Grève de la faim : Nishal Joyram plus motivé que jamais

  • « Je suis dans la cour du Seigneur et celui qui se remet au Seigneur ne craint rien […] Si les autorités ne réagissent pas à ma demande, elles devront assumer leurs responsabilités »

Dans la cour de la cathédrale St. Louis, on peut voir une tente bleue, où est accroché le quadricolore. À l’intérieur, Nishal Joyram est assis, serein. Voilà déjà cinq jours à hier, samedi, depuis que cet enseignant dans la quarantaine a débuté sa grève de faim, pour que le gouvernement baisse les prix des carburants. Même sous un soleil de plomb, suivi par des nuits froides, Nishal Joyram est motivé à bloc pour continuer son combat.

 « Les prix des carburants sont terriblement élevés à Maurice. Ils ne connaissent aucune baisse, même si sur le plan international, ces prix ont chuté, et cela depuis plusieurs mois. Le gouvernement mauricien est en train d’utiliser cet argent qui entre dans ses caisses pour financer ses activités et pour renflouer son budget. Or, quand les prix des carburants augmentent, ce ne sont pas seulement les automobilistes qui sont affectés, mais aussi toute la population. Les Mauriciens font déjà face à plusieurs difficultés pour pouvoir joindre les deux bouts. L’État ne peut continuer de tondre ce petit peuple de cette façon », martèle Nishal Joyram.

Selon lui, le directeur de la STC, Ranjiv Servansingh, lui avait dit que le ‘Petroleum Pricing Committee’ (PPC) allait se rencontrer l’année prochaine et lui avait suggéré de reporter sa grève de la faim pour janvier 2023. Mais le quadragénaire refuse de se prêter à ce petit jeu. « En septembre, il y avait la même rengaine avec le Petroleum Pricing Committee’. On avait dit que les prix des carburants allaient baisser. C’est comme un jeu de yoyo. Aujourd’hui, on veut faire la même chose », fustige-t-il.

Le gréviste a quitté son confort et sa famille pour mener une lutte contre les prix des carburants. « Au départ, convaincre ma famille n’était pas facile puisqu’elle m’a découragé d’aller de l’avant. Mais j’ai finalement pu la convaincre. Mes proches ont compris la justesse de ma cause », nous explique Nishal Joyram. Ces derniers lui rendent d’ailleurs visite au moins une fois par jour.  « Je reçois énormément de soutien de la part du public », nous affirme Nishal Joyram. Il y a en effet pas mal de personnes qui viennent le voir le matin, dont des députés et des activistes. Parmi les personnes qui sont venus le soutenir, notons la présence des députés travaillistes, dont Eshan Juman, Patrick Assirvaden, Mahen Gungaparsad, Fabrice David, du député mauve Reza Uteem, d’Ivann Bibi, de Raouf Khodaboccus, d’Alain Malherbe, des avocats Bissessur et Teeluckdharry. Même le leader du PTr, le Dr Navin Ramgoolam, lui a rendu visite, hier.

« Évidemment, il y a aussi certaines personnes qui ne sont pas d’accord. Nous sommes dans une démocratie et tout le monde a le droit d’avoir son opinion. Je me bats pour une cause et non contre une personne en particulier », nous explique Nishal Joyram. Notre homme affirme qu’il maintiendra sa grève de la faim jusqu’à ce que le gouvernement baisse les prix des carburants. Il demande aux personnes qui le soutiennent de prier pour lui, pour qu’il puisse continuer avec sa grève. « Je suis dans la cour du Seigneur et celui qui se remet au Seigneur ne craint rien », affirme Nishal Joyram. « Si les autorités ne réagissent pas à ma demande, elles devront assumer leurs responsabilités », dit-il.

Gréviste, mais aussi activiste

Nishal Joyram nous explique qu’il est soutenu par un comité de soutien qui a déjà soumis plusieurs propositions.  Il prévoit, par ailleurs, de tenir un rassemblement ce dimanche 20 novembre à 14h devant la cathédrale St. Louis, où toutes les personnes qui sont solidaires de son action pourront signer un livre pour démontrer leur opposition à la politique « dominer » du gouvernement. Le gréviste a aussi l’intention de lancer une campagne dénommée ‘Allime ou phare’ ce lundi 21 novembre. Les automobilistes qui veulent y participer sont ainsi invités à allumer leurs phares pendant la journée du 21 novembre. Qui plus est, ce patriote compte, à partir de la semaine prochaine, accentuer la pression sur le gouvernement. 

L’avocat Sanjeev Teeluckdharry rejoint le combat

Il n’est pas resté insensible au sort de Nishal Joyram. Convaincu que ce dernier milite pour une juste cause, l’avocat Sanjeev Teeluckdharry a rejoint au combat de Nishal Joyram devant la cathédrale St-Louis dans une initiative citoyenne. Il a ainsi entamé une grève de la faim à son tour depuis vendredi. « Nous sommes interpellés quand quelqu’un entame une grève de la faim. C’est symbolique. Le gouvernement doit comprendre la souffrance du peuple », dit-il, en précisant néanmoins que son espoir ne réside pas sur le gouvernement, mais sur les citoyens.

Le prix de l’essence, avance-t-il, se vend actuellement moins de Rs 40 sur le marché international. « Kifer pe vane li Rs 74. 10 ? Eski c’est pas ene vol sa ? », se demande-t-il. Se disant d’avis qu’il faut un gouvernement de transition à la tête du pays, il s’est adressé au Dr Navin Ramgoolam, présent pour leur témoigner son soutien hier, pour lui lancer un appel afin de revoir la politique monétaire. « Nou pa kapave rentre dans ene spirale inflationniste. Ene côté, pe dévalué roupie, pe augmente l’essence et diesel et ene lot côté, pe fer bane dépenses extragavants. Avec satellite, Rs 29 millions fek disparet dans l’air », déplore-t-il.

Navin Ramgoolam : « Du vol en plein jour »

Il l’avait dit au meeting travailliste à Saint-Pierre vendredi. Et il a tenu parole. Le leader du PTr, Navin Ramgoolam, a rendu visite à Nishal Joyram, hier. Une initiative qu’il dit avoir prise en tant que citoyen et non politicien. Tout en félicitant le combat du gréviste de la faim, il a lancé un appel aux citoyens. « Si sak citoyen ti réalisé seki bizin fer, sa gouvernement-là pa tini sa », a-t-il observé.

Abordant les prix des carburants, il trouve inacceptable que le gouvernement les maintient alors que les prix ont baissé par au moins 27, 5% sur le marché international depuis mars dernier. « Ena possibilité pou baisse li par plis ki Rs 30 parski prix la pe continué baissé au niveau mondial », a-t-il poursuivi, en prenant l’engagement de revoir les prix des carburants, qui entraînent un effet cascade sur les autres prix, une fois au pouvoir.

« Bizin redynamise l’économie. Mo pa koné si zot koné, la Banque de Maurice déjà banqueroute la. Ou pou trouvé ki pou arrivé divant » a averti le Dr Navin Ramgoolam. Il a aussi égratigné Rajiv Servansingh, directeur de la STC. « Seki Servansingh pe dire scandaleux. Li dire pas pou kapave baisse prix akoz bizin paye pension. Be veut dire li pe coquin dimoune. Vol en plein jour sa », a poursuivi le leader du PTr.

Il a enfin lancé un appel au gouvernement. « Bliyé politique. C’est ene citoyen ki pe fer sa, pas politicien. Prend dossier la. Zot fort dans prend gros la paie, roule dans gro loto, c’est tout ».