- Dégénération du law and order : Le Premier ministre, le premier responsable
Encore une affaire qui éclabousse les Casernes centrales, avec ce vol rapporté contre cinq policiers au poste de police de Piton et à la ‘Financial Crimes Commission’ (FCC) mardi et vendredi derniers respectivement. La victime, Iqbal Ramchurn, 44 ans, aussi connu comme Feroz, est encore sous le choc après avoir perdu une somme de Rs 1,6 million. Cet entrepreneur, éleveur et planteur a retenu les services des avocats Sanjeev Teeluckdharry, Anoup Goodary et Krishna Sawoo.
L’affaire remonte au 15 juillet dernier. Selon sa plainte déposée le 23 juillet en présence de ses avocats, il raconte avoir reçu un appel alarmant de son épouse l’informant que des individus se présentant comme des policiers en civil étaient en train de fouiller leur domicile. À son arrivée sur place, il aurait révélé la présence d’une importante somme d’argent, soit Rs 3,3 millions en espèces, destinée à son entreprise et au remboursement d’une dette.
C’est alors que la situation aurait dégénéré. Selon les déclarations d’Iqbal Ramchurn, les policiers auraient exercé un chantage, menaçant de tout saisir et d’arrêter sa famille s’il osait parler. Avant de quitter les lieux, ils auraient emporté Rs 1,6 million ainsi que l’enregistreur des caméras de surveillance. L’un des policiers aurait même déclaré : « Get sa nou pou prend 200/200 par personne », suggérant un partage du butin entre les malfaiteurs. Selon les premiers éléments d’information, il s’agit des policiers affectés à une unité spécialisée se trouvant dans le nord.
En compagnie de ses hommes de loi, il s’est rendu au poste de police de Piton. La victime explique qu’elle a été interrogée sur place. Les agents voulaient savoir s’il y avait des armes, de la drogue ou de l’argent à son domicile. Il a immédiatement répondu qu’il y avait une importante somme d’argent, et a conduit les policiers dans sa chambre et leur a montré un sac. A l’intérieur, se trouvaient 33 liasses de Rs 100 000. Un policier lui a affirmé qu’il était dans la mélasse. Paniqué, l’entrepreneur s’est mis à pleurer et a imploré la clémence des policiers. C’est alors que le responsable de l’unité a exprimé le souhait de lui parler en secret pour lui faire une proposition. « Nous pou prend 200/200 par personne », lui a confié le responsable. La victime a immédiatement compris que chaque policier voulait une somme de Rs 200 000. Sous le choc et la panique, il a cédé à cette demande. Les cinq se sont servis dans le sac et sont repartis.
Les enquêteurs de la MCIT chargés de cette enquête ont déjà saisi plusieurs documents. Ils ont mis la main sur une entrée consignée contre un sergent de police très connu dans le nord du pays. Dans cette entrée, il est fait état de la perquisition du domicile d’Iqbal Ramchurn et que rien de compromettant n’a été retrouvé lors de cette fouille. Quelques jours après le départ des policiers, Iqbal Ramchurn a vérifié le sac en compagnie de son épouse. Et c’est alors qu’il est tombé des nues en constatant que les policiers n’ont pas emporté Rs 1 million, mais Rs 1,6 million. Dans un premier temps, il croyait avoir affaire à des voleurs. Il décide alors d’en parler avec quelques amis de sa localité ainsi que des policiers de la CID qu’il connaît.
Certains d’entre eux lui confient qu’il s’agit bel et bien de policiers, très controversés qui plus est. Après avoir consulté ses hommes de loi, Iqbal Ramchurn décide alors de briser le silence, affirmant qu’il a été victime d’une grande injustice. Désormais, il y a deux enquêtes sur cette affaire. Une enquête de la MCIT et une autre de la FCC. Les cinq policiers seront prochainement entendus par les enquêteurs sur cette affaire.
Une équipe mal aimée
Plusieurs policiers que nous avons sollicités ont constaté que cette unité de la police est très controversée dans le nord du pays. Leurs opérations sont souvent critiquées par leurs collègues. « Zotte fort sa banne la, zotte ena bel bel contact, pas capave touche zotte sa », nous a confié un policier. Un des policiers qui faisait partie de cette opération est connu pour sa proximité avec un haut gradé de la police et ses proches. Raison pour laquelle il se sent intouchable dans le nord. Malgré plusieurs plaintes contre lui, il n’a jamais été inquiété et reste toujours à son poste. Une source proche des Casernes centrales affirme toutefois qu’il y aura de gros développements dans ce dossier prochainement. Cela car l’affaire a pris une tournure inattendue et l’opinion publique compte, surtout à l’approche des élections.
Cet incident soulève d’ailleurs des questions importantes sur l’intégrité au sein des forces de l’ordre et la confiance du public envers la police. Et surtout sur la volonté du gouvernement, dont le Premier ministre personnellement, à redresser le law and order qui dégringole dangereusement ces derniers temps. Les autorités n’ont pas encore fait de déclaration officielle sur cette affaire d’extorsion, mais les avancements et résultats de l’enquête seront attendus avec impatience, tant par Feroz Ramchurn et sa famille que par l’ensemble de la communauté mauricienne, qui espère voir la justice prévaloir.
Expérience traumatisante pour les Ramchurn
Cette expérience traumatisante aurait eu des conséquences importantes sur la famille Ramchurn. L’épouse et le fils de Feroz Ramchurn auraient développé des problèmes de santé suite à cet incident, soulignant l’impact psychologique profond de cette affaire.
« Eski Pravind Jugnauth pou met l’ordre dans sa pays la ? »
« Nu bizin kapav viv en securité. Ou pa kapav rent dan ene lakaz prend cash akoz ou ene policier. Cover-up ena bokou, eski Pravind Jugnauth pu met lordre dan sa pei la ? », a conclu pour sa part Me Anoup Goodary. « Nu esperer ki pa pu ena cover-up, ki la police pu prend sa zaffair la au serieux », a déclaré Me Sanjeev Teeluckdharry.
La chronologie qui interpelle
Des questions se posent quant à la chronologie des événements et la légalité de la perquisition qui a eu lieu le 15 juillet. En effet, la fouille au domicile par les cinq policiers a débuté à 11hrs alors que ce n’est qu’à 12h15 que le mandat de perquisition a été signé par la magistrate de la Cour de Mapou pour possession de drogues illégales. Cela après qu’un officier de police ait juré de l’exactitude des informations fournies pour justifier la fouille, à savoir qu’Iqbal Ramchurn était surveillé depuis un certain temps
A noter qu’en cas de découverte d’argent soupçonné de provenir d’activités illégales, les policiers auraient dû arrêter Iqbal Ramchurn sur place et le présenter en cour pour des charges provisoires, et ce n’est qu’après tout cela que l’argent aurait pu être saisi.