doses pour la vente aux toxicomanes. Toutefois, il apparaîtrait que cette quantité est beaucoup trop pour le marché local, selon les autorités, ce qui signifie que la drogue allait être réexpédiée vers d’autres pays de la région.
L’identité du Mauricien arrêté à Mombasa au Kenya est gardée secrète par les autorités locales. Selon des sources kenyanes, la Brigade anti-drogue de ce pays a procédé à l’arrestation de 12 trafiquants de drogue présumés, qui étaient déjà sous haute surveillance depuis un certain temps. Ils sont huit Kenyans, trois Italiens et un Mauricien, qui ont été pris dans les filets des autorités kenyanes.
La Brigade anti-drogue kenyane avait retrouvé une forte somme d’argent ainsi que de la drogue en leur possession. Au total, 11 220 euros, 4 500 dollars, 952 935 shillings en coupures et sept sachets, contenant chacun 3 kilos d’héroïne, ont été saisis. Des faux billets de 36 100 dollars et 516 000 shillings ont également été retrouvés. Cette affaire a été largement relayée par les médias kenyans.
Roger Alberty, recruteur de ‘mules’
Selon les informations obtenues par les médias kenyanes auprès de la police, Roger Alberty, qui vit au Kenya depuis plusieurs années, était un recruteur de ‘mules’. Chaque année, il fait plusieurs déplacements vers Maurice, et plusieurs autres pays d’Afrique. Il utiliserait sa profession de musicien comme couverture et pour détourner l’attention, selon les médias. Ce dernier est suspecté de faire passer de la drogue entre le Kenya, l’Afrique du sud, Madagascar et les Seychelles. Les enquêteurs ont mentionné le port de Durban, où les 157 kilos d’héroïne saisis il y a deux semaines avaient été embarqués.
Aussitôt l’éclatement de cette affaire, le service d’Interpol à Maurice, représenté par le Central Criminal Investigation Department (CCID) a reçu un courriel officiel l’informant de l’arrestation de Roger Alberty au Kenya. Ces informations ont été relayées immédiatement aux limiers de l’Anti Drug and Smuggling Unit (ADSU).
Le port de Durban, une véritable passoire
Selon l’enquête, ce réseau visait aussi à faire entrer de l’héroïne aux États-Unis. De Kenya, ils transitaient leur marchandise de mort au port de Durban et c’est dans des conteneurs qu’ils acheminaient la drogue vers leur destination.
Le port de Durban est d’ailleurs le même port où deux conteneurs qui transportaient des colis de drogue avaient été embarqués pour Maurice. Les enquêteurs mauriciens ont d’ailleurs déjà établi une ligne de communication avec les autorités kenyanes afin d’obtenir de l’aide sur cette enquête. L’ADSU n’écarte pas la possibilité que le suspect Roger Albert sache quelque chose sur les 157 kilos d’héroïne retrouvés à Maurice.
L’héroïne saisie à Maurice allait être réexpédiée vers d’autres pays
Avec le démantèlement de ce réseau au Kenya, les autorités n’écartent pas la possibilité que la drogue retrouvée à Maurice était destinée à l’exportation. L’île Maurice, se trouvant au milieu de l’océan Indien, est stratégiquement placée pour être une plaque tournante dans le trafic d’héroïne. Cela allait faciliter le transport vers des pays d’Asie, l’Europe et même l’Amérique sur des porte-conteneurs qui transitent à Port-Louis.
La quantité de l’héroïne saisie, soit 157 kilos, est beaucoup trop pour le marché local, selon les autorités. Avec 157 kilos d’héroïne, d’une pureté à 85 %, les trafiquants allaient pouvoir augmenter cette quantité de dix fois. Ce qui fait que 157 kilos allaient devenir 1 570 kilos, soit plus d’une tonne. « L’héroïne pure est mélangée avec d’autres substances, soit avec du paracétamol et de la poudre utilisée pour faire de la mousse noire, avant d’être envoyée sur le marché », nous confie un expert.
Ce dernier nous explique qu’à chaque saisie d’héroïne en grande quantité, la pureté est de 70 à 80 %, tandis que les doses saisies sur des toxicomanes sont d’une pureté de 3 à 5 %.
Les enquêteurs sont d’avis que les 157 kilos d’héroïne saisis à Maurice ont dû passer entre les mains de cette bande. La raison : l’un des suspects arrêtés a expliqué aux enquêteurs que le Mauricien était responsable d’en envoyer cette drogue à Madagascar, Seychelles et Maurice. Deux méthodes étaient utilisées pour cela. La première consistait à l’expédier sur des navires porte-conteneurs et la seconde impliquait l’utilisation des passeurs ou ‘mules’. Roger Alberty était responsable du recrutement de ces personnes qui allaient transporter la drogue dans les trois pays mentionnés.
L’enquête piétine à Maurice
L’enquête sur la saisie de 157 kilos d’héroïne à Maurice piétine, selon nos sources. La raison : le principal suspect dans cette affaire, Navind Kistnah, n’est pas au pays et ce dernier a clairement signifié son intention de ne pas retourner de sitôt pour collaborer avec la police. Pour l’heure, les deux hommes d’affaires, Sibi Thomas et Geanchand Dewdanee, restent en cellule policière.
L’ICAC s’intéresse à Shahebzada Azaree
Shahebzada Azaree, Dat pour les intimes, est une figure très connue, surtout à la rue Desforges. Patron de Fast Food Gloria, situant à la rue Desforges, Dat est également un amateur des courses hippiques. À plusieurs reprises, il a été aperçu au Champ de Mars, raccompagnant même les chevaux gagnants au paddock. La Commission anticorruption soupçonne qu’il serait impliqué dans le blanchiment d’argent, surtout aux courses.
L’ICAC soupçonne qu’il serait également propriétaire de chevaux de courses et il aurait utilisé des prête-noms pour les déclarer.
Shahebzada Azaree devra s’expliquer aux enquêteurs de l’ICAC au cours de cette semaine. « Nous préparons actuellement son dossier et nous n’écartons pas la possibilité d’une inculpation provisoire », nous a confié une source proche de l’enquête.