Q : Vous êtes l’une des rares voix qui dénoncent le manque de considération du gouvernement envers le secteur informel qui tombe dans la catégorie des PME. À quels problèmes ce secteur est-il confronté ?
Le fait qu’il soit connu comme secteur informel sous-entend déjà qu’il n’est pas reconnu par le gouvernement. Avant la Covid-19, on ne nous entendait pas parce qu’on arrivait à se débrouiller. Durant la pandémie, le gouvernement a été obligé de nous venir en aide. Mais ensuite, le secteur a de nouveau été relégué aux oubliettes. Il n’a rien fait pour régulariser ce secteur. Le problème le plus courant, c’est l’inaccessibilité aux finances. Même si notre argent est versé à la banque, nous nous heurtons souvent au refus de la banque de nous accorder des prêts. C’est non seulement difficile d’avoir un ‘personal loan’ mais ça l’est encore plus lorsqu’il s’agit de prêts pour l’investissement. Pour le ‘personal loan’ d’ailleurs, on exige de nous des garanties alors que tel n’est pas le cas pour un employé qui a un ‘pay slip’. Pourtant, quelle garantie ce dernier a-t-il qu’il pourra payer son loan si son entreprise ferme ses portes demain et qu’il se retrouve sur le pavé ? Je ne comprends pas cette différence de traitement.
Q : La Banque de développement ne vous accorde-t-elle pas de prêts ?
Normalement, il faut que le gouvernement vienne avec un ‘scheme’ pour qu’on puisse en bénéficier. Mais pour obtenir un prêt généralement, il faut monter un dossier, comprenant une étude de faisabilité et un ‘forecast’ de notre situation financière. Le hic, c’est que pou taler mem nou pas pe kapave forecast, aster kuma pou forecast pou business ? Et même si nous avons la capacité de faire un ‘forecast’, il nous faut très souvent avoir recours aux services d’un comptable. Maintenant, que le dossier soit approuvé ou pas, c’est une autre paire de manches !
Pour moi, il est clair que les PME auraient dû être divisées en secteurs sectoriels avec des spécialistes qui comprennent ces domaines spécifiques à leur tête. Or, actuellement, les PMEs ressemblent à une tente bazar qui regroupe tous les légumes, sauf que les pommes d’amour et les salades y tiennent une place de choix, en haut. Ces pommes d’amour et salades représentent le secteur manufacturier, quoique bizarrement, même pour ce secteur, le gouvernement ne s’intéresse qu’aux achards.
Q : Comment arrivez-vous à faire face au paiement du salaire minimum et de la compensation salariale ?
Le secteur informel, je le précise, regroupe des ouvriers, plombiers, maçons, cuisiniers, menuisiers, entre autres. Certains ont des petites entreprises, à l’instar d’un contracteur qui peut employer deux maçons pour travailler avec lui ou encore d’un snack qui emploie une ou deux personnes à plein temps ou à temps partiel. Très souvent, ces petites entreprises ne sont pas enregistrées par manque d’informations, n’ont pas de BRN, et ne payent même pas de CSG. Certaines de ces petites entreprises puisent dans leurs poches pour respecter le salaire minimum ou la compensation salariale, alors que d’autres ne le font pas.
Raison pour laquelle j’estime qu’il faut régulariser le secteur informel. Comment est-ce possible qu’un pêcheur soit financièrement soutenu par le gouvernement quand il ne peut pas travailler à cause du mauvais temps alors qu’un maçon, qui est incapable de travailler pour la même raison, n’a, lui, aucun soutien gouvernemental ? Pour moi, ce n’est ni juste ni logique.
Q : Que souhaitez-vous en termes de soutien gouvernemental ?
Le gouvernement n’avait rien prévu pour les entrepreneurs et les ‘self-employed’ dans le dernier budget. J’ai déjà fait des propositions que le gouvernement n’a pas retenues. Je veux maintenant que le gouvernement vienne lui-même avec des mesures pour nous aider. Tant que la volonté politique n’y est pas, nous n’avancerons pas.