BILLET : Marginalisation destructive

Pourquoi ce gouvernement s’acharne-t-il autant à ghettoïser Vallée-Pitot ? On aurait cru qu’en 2021, les mentalités ont évolué et que le gouvernement MSM aurait mis fin à sa politique revancharde qu’il pratique contre Vallée-Pitot et Plaine-Verte depuis les années 80. Une politique d’exclusion dont les habitants traînent toujours les séquelles, surtout après avoir été tenus à l’écart des emplois de la fonction publique depuis des décennies. Ce qui explique justement le fait que ces régions port-louisiens comptent, en leur sein, le plus grand nombre de marchands ambulants et de ‘self-employed’. Mais au lieu de leur tendre la main pour qu’ils puissent surmonter cette éprouvante et douloureuse épreuve que leur a imposée la zone rouge, le pouvoir dirigé par Pravind Jugnauth s’obstine à les marginaliser davantage. Le ‘post’ du conseiller du Premier ministre Zouberr Joomaye sur Facebook peu après les incidents à Vallée-Pitot lundi soir traduit clairement tout le mépris qu’éprouve le régime actuel pour cet endroit.

Au lieu de faire croire que les résidents de Vallée-Pitot « jouer aux victimes », le Dr Joomaye aurait pourtant pu, avec un peu plus de tact et de compassion, aider à décanter la situation. En tant que candidat battu dans cette même circonscription aux dernières élections générales, il est bien placé pour savoir que Vallée-Pitot n’est ni Curepipe ni Quatre-Bornes. Cet endroit est composé majoritairement de familles vulnérables qui « travay gramatin pou manz tanto ». Raison pour laquelle il leur est plus difficile de subir ces restrictions, dépourvues des moyens les plus élémentaires de subsistance. Pourquoi donc comparer ce faubourg de la capitale aux autres, sachant pertinemment bien que les spécificités sont les unes plus différentes que les autres ? « Out of all people » au sein de ce gouvernement gaffeur, Zouberr Joomaye, au lieu de se montrer orgueilleux et amer, aurait pu s’imposer comme un interlocuteur privilégié du gouvernement auprès de ces habitants.

Si le bon docteur était descendu sur le terrain pour expliquer pourquoi aucune communication officielle n’a été émise avant 20h pour annoncer l’extension de la zone rouge, peut-être qu’on n’en serait pas arrivé là. S’il s’y était pointé en compagnie du vice-Premier ministre Anwar Husnoo, qui était descendu à Vallée-Pitot pour un exercice de séduction politique récemment, pour rassurer les habitants tout en leur donnant la garantie qu’ils bénéficieront d’une allocation financière pour les soulager, cela aurait été encore mieux. Ils auraient gagné l’estime de ces centaines de personnes dégoûtées par la façon dont elles sont traitées par les autorités. Malheureusement, il semble être plus facile au gouvernement de jeter le blâme sur des victimes de leur mauvaise gestion au lieu d’assumer les conséquences de leur incompétence et amateurisme. Tout comme il leur est plus accommodant de faire porter le chapeau aux députés de l’opposition venus pour apaiser les tensions au lieu de reconnaître leur tort.

Qu’on le dise haut et fort, le gouvernement est le premier – et le seul – à être blâmé pour les incidents survenus à Vallée-Pitot en début de semaine. Il ne suffisait qu’une communication claire, nette et efficiente pour éviter de tels dérapages. Qu’il ne cherche donc pas de bouc-émissaire pour se dédouaner ou pour marginaliser davantage toute une région. L’exclusion et la répression ne lui seront d’aucune aide au moment où les urnes le sanctionneront.